Sommaire
- Ancrage au pays de l’homme
- Introduction
- première partie : tournez manège!
- Chapitre 1 : reconnections
- Chapitre 2 : etat confusionnel
- Chapitre 3 : triple saut avant plongee dans l’inconnu
- Chapitre 4 : la porte en barque
- deuxieme partie : la voie sur rail
- Chapitre 1 : retour au quotidien
- Chapitre 2 : sortie de caverne
- Chapitre 3 : a coeur d' »u »-rail
- troisieme partie : « u » l’ouverture vers l’ocean
- Chapitre 1 : l’empire eclate
- Chapitre 2 : preparer la quete
- Chapitre 3 : des murs mentaux au mur physique
- Conclusion du livre
« Je vous enseigne sur la cause de toutes les maladies. Vous n’existez pas pour vous-même. Vous recevez largement votre nourriture quotidienne. Mais vous ne la recevez pas gratuitement. Elle se transforme en vous en une force merveilleuse. Cependant malheur à vous si vous la gardez pour vous-même ! RETENIR LA FORCE EST LA CAUSE DE TOUTES LES MALADIES. IL t’a créée pour que tu rayonnes si ta nature est de rayonner, ta tâche est d’en devenir consciente et d’agir en conséquence. »
Dialogues avec l’Ange
Edition intégrale P 109
INTRODUCTION: UN MESSAGE ONIRIQUE
Le vieux porte-avions a jeté l’ancre en plein océan. L’ancien bâtiment a perdu sa puissance de guerre et ses envies de course-poursuite de quelque chimère en goguette dans la tête de la capitaine. Il balance, doucement, au gré du vent. Les vagues clapotent contre sa coque. Les assauts conjugués de la mer et des alizés ont lavé sa couleur originelle gris-bleu, froide, métallique.
Le voici radouci, humanisé, il s’offre à nos yeux comme une immense structure de fer désarmée, piquetée, çà et là, de points de rouille. Sur le pont supérieur, une grande rotonde domine à plus de dix mètres de la surface de l’eau. Sa tourelle, hier encore affublée de mitrailleuses-folie, d’armes non maîtrisées qui tiraient en rafales, en tous sens, expose à la vue : un manège !
Cette véritable attraction foraine anachronique propose en guise de chevaux de bois – ceux habituellement fixés sur un tel plateau circulaire mobile- de lourdes barques qui s’arriment à la queue leu-leu. Chaque barque du carrousel est occupée par un couple, homme-femme, et tourne au rythme du moteur de la tourelle désarmée. Lorsqu’une barque du manège se positionne face à l’océan, son couple peut lancer une longue et lourde canne à pêche en direction de l’eau. Il entre dans son heure de rêve, d’espérance d’hameçonner quelque poisson. Parfois, quand le rythme du manège ralentit, quand le temps de maintien dans cette position idéale s’allonge, l’espérance se concrétise en une pêche miraculeuse. Cette pêche exige une grande finesse de ressenti de la prise au bout du long, démesuré fil de ligne. Un fil accroché au corps pesant de la canne qui ne fait entendre l’infime vibration produite par le poisson piégé qu’au couple à l’écoute, au couple fusionnel, au couple un avec son acte de pêche. Un couple présent, qui saura, simplement, remonter sa prise jusqu’en la barque. Vie disciplinée, vie mécanique, vie de « tournez-manège », tu amuses les enfants mais tu ne fais plus rire les grands !
A l’heure voulue, un jour, le couple sent sa barque quitter le manège. Dans un glissement doux elle s’installe dans une nouvelle file d’attente. Qui détermine ce moment de changement de cap ? Est-ce la prise d’un poisson, cette preuve vivante de l’éveil des sens du couple ?
Au cours de sa sortie du manège, la barque s’allège. Sa carcasse troque le métal lourd pour un bois exotique, pour un sal asiatique. Puis elle suit le nouveau chemin en s’emboîtant sur un rail. Elle descend, très lentement, vers l’ancien ponton là où, jadis, les avions guerroyeurs, en attente de leur décollage, se positionnaient. Le rail décrit une forme de U, pour longer le bateau un étage en dessous de la tourelle. La distance à l’océan se réduit de moitié, elle autorise l’usage d’une canne à pêche plus courte, plus légère. La pêche devient moment de reliance plus facile avec l’océan.
Plusieurs barques se suivent, avancent, tranquillement, sous l’impulsion de quelque courant d’énergie non visible. Attente ! Respiration ! Mon époux et moi-même sommes positionnés là. Notre barque est précédée par celle d’un couple de gens plus jeunes. Ils ont atteint le bout du rail. Devant leur embarcation, la rampe de lancement. L’heure de leur départ autonome dans l’océan est proche.
Notre barque va donc atteindre, dès leur partance, ce point où le largage dans l’océan se réalise. Aucune exaltation, aucune impatience, aucun énervement, purement le contentement même si, en l’instant, la barque devant nous vient de se rompre. Le blocage de circulation que cette rupture engendre ne crée en nous aucun affolement. Mon époux descend apporter son aide. Dans le même temps les secours de la structure sont là et libèrent la place. Le fruit de la pêche du couple de la barque accidentée est distribué à chaque couple des barques en attente dans la file. Je bénéficie d’un très beau morceau de poisson frais, à la chair blanche, belle, épaisse. La voie est dégagée. Au loin sur l’océan, je distingue deux barques. Elles sont encore plus légères que celle en sal dans laquelle je suis. Leurs coques semblent faites de peaux de phoque. Leurs pêcheurs sont-ils dotés de cannes à pêche très courtes et ultralégères, ou font-ils glisser simplement avec leur main, un fil dans l’eau ? Contact direct avec l’océan, fusion des couples avec l’eau océane . »
A l’encre « bleu des mers du Sud » s’est transcrit sur mon journal, le 2 décembre 2012, ce rêve d’océan qu’une vague de nuit a déposé sur la plage de ma mémoire. Juste à cet instant de mon réveil, juste une fois posées les lignes du rêve, mon émotionnel, mon ressenti, sont acceptation pure de ce qui se passe.
Eclairée par ma Conscience, l’ombre de la lourdeur des structures du paquebot, l’ombre du poids des barques du manège, l’ombre des barques sur la pente de lancement, l’ombre m’appesantit jusqu’à ce que la vision des peaux de phoque sur l’océan m’ouvre à l’espérance, à la paix, à la vacuité!
Je suis sur ce paquebot, j’observe ma vie. Elle défile au travers les multiples barques dans lesquelles je me suis hissée, couple féminin-masculin que je fus, que je suis.
Première partie : Tournez manège !
« Tournez-manège » impose aux couples de vivre dans une communauté qui tourne en rond. Dans un espace réduit, chaque homme, chaque femme, subit les exigences du traintrain, ne peut déroger aux règles strictes dictées par un moteur dont nul couple ne voit le maître. Sur ce manège, nul ne connaît la Capitaine, elle vit cachée par le groupe. »
CHAPITRE 1 : RECONNECTIONS
Implantation en Dordogne
Le vieux porte-avions s’implante ici. Sa couleur originelle gris-bleu, froide, métallique, légèrement délavée, s’offre à nos yeux comme une immense structure de fer . Sur le pont supérieur, une grande rotonde domine à plus de dix mètres de la surface de l’eau. Sa tourelle, encore affublée de quelques armes non maîtrisées qui peuvent tirer en rafales, en tous sens, expose à la vue la nouvelle attraction : son manège. Il est garni de sa première lourde barque dans laquelle est installé mon couple.
A notre premier contact, en septembre 1969, j’ai découvert ta puissante Energie, Ô Terre de Dordogne ! Je l’ai ressentie capable de me porter, loin, dans un nouvel apprentissage de ma vie. Double coup de foudre de cette année-là, je suis tombée amoureuse de toi, dans le même temps où je me suis éprise de l’homme natif d’ici.
Ce mois de juin 1987, je jette mon ancre sur Tes Terres !
Nous emménageons. Immédiatement, s’impose à moi l’idée de parcourir les nouveaux entrelacs de mon chemin à travers ton pays au nom si parlant, « Dordogne : pays de l’homme », comme je parcours la route qui se dessine sur les labyrinthes de papier. Là, sous l’impulsion de mes doigts, de mon cour, la mine d’un crayon couleur soleil trace mon parcours, éclaire les méandres en déposant un pigment jaune entre leurs contours noirs.
Aux premiers mois de mon installation, en quelques sauts de mine, une descente très rapide, un lacis amorcé par un imperceptible virage à gauche, me dirigent vers un centre inexploré, m’inclinent vers la féminité, la douceur, l’ouverture, le réveil de mon être profond. Je n’en suis pas consciente mais je sais que cela bouge. C’est comme si le début du poème de Jean Pierre Siméon s’activait en moi : « Réveille-toi ! L’heure est arrivée de marcher, d’ouvrir les portes, de soulever les pierres, de fouiller dans les tiroirs de l’ombre, de creuser des puits dans la Lumière jusqu’à atteindre le tracé noir de ta prochaine dérive ».
Pendant six mois, je marche et je plane sur un petit nuage car ô chère Dame Nature périgourdine, toi, si verdoyante, si arborée, si quiète, tu fais entrer Paix et Joie dans ma tête, tu me remplis d’Espérance !
L’emménagement de notre demeure est fini. Tout semble avoir trouvé sa place, sinon pour Maître Mental. De sa manière lourde, déstabilisante, il refait son come-back, ce mois de janvier 1988. La trêve, pour lui, est achevée, et d’emblée, il renoue avec sa déplorable habitude de se rebeller en moi. Mon bien-être s’étiole. Une part de moi ne peut, ni ne veut, se laisser embarquer dans son vieux jeu d’avant ma vie ici. J’ai égaré le goût de courir de méandre en méandre, d’approcher du Centre de mon labyrinthe où rayonne la Lumière, de me heurter au mur, et, sur un nouvel entrelacs, de m’éloigner d’Elle, la tête tournée vers Elle à contre-courant de mes membres inférieurs. Je ne saurais reprendre la route, marcher en aveugle, butter sur le premier dos d’âne, retourner ma tête, reprendre l’axe de mes pieds qui avancent toujours, et simultanément, assurer la fermeture de toutes mes ouvertures, dilater mon plexus jusqu’à l’éclater, par spasmes, en colères bruyantes, et retrouver un refuge dans mon inconscience. NON !!! Non merci ! Je n’ai que trop joué ce jeu-là, depuis bien trop d’années. Je tends mes bras vers là-haut, geste vers ma mine à Ciel ouvert, pour happer la règle du jeu offerte par ta nouvelle Energie, Ô Terre de Dordogne !
« Ici, ma Belle, la règle s’inverse : Le trait noir devient ta route, tu vas suivre la route de tes ombres, un filet blanc la borde pour éclairer ta direction, pour fixer aussi ton mur, et tu t’y heurteras bien souvent … avant que d’atteindre la Lumière… mais n’aies crainte ! »
Tant bien que mal, je reprends le chemin pour que recommence ma danse sur le fil noir. Combien de fois ma mine se casse contre mur blanc ? Combien d’écrasements psychologiques pour mon nouvel être au féminin ? Combien de triomphes pour Maître Mental ? Combien de fois mur de papier se meut en mur de béton ? Combien de douleurs, de pleurs sortant de mon corps ? Combien de cris éructe-je vers le Ciel ? Combien d’illusions, de déceptions je vis ? Combien de non-réponses du Ciel n’ouïe-je ?
Puis un soir, doucement, à l’abandon, j’ai chuchoté :
« Qui m’aidera ? »
Par cette douceur, par ce féminin en quête d’une nouvelle place en moi, est revenu le calme. Il n’est pas resté longtemps . si peu de choses le meuvent. Il a suffi de mon regard posé sur le dessin de mon chemin, sur ce dessein de ma Vie, pour que monte mon inquiétude : « Pourquoi Lumière que j’entraperçois, te proposes-tu à ma vue si je ne puis t’atteindre ? Pourquoi Paix qui s’annonce, te détournes-tu de moi ? ». Ma voix est muette, seuls les mots vibrent dans ma tête. Vers qui vont ces mots ? Vers quelles vieilles références d’enfance ? Vers quel Ciel que je ne sais définir ? Une Force Muette, mystérieuse insuffle, sans un son, sa réponse en moi « Pour que tu gardes confiance, pour que tu continues le chemin, sans relâche, je t’offre des messages d’espoir d’une rencontre future ».
Malgré le lot quotidien d’alternance usante de pluie-désespoir et de soleil-confiance, l’Espérance, furtivement, nidifie au fond de moi.
Ô sons dissonants que je joue sur ma harpe, je rêve encore, j’aspire toujours, à l’euphonie. Ô Dordogne, ô terre de l’homme, parviendrais-je jamais sur ta Terre à jouer ma mélopée ?
Jour de Bascule
Le vieux porte-avions s’ancre de mieux en mieux dans la Terre de Dordogne. Il garde sur sa tourelle quelques vieilles armes qui tirent toujours, soudainement, en rafales. Sur le manège, une seconde lourde barque est entrée et accueille mon couple.
Voici venir un superbe virage en épingle à cheveux. Je le négocie ce jour de printemps 1988.
Je pénètre dans la librairie au nom étrange, au nom qui chante en moi :« Mandragore ». « Enfin une librairie comme je souhaitais ! », dis-je en souriant à l’homme qui m’accueille. Ravi d’entendre ces paroles d’enthousiasme, le libraire joue les guides, m’invite à faire le tour de sa chère Mandragore. Il parcourt ses rayons et passe, comme incidemment, devant un rayonnage d’angle, fort petit, quasi caché, en lançant un « là vous avez le rayon ésotérique ! ». Tilt ! Tilt ! Tilt ! « Esotérique ? ». J’entends ce mot pour la première fois. Curiosité de Maître mental, mais chut ! Ne pas poser de question, ne pas montrer son ignorance !!!
Le libraire a fini la visite et m’abandonne à ma libre exploration de sa boutique. « Esotérique ! » Le mot sonne comme un mot interdit, tambourine en mon cœur, bat dans ma tête, véritable aimant il m’attire vers le recoin mystérieux. J’ai l’impression d’outrepasser mes droits en allant vers lui, je biaise en commençant ma recherche dans l’autre bout du magasin.
Errance vaine qui s’achève, très vite, devant le rayon inconnu. J’explore du regard ses étagères. Je capte un titre. Mes yeux le lisent : « Tu es cela ». Maître Mental ne pense plus. Cerveau déclenche le geste de mon bras, fait ouvrir ma main, fait refermer mes cinq doigts sur l’ouvrage. Je le feuillette. Je relie le titre : « Tu es Cela – A la recherche du soi ». J’enregistre le nom de l’auteur : Arnaud Desjardins. J’achète. A la maison, j’entre dans la lecture de son premier chapitre.
« . sentez que la Conscience en vous n’a pas de limites, . Elle est immobile.. Elle est immuable. Elle échappe complètement aux causes et aux effets du film et du scénario. ».
J’y entre lentement, je suis toute aux aguets. «L’expérience a montré qu’entre le sommeil de l’identification complète et la plénitude de la Conscience absolue, il y a des moments de conscience, des aperçus qui sont voilés comme un soleil de demi-saison . les nuages sont les images le plus souvent utilisées pour pointer dans la direction d’une compréhension nouvelle de nos limitations et de nos formes changeantes de conscience. »
Je lis en veillant à ma conscience. La dévoreuse de romans s’efface. Je deviens lectrice sur le chemin de mon initiation. le manège vient positionner notre barque face à l’océan, je lance la lourde canne à pêche …
Dès les premières pages du premier chapitre, je décide d’appliquer. Je m’invite à intégrer, ligne à ligne, les propos de ce livre. Je suis poussée par une Force mystérieuse à vivre chaque proposition offerte par Arnaud Desjardins, à l’appliquer dans mon quotidien. Ma lecture se déroule en ondes émotionnelles. C’est déraison ! C’est la bascule pour Maître Mental.
« Prenez conscience de votre « je suis » limité, de vos nom, prénom et qualité et sentez : fondamentalement, c’est ça ma prison . L’important n’est pas mes angoisses . L’important est uniquement cet éveil qui va me libérer de moi. Sentez la prison fondamentale, qui est simplement « moi », « ego »- le reste est secondaire … ».
Cet état passé de moi s’éclaire et m’offre l’accès, ce jour, à moi-consciente.
Jusqu’à notre arrivée en Périgord, sans conscience, mon corps vivait sous les chocs qu’il subissait, sous les caresses qu’il recevait. Cœur et plexus solaire frémissaient, palpitaient, tremblaient mais en tout premier chef, la partie la plus vivante, la plus parlante, était ma tête. Alors ce corps qui portait, voire supportait, mes qualités de courage, de sérieux, d’application et de besogneuse, était corps sans forme reconnue valable par moi. Il était un corps corvéable à merci, à resserrer dans des gaines, dans des jupes à taille fine, à valoriser par des soutiens gorges, à hausser par des talons trop hauts, à amincir par des régimes plus ou moins draconiens, régimes largement indifférents aux souffrances qu’il généraient dans mes cellules. Je l’entrainais dans toutes mes folies censées recréer un corps adapté à la reconnaissance des autres. Dans ce corps, le visage était maquillé. Mes glandes sudoripares hyper dynamiques se vengeaient, et, sur ce visage que d’aucuns disent « miroir de l’âme », elles rejetaient en trainées rosâtres, noirâtres ou bleuâtres, selon leur couleur, les crèmes et les rimmels dont je l’affublais, toutes ces couleurs des autres qui n’étaient pas Moi . Des ondes de joie, joie de saisir cela, joie de me comprendre, me traversent ! Je poursuis ma lecture attentionnée. Les ondes de me « mieux vivre » se multiplient. Puis, soudainement, Arnaud Desjardins parle d’ashram, de guru, de lying.
Comment ? Où ? Qui ? Je ne trouverais jamais cela ! Maître Mental, le pessimiste, jubile. Je perds pied. Je me laisse agrippée par toutes les lourdeurs de vie qui passent. Sur la rotonde, les vieilles armes retrouvent leur usage, tirent en rafales à tous vents, je ne sais plus les arrêter.
Les ondes se transforment, deviennent ondes de colère, ondes d’impuissance, ondes de désespérance, ondes de peur. Je me noie dans la peur immense de ne pouvoir jamais parvenir à Me rencontrer. Pourtant, un fil me relie encore à l’espérance. Une vérité qui parle en moi : » La Lumière sait ton état mais ne peut rien faire. Simplement, Elle t’attend. Elle attend que tu te décides à revenir vers Elle. » Je repousse mes peurs, je continue la lecture de « Tu es Cela » : « Si ces paroles ont un écho pour vous, vous aurez naturellement envie de vous éveiller, de découvrir la Conscience, et vous mesurerez la force de votre inertie, de votre lourdeur, de votre torpeur . Allez-vous tout de suite vous décourager ? Ou est-ce que vous ne pouvez pas vous décourager, tant vous aspirez à cette réalisation ? Mais vous n’y aspirerez que si une voix en vous affirme « c’est possible, oui, je le sens, c’est possible pour moi . ».
Des mots pour m’apaiser, pour relancer ma confiance, s’écrivent sur les pages que je lis, déjouent mon envie d’abandonner le chantier. Sans trop m’en apercevoir, je recouvre la Confiance.
Et le jour lumineux vient. Au bout du fil de la canne à pêche, un poisson …
C’est un jour d’un tel éclat que j’ai cru être arrivée, que j’ai cru avoir atteint la Paix. Un ressenti de plénitude m’a habité car, depuis Là-haut, d’Au-delà de la voute du Ciel, un grand Silence, plus audible que n’importe quel mot, est venu m’atteindre à cour, me pénétrer de la conviction profonde :
« Dieu existe ! »
La conscience immuable, immobile existe ! J’entre dans la Paix. OUI ! Assurément OUI ! Petit ego est convaincu que tout est à portée de sa main. La jupitérienne, que je suis, s’emballe dans la joie ! Ma canne à pêche, en dépit de la distance qui me sépare des profondeurs marines, a harponné un poisson spirituel, un tout petit poisson spirituel, et je l’ai senti . et je l’ai ramené dans la barque !
CHAPITRE 2 : ETAT CONFUSIONNEL
Sous mes pieds, le vide
J’éclate de Joie, j’exulte, j’éclabousse .
Manège est resté immobilisé sur mon lieu de pêche. J’ai épousé l’attitude jouissive du pêcheur au gros qui vient d’harponner son poisson .
Je ne peux rien maîtriser. Je suis hypnotisée par cet « objet » divin, par cette matérialisation mentale de mon désir profond.
Emplie d’un enthousiasme dégoulinant, réinitialisée dans ma croyance en un Dieu après la si longue traversée de mes doutes, je cherche le partage.
Mais les conditions sont-elles adaptées à mon agitation émotionnelle ? Sais-je voir que l’autre, que je choisis, est à des lieux de ma zone de pêche ? Suis-je consciente qu’il manifeste, en temps ordinaires, une indifférence totale pour ce type de poisson ?
NON !
Cela m’importe peu. Cela déborde trop en moi. Je dois lui parler, je dois partager ma découverte … Ego … Ô ego-ïste !
Evidemment, ce qui devait advenir échoit.
Sans une attention réelle pour l’autre, sans aucune modération, je déverse le fruit de ma pêche miraculeuse à même le plancher de notre barque. Mon échange envahisseur s’écrase sur l’autre. J’attendais quel retour ? Nullement celui qui est. Ma Pêche-Lumière s’enténèbre, là, aux pieds de l’époux.
Mon excitation a activé, au-delà de la normale, le trépignement de mes pieds, j’ai troué le plancher de notre barque. Dessous, je vois les différents organes du carrousel en mouvement, leur bruit devient puissant, la vitesse du manège semble se décupler …
Tangue notre barque ! Heurt métallique, bruit de ferraille !
Le revers de l’époux est à la démesure de mon nouvel Amour, Amour pour l’Invisible, que j’effeuille à ses pieds, sans retenue. Dans notre couple qui pratique confiance et fidélité depuis vingt ans, une jalousie inhabituelle se crache hors de lui en réjection de ce « rival » hors norme que j’exhibe, abusivement. L’émotion prend le pas sur sa sagesse, les mots cinglent : « Ça y est ! Ca ne pouvait arriver qu’à moi ! Je suis cocu avec le Bon Dieu ! » Mots négatifs, mots noirs, mots matière, mots anti Lumière, vous vous aplatissaient sur le fond de notre gondole. A mon tour, je m’écarbouille. Nous quittons Venise !
Mon exaltation rend l’âme. Elle a duré . jusqu’à ce nouveau coup de vent, jusqu’à cette nouvelle . non reconnaissance de l’autre.
J’ai reçu l’uppercut ! Il me déchire entre colère et impuissance. Je m’obsède de ce rejet marital de ma Découverte. Ma jeune, ma fragile, ma timide foi cherche la route, zigzague, entraîne ma confiance à repiquer dans le chemin du doute. Puisque l’autre condamne ma foi, je deviens huître. Par sa faute, j’enferme ma perle rare à cœur de ma coquille. Car, dans mon état de colère, de rébellion contre l’autre, contre ce mâle que je ressens dominant, j’occulte totalement la cause de ses mots, je nie les maux que j’ai créé en lui.
Je ne reconnais qu’une seule victime : moi ! Ma perle se contracte, devient petit point de nacre, minuscule point, si faible reflet de La Lumière rencontrée il y a si peu de jours … il y a tant de jours, il y a un siècle ….
Nous investissons une nouvelle barque. Je cède le banc-avant à masculin, je lui donne le droit d’étaler son pouvoir en première ligne. Positionnée sur la banquette arrière, je recroqueville mon féminin. Je l’éloigne de ma moitié . J’use de mon droit à la colère contre lui et surtout contre moi-même, je réarme ma mitraillette. Le rythme du carrousel s’accélère … Le tourbillon nous emporte .
Me réveiller, reprendre la route, retrouver la Lumière !!!
Je dois trouver un asile. Où considérera-t-on ma foi non adultère ? Dans la maison de Dieu. Voilà, je dois renouer avec ce lieu où, j’en ai la certitude, la brebis égarée -depuis combien d’années ?- sera recueillie. Ma décision est prise. Mon refuge en l’Eglise sera ma réponse à son refus d’entendre ma foi nouvelle … qu’il s’y accorde ou non. La rencontre est surprenante. Les temps ont changé. L’époque de ma communion solennelle est largement révolue.
Dans ce lieu que je croyais pareil à mon vieux lieu de culte, tous mes sens sont sollicités : – j’écoute, étonnée, une messe en français, en un langage compréhensible, – je vois l’officiant me faire face, son autel a changé de place, il célèbre sa messe à la vue des fidèles, – je touche les autres fidèles lors de l’embrassade confraternelle de mi-fin de messe. – je sens l’encens, et ces odeurs sont odeurs que je reconnais. – je goûte l’hostie, je ne suis pas certaine de la reconnaître. Avant de l’atteindre, tant de choses ont muté. Je suis désarçonnée.
Dans l’assemblée des fidèles, plutôt réduite en cette église, je suis visible. Le prêtre empreint de fraternité christique m’invite à jouer un rôle actif. La nouvelle pratiquante que je suis est donc sollicitée pour lire tel ou tel épitre, à la vue des fidèles présents, et je ne sais refuser, et je suis mal être.
Je ne cherchais qu’un refuge, qu’un lieu où, en toute discrétion, j’aurai pu vivre ma nouvelle foi, incognito, au milieu de paroissiens anonymes, mais telle forme « gratuite » de reconnaissance ne m’est pas offerte. C’est au grand jour, en mots clairs, que la brebis qui revient se joindra aux fidèles et partagera avec eux la joie d’une vie de sainte famille. Tout est bouleversé, tout me trouble, rien ne répond à mon attente. Soudain,
Manège émet un étrange bruit. Manège nous arrête complètement à l’opposé de l’océan, loin de tous lieux de pêche, et là, manège fait silence.
Ce dimanche, impossible de me rendre à l’église. Tout en préparant ma table d’hôtes, j’écoute la messe à la radio. Le temps de la communion est arrivé. Le silence de recueillement, côté auditeurs, laisse un vide-radio qui ne saurait durer, alors des commentaires-off viennent meubler ce soupir de la messe. Et les mots tombent : » en tel pays d’Afrique nous comptons 10 % de catholiques, en tel autre d’Asie, x %, …, c’est en Amérique Latine que les meilleurs pourcentages se manifestent … »
Choc ! L’Eglise gardienne de la spiritualité est un produit de consommation… L’Eglise mesure ses parts de marché … L’Eglise mène ses opérations de marketing pour attirer ses fidèles … L’Eglise relooke son produit pour qu’ils restent en son sein. Mercantilisme ! Matérialisme ! Où est la Spiritualité que je te prêtais, grande Eglise ?
Tout se casse en moi ! J’étais venue rechercher ma foi de petite fille, le latin qui enveloppait de mystères les paroles du prêtre, les couleurs élévatrices violet, blanc, or sur le dos de l’officiant. Mots latins et couleurs se fondaient pour s’élancer dans les volutes d’encens, devenaient notes de musique, se mêlaient à la mélodie des cantiques. Tout ce que j’avais voulu garder de ces temps-là, contribuait à embellir le mystère de ma foi d’enfant, celle avec laquelle ma vision-révélation m’avait donné à renouer.
Passée au filtre de ma rébellion la conjugaison de ces évènements m’éloigne douloureusement de « Tu es cela ». Je suis en pleine dualité vie terrestre/ vie spirituelle. J’ai douloureusement mal. J’ai doublement mal. J’ai mal en couple et j’ai mal en Dieu !!! Indéniablement le choc dans notre barque m’a secouée, le complice marital a refusé mon envolée spirituelle, ses mots ont rebondi sur moi comme des insultes. Incontestablement le lieu purement spirituel que je cherchais n’est pas là. Les contingences si terre à terre de l’Eglise me dévoile ce que je ne voulais pas entendre, dans le langage audible de la messe en français, je décèle des mots usés, des mots créateurs de mes maux, les mêmes mots que ceux des hommes dominants, les mêmes mots qui ont créé mon obéissance au féminin, ma soumission de femme judéo-chrétienne, la soumission des femmes de ma lignée.
Je suis cassée dans ma soif d’élévation spirituelle. J’avais cherché refuge en l’époux, en une église que j’ai persisté à fréquenter quelques mois, mais là j’abandonne tout.
Alors, le labyrinthe de ma vie, soudain, m’emporte loin, très loin de La Lumière. Je tourne la tête vers l’arrière, je La cherche, mais je ne La vois plus. Seule ma mémoire d’Elle, de Cette Vision-Conviction si bouleversante, me porte à présent. Je suis au plus loin du centre du labyrinthe, au plus loin des eaux profondes, et je commence à paniquer. J’invective Dieu, La Lumière : »Qu’avez-vous à venir m’éclairer, si vous ne voulez de moi ? » La réponse est Trou Noir.
Jupitérienne s’affaisse. Elle est seule. Elle vient de se créer seule. Elle s’égare, à nouveau, dans l’embrouillamini de son mental en colère, elle devient sa propre mine antipersonnel, elle se fait sauter de dépit.
La vieille partie déstabilisante de son corps s’en donne à cœur joie, se réactive. Petit ego piaffe à nouveau, Mental a repris les rênes, louvoie, finasse comme jamais il ne le fît, et, dans cette guerre ouverte entre petit ego et Conscience, en ce début des années 1990, petit ego tient le haut du pavé.
J’ai perdu ma boussole. Je crains d’avoir perdu complètement ma route, et dans le même instant, je suis sûre qu’il n’en est rien, car si je reste incertaine, la part de confiance en moi s’alimente de chacun de mes moments de conscience. Ma conscience allumée avec la lecture réfléchie de « Tu es cela » a rompu le règne de Maître Mental l’Absolu . simplement, pour de longs intervalles de temps, il réussit à remettre conscience trop peu expérimentée, un peu, en veilleuse.
Trou noir et poisson noir Trois années s’écoulent, m’éloignent de ma visite à la Mandragore ! Ces années-là, si j’ai tenté de pêcher, je n’y suis point parvenue. La canne était trop lourde pour moi, et surtout manège tournait trop vite, manège tournait à me faire perdre la tête, manège tournait à me laisser égarer Conscience.
L’entrebâillement de Conscience, trop étroit, ne modifiait plus mon mode de vie. Au rythme du travail scolaire prolongé par celui de la maison, le « contre la montre » permanent redevenait ma loi. Petit ego se démenait contre la fuite du temps tandis que mental mimait les sages : « il faut que tu relises Arnaud, lui te guidera vers une vie plus cool ». La vie suivait son cours. Les évènements se multipliaient. Comment aurais-je pu consacrer à cette lecture plus d’un mini-temps résiduel dérisoire quand, au fil des jours, mille activités extérieures me happaient ?
Tourne, tourne manège !
La situation empire, la suractivité m’emporte, je me coince dans mon île mentale, je ne maîtrise plus rien, je tourbillonne … d’autant que, dans ce nouveau lycée, réplique parfaite des autres établissements scolaires dans lesquels j’avais enseigné en dehors de la Dordogne, l’homme ou la femme, qu’il soit élève, étudiant ou enseignant, ressemble étrangement à ses condisciples des autres régions de France.
Nouveau lycée offre à Mental fou d’entrer dans une aventure pédagogique totalement inconnue. L’élève disciplinée renaît en moi. Je veux réussir et je m’enclos avec mental fou dans les murs scolaires.
J’oublie Nature. Je replonge dans la vieille mare des désordres émotionnels. Je n’ai plus l’envie de me raccrocher à Nature, je ne sais plus voir Lumière.
Le défi scolaire relevé par Mental fou fait émerger les mendiants habituels de la reconnaissance des autres -dont je suis- avec leurs jeux de rôles, leurs outils sentimentaux. Ils dansent à nouveau autour de moi. Les émotions flottent dans l’air, certaines, avec la force émoussée de l’habitude, ricochent sur moi, d’autres me traversent et viennent nicher une douleur muette en mon sein.
J’écoute les prisons de mes alter egos, leur colère d’eux, leur quête de bouc émissaire, pour ne pas s’entendre, pour ne pas se comprendre, pour se fuir, et incontinent, sur une émotion indéfinie, je plonge à mon tour dans ce même jeu que je pratiquais, largement, avant que Conscience ne s’entrebâille. La situation échappe à Conscience nouvelle. Mon être est tellement hors de lui, qu’il se laisse embarquer ! Ma voix parle, les mots sortent sans retenue, se vomissent sans mesure de ma bouche, pour s’écraser sur l’autre. A son tour, en ricochet, l’autre renvoie la balle, relance la colère, l’aplatit sur moi. Pour dire stop, je fuis. Je retourne à ma solitude, trouve refuge dans ma voiture, me barricade, prends la route vers ma demeure. Le moteur couvre ma voix. Je hurle, je crie à l’injustice, à l’incompréhension, à l’ingratitude, à cette impuissance de changer moi, l’autre, la vie. Ou pire, pour dire stop, j’opte pour la solution autodestructive, me cadenasse dans un silence aussi destructeur, sinon plus puissant que les cris, monte les murs de ma prison mentale, les fonds dans mon décor afin de les oublier, quitte à ce qu’ils m’étouffent, en toute discrétion, en toute liberté.
La grande différence pour ma vie dans ce pays de l’homme, depuis ma rencontre Mandragore, est mon regard. Il sait s’abreuver de la paix de la Nature dans la forêt . si je vais la chercher. Hélas, mes rencontres avec Dame Nature, sont rencontres-éclairs enveloppées de ma culpabilité de ne pas La rejoindre plus souvent. Face à ma folie retrouvée, Dame Nature périgourdine, au diapason de Conscience nouvelle, s’est mise en retrait, sans bruit. Leur patience, à toutes deux, est immense ! Elles m’attendent ! Ces années-là, sans que manège ne se positionne face à l’océan, je pêche en plein vol ! Mon fil de canne lancé dans les airs, au cœur de trou noir, épingle un poisson noir, un vieux poisson noir de mon enfance ….
La femme en noir remonte sur la scène de ma vie . De quel coin d’enfance, le deuil vient-il à nouveau me bouleverser, m’envelopper de son suaire émotionnel ?
La femme en noir est ma collègue-complice de cette innovante formation des étudiants dans laquelle je me suis aventurée avec ou à cause d’elle. Elle remonte sur les planches de mon théâtre pour s’offrir à mon énergie de sauveur, pour répondre à ma soif d’étancher la peine de l’autre, de l’envelopper de moi.
Un habit de tristesse enceint son corps. Une écharpe de deuil, deuil de son enfant décédé, deuil impossible à faire par elle, est étroitement nouée autour de sa gorge et, en cette nouvelle année 1992, sa tenue vient se compléter d’un cache-cœur brodé aux points de sa nouvelle croix, points de tromperie, points d’abandon de son époux.
Elle est Barbara, la grande dame noire, la fascinante, l’inaccessible chanteuse de mes vingt ans.
Cette fois, ma solitude épouse intimement la sienne, puisque dame en noir et moi jouons sur la même scène. Les décors de mort sont montés. Mort de l’autre, mort de soi. Mort-araignée qui sait bâtir sa toile, savamment, amoureusement, qui la tisse autour de moi totalement volontaire et résignée !
Nous avons quitté la cour du lycée, nous nous sommes enfoncés dans le Périgord, plus à l’Est, là où la rivière glaciaire, il y a bien des siècles, a creusé son lit, a gravé dans le calcaire les mémoires de l’homme et de la femme, de nos ancêtres du pays de l’homme, a sculpté les rives, leur a donné des formes qui réjouissent les escaladeurs.
Dans le cadre d’un séminaire de formation, nous apprenons aux étudiants en BTS, la maîtrise de soi et l’attention. Douce ironie !
Un moniteur d’escalade, la dame en noir et en douleur, moi affublée de mon habit de sauveur, participons aux activités des stagiaires par l’exemple et surtout par les encouragements. Insistance dans l’instant, les jeunes m’invitent, joyeusement, à rejoindre le rocher de l’araignée. La petite dame en noir ne pleure pas, semble oublier ses peines, sourit…
Je pressens un danger. Je ne devrais pas les écouter.
Pourtant, je ferme mes oreilles à l’écoute de Moi, à l’écoute de Conscience. Je choisis le sourire de petite dame en noir. Je suis l’envie des jeunes gens. J’entre dans la toile de l’araignée.
CHAPITRE 3 : TRIPLE SAUT AVANT PLONGEE DANS L’INCONNU
Premier saut : le saut de l’araignée contre rocher
« Nous tissons notre destin, nous le tirons de nous comme l’araignée sa toile. » François Mauriac Patiente, lourde et légère, épeire, au matin de printemps, laisse trace de son travail de nuit. Nature généreuse s’offre à la tisseuse, soleil et rosée éclairent, enluminent son œuvre éphémère. Nature sait-elle qu’elle accueille la tueuse qui entoilera dans les fils aériens, dans les fils collants de son arantèle, l’insecte inconscient ?
Le manège tournique, tournicote,
tournille encore et encore …
Dans notre barque,
emportée par sa ronde,
je m’encolle dans ma toile …
Comme araignée j’ai tissé ma toile, patiemment, subtilement, et l’ai mêlée intimement à la toile de Dame en noir et à celles des étudiants. Ce jour, tout à trac, en ce coin de la Terre des Hommes, si j’intègre le groupe escalade c’est pour ne pas abandonner Dame en noir-souffrance qui n’a eu de cesse, toute l’heure de notre pause-repas, de m’implorer de l’accompagner, je caresse l’espérance, par surcroît, d’épargner par ma présence les étudiants de son chagrin dégoulinant.
En somme, une fois de plus, je viens de mordre au vieil appât de mon inséparable tisseuse-mangeuse de fillette-sauveur … et une fois de plus je plonge dans la non écoute de Moi, de ma Sagesse profonde. Mon beau mental araignée-chasseur m’a alléchée en déposant à cœur de son piège la reconnaissance des autres : « Viens ma belle ! », a-t-il chanté, « ils t’aimeront plus encore tes étudiants, tu l’apaiseras et elle t’aimera tant petite Dame en noir ! »
Ô Douce illusion offerte par mental-piégeur ! Mais prends-garde cher super-héros Spiderman, cher mental homme- araignée, tu te laisses illusionner par ta propre puissance, aveugler par ton orgueil … Prends garde car, abracadabra ! Auto-transformation ! Tu deviens ta propre proie et tel un moucheron insensé tu te pièges dans ta toile d’araignée.
Le moteur de manège s’est emballé, barque oscille, émet des bruits étranges, sa carcasse est prête à rompre … Pour ce groupe d’étudiants est, à l’ordre de cet après-midi, une descente en fil d’araignée.
En escalade, les règles du jeu, pour pratiquer ce type de descente, sont simples : il suffit d’avoir choisi un beau piton rocheux, en forme de P, un de ces pitons sculpté par la rivière de glace, pour, du haut de la boucle de ce P, bien harnaché, le baudrier en axe, le crâne casqué, le corps vide de stress, d’émotions, centré sur la seule descente, engager son rappel.
Tout d’abord, sur la boucle du P de rocher jusqu’à ce point où elle est la plus gonflée, tenir fermement la corde, poser un pied, puis l’autre pied, à petits pas, à reculons, et arrivé à ce point du piton rocheux, très impressionnant, entrer dans la zone du vide, là où le descendeur ne touche plus le rocher. Son torse en parallèle à la jambe du P de rocher, ses propres jambes en équerre, il se laisse glisser le long de la corde et il savoure son approche lente du sol. Le descendeur devient araignée suspendue à son fil, il se sent animal, il se ressent superbement libre . sauf . si la Vie lui propose une autre aventure .
Ce 21 mars 1992 à quinze heures, l’heure de ma descente est arrivée ! L’heure où mon fil d’araignée va se déjeter ! Quand personne ne parle à la novice que je suis, de mettre un casque sur sa tête nue, quand dès le deuxième ou le troisième pas, son pied ripe sur la roche et qu’en simultané, son baudrier étonné par ce mouvement, son baudrier non vérifié par le moniteur d’escalade, se vrille, l’a fait tournicoter sur un axe désaxé … les circonstances changent.
Je quitte l’axe de la descente verticale. Je découvre, et c’est logique, la projection. Et, tout naturellement, mon rocher crânien balance contre le P de rocher calcaire. C’est le matraquage allègre de P du rocher sur ma tempe droite ! C’est la double fracture crânienne réussie de mes « rocher et pariétal » droits .
Vraiment un superbe coup du sort qui, d’animal libre, me meut en bête traquée, coincée par la toile d’araignée, prisonnière de « ma » toile d’araignée.
Suspendue entre Ciel et Terre, tête en bas, dans un ultime sursaut de conscience, je lance un timide « qu’est-ce que je fais ? », j’ouïs la voix alarmée du moniteur : « ne bougez pas ! » puis, bougie en fin de course, ma conscience s’éteint, je glisse dans le monde de mon inconscience.
En bas, les étudiants, la Dame en noir entendent chanter « ploc !…ploc !… » et voient se déposer sur les feuilles mortes à leurs pieds, une à une, les gouttes de sang qui abandonnent mon oreille accidentée.
Récupérée par le moniteur et quelques étudiants, je suis déposée en douceur sur un tapis de feuilles mortes, puis entourée par tous en attente des secours. A l’invitation de dame en noir qui s’est éloignée de son chagrin et retrouve sous le choc de mon choc son esprit pratique, je récupère les clefs de ma voiture pour les lui remettre. Mes doigts s’enfoncent dans ma poche de pantalon, les trouvent et … rencontrent en ce même lieu un autre objet …
Emportés par l’habitude
manège continue de tourner,
tourne manège !
Tourne barque de moi !!!
Je le reconnais sans l’ombre d’une hésitation. C’est la croix du Christ, une croix solitaire, ma croix détachée de son chapelet. Il y a deux mois à peine, parce que sa douleur l’accapare totalement, Dame en noir a quasiment abandonné sur mes épaules la charge de l’organisation du séminaire de préparation à l’examen. Dans ces moments de stress que je laissais « elle et sa misère » générer en moi, ma main dans ma poche égrenait les grains de mon ave maria et me reliait à l’Au-delà, m’apaisait. Un soir de travail commun, une fois encore son obsession bloque redoutablement sa réflexion, et petite Dame en noir ne peut se concentrer sur notre travail. Elle, l’athée invétérée, enserrée dans son si envahissant cache-cœur brodé aux points d’abandon de son époux, au profond de sa détresse, m’avoue ne plus savoir à quoi se raccrocher, regrette de n’avoir point la foi, de ne pouvoir s’apaiser en égrenant un chapelet.
Que fait une sauveuse noyée dans sa folie de sauveuse ? Que fait un mental qui se prend pour le sauveur ? Il invite petit moi à se défaire de son propre chapelet qui glissait, en cet instant précis, sous ses doigts, le délie de sa croix, symbole religieux qu’ego ressent inutile pour Dame en noir, et l’offre à la demanderesse.
Sauveuse a gardé la croix, la croix christique, la croix de Sauveur en consonance parfaite avec son jeu de rôle sur la présente scène de sa vie.
Voit-on jamais combien nos actes sont en concordance avec nos pensées, combien justement ils traduisent en gestes nos mots ? Détacher la croix de son chapelet c’était détacher ego-sauveur de sa reliance au Ciel, de son contact avec mon Moi-Sage. Je l’ écartais un peu plus de la Lumière, je l’accrochais avec plus de hargne que jamais au seul symbole du sacrifice de Christ sur la croix. Par ce contact devenu exclusif avec la Croix ego-araignée validait son rôle abusif, son rôle bouffeur de moi-même, son rôle de sauveuse qui perd toute conscience et particulièrement celle de sa polarisation abusive sur Dame en noir.
Car j’ai atteint le point d’oubli des autres, de mes proches, de mon foyer. Je vis le noir, le triste, le misérable et je m’arrache de toutes joies dans ma Vie. Croix en permanence dans ma poche, sur un simple toucher me donne l’illusion d’un apaisement, trompe mes sens en me confortant dans mes choix quand je me noie en eux. Ma toile d’araignée-mental-petit ego m’enserre de plus en plus.
Notre barque s’est craquelée
un jour de non-reconnaissance
de l’époux,
notre barque se craquèle à nouveau,
par ma quête, re-quête
de cette reconnaissance de l’autre …
Assise au milieu des feuilles mortes, à demi-morte moi-même, à ce contact charnel avec Croix je m’électrise. Petit ego ballade sur la toile. Il s’englue : je ne peux garder Croix, que va-t-on en faire à l’hôpital ? Que va-t-on penser de moi ? Et s’ils la remettent à l’époux ? Le nœud est là, ma cicatrice saigne toujours, le courant réveilleur qui vient de me traverser en plein trauma est celui de ce non-accueil de ma révélation divine par l’époux.
Quête obsessionnelle de l’assentiment des autres tu invites ego à tisser plus finement sa toile protectrice contre leur regard critique. Mental endolori t’entend, il tisse encore, il a trouvé la réponse-solution au problème de l’instant. Subrepticement, les étudiants ne sauraient la voir, je confie ma Croix, à la possesseur du chapelet, à charge pour elle de me la restituer dès la fin de mon séjour hospitalier. Elle la prend.
Je peux à présent laisser aller le temps. Je suis libre de tout ce passé, de ce présent. Je ne pense plus. Je reste assise là, comme apaisée. Le SAMU arrive. A la demande d’un des sauveteurs, je récite, sans l’ombre d’une hésitation, tous les chiffres de mon numéro de sécurité sociale. Ils m’installent dans la civière gonflable. Battante réapparaît un court instant, ose prétendre à l’inutilité de ce transport, affirme qu’elle peut marcher. Ils ne l’écoutent pas …
Durant la traversée des bois, je renoue avec le néant.
Sur la route qui mène à hôpital, un bref moment de réveil ! Je me vois couchée sur le brancard. Je vois à mes côtés, deux hommes, un vêtu de blanc, l’autre portant tenue de pompier. Je sais être dans un véhicule qui nous transporte vers … Je ne sais où. De toute façon je ne sais qui on est, moi incluse, je suis un corps, ils sont des corps, mais non identifiables par mon cerveau. J’interroge « QUI EST-ON ? ». Je n’entends pas la réponse, ma plongée dans trou noir commence. Je ne comprends pas où je suis, je ne comprends rien à nos êtres, j’ai quitté le film de ma vie. Car …
Deuxième saut : le sursaut de fin de course
… mon super saut de l’araignée n’est rien venu m’offrir d’autre que de « changer le film de ma vie ! », de ne plus me laisser emporter par le rythme du manège, de rouvrir Conscience ?
Durant cinq jours j’ai plongé dans le coma, rappelée à l’éveil régulièrement par le personnel soignant. La seule image vivante de ce passage dans ce service des soins intensifs est le lit à barreaux qui me contient …
Les jours suivants, en observation dans une chambre du service des « traumas », je me rappelle les visites d’un époux inquiet, de celles de Dame en noir qui veut restituer la croix, que j’invite à patienter, ce n’est toujours pas le lieu … et puis … je retourne à la maison.
La convalescence corvée commence. Je tourne en rond deux mois. Mental tourne avec moi et je ne sais l’arrêter. Il s’inquiète de mon absence pour les étudiants. Que vont-ils faire sans mes cours, sans mes conseils alors que la date de leur examen approche ? Il s’obsède pour Dame en noir. Qui lui donne réplique sur la scène du lycée ? Comment agit-elle sans ma « protection » ?
Les cimetières sont remplis de gens irremplaçables. Ah petit ego ! Toi, miraculeusement vivant, tu rêves d’être irremplaçable ! A cette fin, en dépit des conseils du corps médical, tu me fais quitter le repos. Quatre mois de plus eussent été souhaitables. Qu’importe l’artiste en toi manque de public, tu veux remonter sur les planches, reprendre ce que tu crois tes rôles de soutien professionnel pour les uns, de consolatrice pour l’autre.
Le retour dans le lycée est énergiquement ardu et émotionnellement ravageur. Par ton choix, ego, tu dépenses mes réserves d’énergie sans compter, tu m’engloutis à nouveau dans la suractivité pour oublier la vie de misère, d’abandon des autres, qu’est devenu le décor de notre scène de vie. Mon corps te suit, de plus en plus laborieusement et les scories physiques du traumatisme crânien s’amalgament aux scories émotionnelles de toi, ego-sauveur.
Ah Petit-ego ! Combien tu traînes savates pour changer notre façon de vivre ? Par tes refus obstinés d’entrer dans l’inconnu, tu t’agrippes au connu, tu te complais dans nos vieux comportements. Ce que tu sais faire ne t’effraie pas, au contraire tu t’évertues à tout mettre en œuvre pour échapper aux trop effrayantes nouveautés, même si ton choix génère mille souffrances. Comme pierre qui roule n’amasse pas mousse, sur la pente qui t’emporte depuis l’accident, mental-ego, tu dévales. Où et quand pourras-tu t’arrêter ? Combien as-tu coupé de points d’accroche de ta toile ? En as-tu détaché un ? Aucun ?
Troisième saut : le saut du lâcher-prise
L’examen de juin déroulé, sans divagation supplémentaire de notre équipe pédagogique, Dame en noir et moi-même ouvrons nos esprits à la nouvelle rentrée de septembre. Nous absorbons une partie de nos vacances estivales à la préparation du séminaire d’accueil de la troisième promotion des BTS Force de Vente. Nous recevrons les nouveaux étudiants dans le centre de loisirs de Rouffignac implanté dans cette commune du Nord-est du pays de l’Homme dont le nom m’interpelle quant à son lien avec le contexte de notre vie actuelle : « Angoisse » !!!
La paresse aujourd’hui s’allie à la tristesse chez Dame en noir pour me laisser porter bien plus que la demi-charge de travail que je devrais assumer. Elle aurait tort de ne pas profiter de la jupitérienne débridée, toujours en train de puiser inconsidérément dans ses réserves énergétiques. Ego s’emballe, et surtout ne résiste pas à l’attrait des marques de reconnaissance qui affluent de toutes parts. Des bouquets de fleurs jonchent la scène : gerbes de fleurs d’admiration pour son courage, sa pugnacité, plantes grasses pour son sens de l’organisation, son attention aux besoins des étudiants …
Ma petite fille intérieure, une ixième fois, est en train de quêter la reconnaissance maternelle. En jouant la virago, recherchée en moi par la Dame en noir pour notre duo professionnel, et, depuis toujours, admirée en moi par ma génitrice trop mal-battante, je me déséquilibre, je nie mes qualités profondes au profit de celles attendues par l’autre en moi, par l’autre qui, à travers moi, réalisera peut-être (?) sa propre quête.
Douceur et féminité, notes caresses n’adoucissent jamais mon bouquet. C’est à virago qui s’évertue sur scène que le public : administration, collègues, étudiants, lance ses fleurs. Tout ce qui représente la féminité dans notre équipée est absorbé par Dame en noir. Insidieusement, cet état de fait crée en moi des zones de colère, un besoin de tout bouffer pour que meure ego et son ambition irrespectueuse de mon Être profond. Hélas, araignée-mental ne sait M’entendre et me stresse en démesure, trame mieux encore ma toile protectrice pour M’occulter, rend son tissage de plus en plus subtil, de plus en plus illusion, de plus en plus folie. Ne vois-tu pas que toile ne pourra se déployer longtemps, que toile finira par casser ?
Une nouvelle barque
une barque post-accident
reçoit notre couple marital.
Est-elle de métal ou de bois ?
J’ai tenu jusqu’à la période de Toussaint. Cette fois, la fatigue a pris le pas sur mon dynamisme. Une heure de cours m’épuise, m’oblige à une pause. Je me réfugie dans les toilettes, là où personne ne saurait me déranger. J’invoque le Ciel pour retrouver quelques forces, puis je reprends les rênes, une heure. Jusqu’à ce que fatigue et acouphènes grinçants de plus en plus bruyamment dans mon oreille droite, aient raison de moi.
Je rends les armes.
J’entends, enfin, les conseils qui me mènent vers une médecine inconnue de moi, une médecine dite parallèle. Loin de l’allopathe habituel que je fréquente, c’est un homéopathe énergéticien que je rencontre. L’effort que je fournis là en plongeant dans son monde inconnu de moi, en me confiant à lui, accroît mon espérance de guérison.
Raté ! Il ne peut rien faire !
La déception est d’autant plus lourde qu’il m’invite à faire une seconde démarche aussi aventureuse que celle-ci dans son monde de l’autre médecine. Pour débloquer les os de mon crâne qui obture toute entrée d’énergie depuis l’accident, pour permettre à l’énergie de réinvestir mon corps, il me parle de contact avec un ostéopathe. Le mot est aussi flou que celui d’ésotérisme prononcé par le libraire de la Mandragore en 1988.
La fin de la visite est leçon pour ego. Ma demande d’une prise de rendez-vous par son intermédiaire butte sur un « non » sec. Que je prenne le rendez-vous moi-même, si je désire le prendre ! Petit ego apprend à quitter sa passivité, sa croyance en l’autre guérisseur que je regarderai agir sur mon corps sans participer à la guérison. Il apprend l’ouverture au soi guérisseur de lui-même. Plutôt désarçonnée par la fin de la rencontre, les coordonnées de l’ostéopathe en poche, j’entre à la maison et … j’ose prendre le rendez-vous.
Neuf mois, le temps d’une gestation se sont écoulés depuis le choc des rochers quand je rencontre Gérard, l’ostéopathe.
Une séance lui suffit pour réanimer mon énergie par sa manipulation adroite des os de mon crâne. Je garde vivant le souvenir de ma jouissance sur sa table de travail. Via le jeu juste de ses doigts sur ma boîte crânienne, l’énergie a réinvesti mon corps, et de ma bouche est sorti, en suivant le rythme entrant de l’énergie, le son de ma voix : « Merci ! Merci ! Merci ! .. ». J’ai stoppé la prise des quinze cachets quotidiens, j’ai quitté les maux de tête, la fatigue.
De ce jour, je milite pour la reconnaissance officielle de l’ostéopathie, pour que soit le bien-être énergétique des traumatisés hors de l’esclavage médicamenteux.
Energie ! Ô Energie que je ne vois pas mais que je commence à ressentir !!! Barque est en train de balancer entre sortie de manège et entrée en « U ».
Oscillation !!!
Gérard a libéré l’énergie bloquée aux bords de mon crâne, mais je m’interroge sur la durée de la « réparation ». En réponse à mon inquiétude : « Les os de mon crâne ne vont-ils pas se recoller ? » Gérard ironise doucement : »Pourquoi voulez-vous que cela se produise ? … A moins que vous ne vous offriez un nouveau saut de l’araignée ! » Mes os du crâne sont en position alignée, ils favorisent à présent l’énergétisation de mon Être. Je n’ai point besoin de revenir pour lui. Par contre, si je le veux, Gérard m’invite à une nouvelle séance pour rééquilibrer ma colonne vertébrale perturbée, côté coccyx, sans doute par un choc d’enfance.
Un choc d’enfance ? Ô la belle chute de la planche-balançoire en 1956, cette année de déménagement familial, de changement d’école, de changement d’église ! Dans la nouvelle commune rigueur et tristesse prennent le pas sur la Joie et l’Amour que diffusait la jeune Nonne formatrice de ma première année de catéchisme. Brutalement, l’image qu’elle tissait sur ma toile d’un Christ Amour, rencontre via un curé juge de mes actes, son regard peu compatissant sur moi, sur les autres, son obsessionnelle quête de perfectionnisme et d’effacement de moi, un mur. De ce jour, coccyx désaxé a-t-il favorisé l’hyper salivation d’araignée-mental pour l’amener à tisser sa toile autour de moi ? Qui le sait ?
Deux autres séances de travail sur mes énergies permettent à Gérard de relancer mon corps vers une route plus harmonique. J’avance, à petits pas, vers plus de cohérence avec Moi.
C’est ainsi qu’en fin de la troisième séance, j’explique mon premier réveil.
Petit ego, toujours prêt à éviter une révolution émotionnelle mais désarçonné après le travail énergétique qu’il vient de recevoir, a perdu de sa superbe. Quand je rencontre le teaser publicitaire du stage «travail sur les émotions » posé sur le bureau de Gérard, sous le nez de tout patient qui désire le voir, depuis le premier rendez-vous, petit ego m’a laissé le champ libre.
Barque cesse de balancer !
Plof !
Elle s’engage, clairement,
dans le« U » …
Comment ai-je su m’inscrire dans ce stage ?
Comment ai-je su dire « oui » avant obtention d’un quelconque accord de mon époux ?
Certes, la voix de la Vie a dominé celle de petit ego.
Certes, la Puissance de la Vie a animé mon audace, m’a rendue capable de franchir la frontière de mon éducation, la frontière de ma peur de passer outre un assentiment préalable de mon homme. Mais, avant tout, le retour miraculeux de l’énergie en moi, lié à cet homme, a ouvert la porte de ma confiance.
Alors, si cet homme a pu casser, pour cette inscription, le pouvoir de petit ego, ne serait-il pas capable de plus ? Pourquoi ne pourrait-il me libérer de mes émotions encollées dans la toile d’ego et si destructrices de moi reliée à Moi ?
Si vous pouvez regarder dans le miroir de la relation exactement comme vous le faites dans un miroir ordinaire, alors la connaissance de soi est sans fin. C’est comme pénétrer dans un océan insondable et sans rivages. Or nous voulons pour la plupart arriver à une fin, nous voulons être à même de dire : « Je suis parvenu à la connaissance de moi et je suis heureux ». Mais les choses sont loin de se passer ainsi. Si vous pouvez regarder sans condamner ce que vous voyez, sans vous comparer à autrui, sans souhaiter être plus beau ou plus vertueux, si vous pouvez simplement observer ce que vous êtes et poursuivre votre chemin, vous découvrirez qu’il est possible d’aller infiniment loin. Alors le voyage est sans fin et là est tout le mystère, toute la beauté de la chose.
Krishnamurti – Le sens du bonheur –
p.55 -Stock – Points – Sagesses
CHAPITRE 4 : LA PORTE EN BARQUE
Les structures du vieux porte-avions s’effacent … Seule existe barque dans laquelle je suis … embarquée, … en barque est … moi, … en barque … émoi
Détecter, intellectuellement, l’origine de mon mal-être ne m’en a pas libérée. En répondant positivement à l’invitation de Gérard, je choisis d’être guidée. Je ne sais comment se fait son accompagnement, les mots -travail psychocorporel, dynamique de groupe- n’ont pas de chair pour moi. N’en déplaise le résultat est là, mes résistances au changement vont rencontrer le lâcher-prise, mon intelligence émotionnelle va se réveiller, m’emmener, à tâtons, à être moi, à changer mon regard sur les autres, et pour conclure à amorcer ce chemin nouveau où l’on perd l’habitude de se dénaturer dans sa relation aux autres …
La barque positionnée,
à présent,
à l’entrée de « U »,
même si elle oscille encore
entre tournicotis de manège
et rail de « U »,
change de nature …
Dans ce carrefour du grand porte-avions porte-rêves illusoires, barque a changé de matière, offre un nouveau contact à mon corps qui polarise mon attention, exige ma prise de conscience de moi, me dépolarise de toutes structures extérieures. Mon état de conscience ouvert à ce nouveau composant qui charpente barque, me donne à ressentir la chaleur d’un bois en contraste frappant avec le froid métal des barques sur manège. Là, je vis ma peau, je suis mise à nue, si profondément en contact avec mon corps que je peux sentir, voir et reconnaître dans le couple embarqué : moi.
Car, je suis ce couple.
Je suis ces deux parts de mon Être : masculin et féminin, yang et yin. Je suis ce couple et, en simultané, je suis ses multiples reflets nés des miroirs qui l’enceignent. Mon plus proche miroir s’éclaire au quotidien depuis plus de deux décennies. Cet écho de moi puissant dans la ronde de manège, a laissé le reflet de l’époux qu’il m’offrait, occulter la réalité de mon yang, prendre sa place dans la barque et me laisser nier cette part de mon Être. Le miroir marital n’est pas le seul à masquer mon identité, bien d’autres s’agrègent à lui que je laisse m’illusionner. Par le jeu de leurs reflets, ils dessinent ma route.
Le plus récent, miroir de mon couple professionnel avec dame en noir, fortement présent ces derniers mois de ma vie sur manège, a tellement détourné mon attention de moi qu’il m’a acheminée jusqu’à ce stage. C’est ici que j’ouvre mes yeux, que je démasque les reflets du plus discret, du plus prégnant d’entre eux et que je me rassure aussi car je découvre n’être pas la seule en quête incessante de l’énergie maternelle, de ses bras, de son regard et de SA RECONNAISSANCE, que je ne suis pas la seule à m’être égarée dans tous ces manques affectifs générés par la sortie de l’antre maternel. Toute ma vie tourne autour de ce miroir-fond d’écran, miroir de mes « parents- mère ET père – biologiques ». Il est incrusté en moi et ses reflets colorient « tout » dans ma vie du poids lourd de l’ éducation, de la culture qu’ils m’ont imposées. Je l’ai vu, je le vois !
Si j’ajoute que ma rencontre avec le véritable habitant de ma barque a été durant ce stage, bien au-delà de la seule dimension terrestre, que je me suis envolée hors de l’espace limité de terre de Dordogne, hors du temps limité de ma présente vie en cette terre-ci, j’accrédite totalement l’idée de …
La force de ce stage …
Pour ce stage inoubliable, Dordogne m’accueille une nouvelle fois dans un de ses plus beaux décors, un lieu arboré autour d’un vieux manoir planté sur un pic rocheux qui domine la vallée.
La beauté des lieux ne suffit pas à effacer le stress. Il campe là, à cœur de moi et se nourrit indéniablement de ma prémonition du tourbillon irrésistible qui, au bout de ce séjour, va m’emporter, définitivement, loin de manège.
Gérard qui enregistre les entrées. Je suis joyeuse de le voir. Mais son salut neutre, son absence de mot de reconnaissance de nos rencontres en cabinet sont cailloux de déception qui s’agglomèrent à mon stress. Stress monte d’un cran !!!
Un peu déséquilibrée, je continue mon installation dans le manoir et vais chercher la literie. Point de chambre individuelle ! Que des chambres à plusieurs ! Aucun isolement possible !
Stress continue son ascension.
Je n’aime pas cela même si, dans ma déconvenue, un zeste de lumière est : je suis la seule à désirer le lit en coin, trop isolé pour les autres occupantes de la chambrée plus amoureuses que moi de la vie de groupe …
Dehors, à présent, le soleil se glisse dans ses quartiers de nuit, les stagiaires, en attente de la première rencontre avec les animateurs, échangent des propos sur leurs activités, sur leurs origines géographiques, puis la conversation des filles et des, plus rares, gars présents, se tourne sur leurs connaissances ésotériques, leurs expériences d’autres stages de ce type. J’entends des mots qui m’impressionnent, des marches sur des tessons ardents, je ressens entre eux des complicités que leurs connaissances créent … j’entre dans ma frayeur, non de la folie de leurs expériences mais de mon ignorance. Je suis nulle. Je suis imparfaite . je suis l’imparfaite sur leur mer de savoir, en pleine coulée. Stress a atteint ses sommets lorsque le stage démarre.
Je m’amuse, aujourd’hui, à mémoriser mon parcours autour de la pièce de travail. Au fur et à mesure des rencontres, j’ai fait glisser ma place de la droite du « Père », alias les animateurs, progressivement, de séance en séance, jusqu’au fond de la salle, puis j’ai entrepris la remontée sur l’aile gauche pour atteindre, finalement, la place opposée à celle du départ. J’ai cheminé d’un point de ma dépendance de leur connaissance, de mon obéissance de petite fille, à mon point d’opposition au groupe des animateurs, en milieu de stage, parce que, vraiment, ils orchestraient mes rencontres avec moi-même de manière trop, de manière très, de manière intensément houleuse !
Ma position finale figure ma compréhension de la pertinence de leurs propositions et mon émancipation de leur reconnaissance d’animateurs !
Evoquer le déroulement parfait des phases du séminaire, sans prise de notes gardées, m’est impossible. Mais l’essentiel n’est point là, il est dans ces chantiers émotionnels sur lesquels mon regard a été amené à se poser, ces chantiers sont restés gravés en moi …
L’ouverture des chantiers …
Premier chantier : mon habit de sauveur-coupable-victime
Le groupe des stagiaires est en attente du choix de celle qui tourne autour de la pièce pour élire l’un d’entre nous dont des qualités l’attraient. Assise sur l’aile droite, en ce début de séminaire, mon unique souhait est de ne pas entrer dans ce jeu, je n’aime pas l’idée même de cette élection. Bien évidemment, je suis la première visée.
Aussi discrète et pudique soit mon électrice, je ressens ses mots énonçant mes qualités de courage, de dynamisme, et je ne sais quoi encore, se déverser sur moi comme une douche froide. Je n’ai pas droit de les accepter. Ce flot de compliments m’est interdit. Je dois l’arrêter dans sa folie admirative. Je dois me distancer d’elle. Mon corps se raidit, adopte l’attitude de rejet. Je pose ma main sur son épaule et crée entre elle et moi la distance de mon bras tendu. Je casse son élan d’enthousiasme.
Séquelles d’une éducation reçue à l’école comme à la maison, cette réserve, cette non acceptation des compliments est, au quotidien, ma manière d’être. Dans ma jeunesse, se réjouir de compliments, voire simplement les recevoir, n’était pas de bon ton. Telle attitude était trop égoïste et conduisait, aux yeux des adultes qui m’entouraient, à trop valoriser la fillette que j’étais, risquait de développer son orgueil, et surtout d’humilier les autres autour d’elle dépourvus de tels atouts.
L’auditoire, dans cette salle où je ne fais qu’obéir aux ordres de ma jeunesse, ne voit pas mon sacrifice. Dans son ensemble, il polarise sur mon rejet de celle qui m’offrait son super bouquet de fleurs. Elle devient ma victime, là où je jouais la « sauveur » de l’auditoire.
Naturellement, quand vint l’heure du choix de celle dont on refuse des attitudes qui nous paraissent réprouvables, moi qui venais de casser un élan de don, de repousser l’autre, je suis une nouvelle fois élue. Mais, cette fois, mon accueil des mots émis par l’autre change.
Je ne mets aucune distance entre elle et moi sinon celle, réduite, qu’elle a adopté. Je reste immobile, résignée. Je la laisse déverser son flot d’insultes, de rabaissements de moi. Je l’écoute.
Cet autre pendant de mon éducation – celui où le négatif l’emporte sur le positif, où l’insulte au quotidien est à recevoir sans mot dire, ni maudire, de quelqu’adulte qui soit … – ressort par tous les pores de mon corps. Accepter sans mettre de distance entre elle et moi, sans prononcer un mot, le déferlement de négatifs que ma nouvelle électrice jette sur moi, étonne, et surtout, détonne par rapport à mon accueil précédent. Mon attitude marque l’auditoire au point de casser les élans d’autres accusateurs qui s’apprêtaient eux aussi, juste avant ce face à face, à m’élire. Je suis très secouée, mais cette mise en vedette de mes comportements sociaux ouvre mes yeux. Je sens bien que j’ai à apporter des correctifs à mon regard sur moi, que j’ai à quitter mes vieux habits de sauveur, de coupable, de victime, qu’il est temps d’en finir avec le mal donner, le trop donner pour être sauveur, qu’il est temps d’arrêter de me sentir coupable de trop de dynamisme, de trop de vivacité, qu’il est temps de changer ma manière de recevoir compliments et insultes.
Ce chantier du « Donner, Recevoir » lancé dès cet instant de stage a duré longtemps … très longtemps.
Second chantier : mon blindage sociétal
Le nouveau travail proposé par les animateurs, parle de pression émotionnelle, de celle qui vibre en nous mais que nous ne savons définir, de cette référence de vie qui bloque notre route, qui fait pression sur nos actes, pression qualifiée par l’animatrice de mon sous-groupe, de « pression-cocotte-minute ». Nous devons reconnaître cette référence de vie puis la lâcher, c’est-à-dire lui dire « adieu » parce que, à présent reconnue, sa mission s’achève.
Force du son et de la musique sur mon corps énergétique, attire en moi la vision d’un tableau à la Monet.
« Comme sur la peinture du grand impressionniste, je vois une belle dame, vêtements et gants de dentelle, ombrelle protectrice, finesse et noblesse, avancer dans un champ de blé colorié de coquelicots. La différence avec l’œuvre originale de Monet est le sens de la marche de mon élégante. Elle remonte le champ à contretemps, à contrecourant. Dans ce beau rêve, je me plais à suivre son déplacement. Je suis bonheur, je me sens en paix avec la belle dame ».
Quand l’animatrice nous invite à laisser partir notre personnage, je n’en ai nul désir, pis, il m’est impossible de lui dire adieu. Je ne peux pas … L’obéissante en moi contrevient à la demande de l’animatrice et s’en désespère.
Qui est donc cette femme pour tant me retenir ? Les souvenirs remontent ! Quand vers mes dix ans, jour de grosse bêtise, ma grand-mère, car c’est elle que je viens de rencontrer, m’a évité la correction paternelle, en s’opposant à son fils, elle m’a fait découvrir, en un même instant, un modèle de femme solide et le regard admiratif de ma mère pour son pouvoir sur son époux, sur mon père. Je suis certaine que ma décision fut prise ce jour-là de recopier son modèle blindage public de maîtresse femme.
De cette grand-mère paysanne, terrienne, guère préoccupée par l’apparence, loin des atours de la noble dame de la peinture, j’ai hérité mes outils d’autorité : colères, voix énergique, jambes solides, allure bien campée, j’en ai forcé les traits depuis ce jour de mes dix ans en imitant encore plus sa puissante personnalité, son indépendance financière. Et là, je ne peux abandonner la belle dame. Ma virago embellie, ennoblie, est devenue ma couverture professionnelle. Si j’ôte de moi ce bel habit sociétal, je me désosse, je deviens chair molle, mangeable par quiconque passe à mes côtés, étudiant ou collègue, proviseur ou époux . et mère … J’ai créé virago solution unique pour recevoir à mon tour de ma génitrice ce regard admiratif, pour me rapprocher de ma fusion perdue avec elle !!! Je l’ai tant embellie, la douceur de la peinture de Monet en témoigne, que je m’agrippe à cette illusion. Comment pourrais-je m’en défaire tant que me fascine la beauté de la femme à l’ombrelle du tableau « impressionniste », tant que je crois ne pouvoir vivre sans sa protection dans le monde agressif qui m’entoure.
Je refoulerai ce chantier au fond de moi pendant plusieurs années … et c’est cette perspective qui a désespéré l’obéissante en moi contrevenant à la demande d’abandon de la femme à l’ombrelle.
Troisième chantier : veille sur le feu de l’âtre
Devenir consciente des prisons mentales des autres, voir « la paille dans l’œil du voisin » est chose facile, mais reconnaître « la poutre dans le sien » est travail bien particulier ! Le rêve éveillé, que guidance des animateurs, force du son et de la musique sur mon corps énergétique offrent à ma conscience, fait surgir les foyers de deux cheminées et des poutres énormes.
«Les deux cheminées de briques rouges, absolument identiques, sont plantées dans l’air, à hauteur de mes yeux. La première, la plus à droite, est censé répandre sa chaleur dans mon logis mais elle est si lourdement alimentée par des bûches de taille gigantesque, que sa flamme est à demi étouffée. Il m’est demandé de retirer les morceaux de bois étouffeurs pour permettre aux bûches normales de brûler librement. Comme ces bûches, aussi grosses que des traverses de SNCF, sont déjà atteintes par le feu, je dois les déposer dans l’âtre de la seconde cheminée plantée plus haut, dans l’air ou dans le ciel, sur mon latéral gauche ? En ce lieu, elles pourront se réduire en cendres. »
Je suis affolée par la gigantosité des bûches-traverses de chemin de fer. Dans le contexte de ce stage où elles m’apparaissent je n’ai aucune difficulté à deviner leur nature. Elles sont coutumes, habitudes, règles, principes avec lesquels je vis, que je me laisse imposer par la société, par les autres, auxquels j’obéis pour gagner ma sécurité et leur reconnaissance. Je vois ces poutres si pesantes ! Jamais je n’avais évalué leur poids ! Et je les visualise soudain dans ce couple de la barque, je vois l’énorme poutre d’obéissance abusive au mari… Je me vide de moi ! Je ne m’interroge pas sur le sens des cheminées mais je m’inquiète de mon courage. Aurais-je jamais la force d’opérer ce transfert de cheminée à cheminée ? Aurais-je jamais le courage de divorcer … car pour l’ôter, à cœur de moi, quelle autre solution que le divorce peut exister ?
En fin de rêve, l’émotion jusqu’aux pleurs m’envahit. Le moment est venu, cérémonieusement, de nous engager à mener l’action qui solutionnera le problème vital révélé. J’ai écrit, sur papier, mon adieu aux grosses poutres, à ces parts de moi que j’allais quitter, j’ai accepté le divorce d’avec l’époux. Puis, solennellement, j’ai brûlé ce papier. Je respecterai ma parole écrite, je ferai le deuil de ces poutres et ma route sera dégagée, et le feu flamboiera librement dans mon foyer … et je pleure de devoir divorcer …
Jusqu’à ce que je me penche sur la signification du mot, le chagrin dominera. Quand je me suis éloignée de la peur, de la réalité sociétale du divorce pour entendre Sa Vérité, j’ai vu le divorce comme séparation. Je divorce équivaut à me séparer de la part de moi qui n’a plus de sens, qui brime mes actes. Qui dans le couple de la barque m’empêche d’agir ? Il est temps de changer mon regard, de prendre conscience que celui qui barre ma route n’est point l’autre mais la part en moi que je lui réserve et qui seule m’opprime.
De ce moment, j’ai su détecter mes poutres SNCF aussi clairement que j’ai su jusqu’alors voir les pailles dans l’œil de mes voisins, avec leur colère d’eux, leur fuite d’eux-mêmes. Je les ai répertoriées dans mon passé, je les ai observées dans mon quotidien présent, j’ai veillé à les mouvementer de cheminée à cheminée.
Ma conscience en éveil, elles sont devenues étonnamment visibles, notamment dans ces moments où mon être s’est retrouvé hors de lui, parce qu’étouffé par de très vieilles poutres qui refaisaient surface. C’est au quotidien, dans le couple marital en tout premier lieu, que j’ai divorcé de mes poutres. Puis par ondes dans tous les domaines de ma Vie, je vous ai ôtées poutres SNCF, je vous ai, à l’aide de prières, de méditations, d’invocations, mouvementées jusque dans la seconde cheminée, là-haut à gauche, dans le Ciel où elles se sont consumées lentement mais sûrement.
Pour mener ma tâche à bien, forcing dont j’usais tant a perdu peu à peu son utilité, est devenu lui-même vieille poutre à déplacer vers l’autre cheminée. Vérité, authenticité, douceur, féminin en moi ont pris son relai, graduellement, pour que flamboie le feu dans l’âtre de mon foyer.
Cette fin août 1993, en conscience, a commencé mon travail au plus près de mes racines de femme. Dans mon parcours émotionnel, les animateurs ont éclairé les pierres, ont commencé à tirer des tiroirs de mon ombre. Dès la sortie du stage, je savais les chantiers devant moi. Il ne me restait plus qu’à retrousser mes manches et … si je gardais confiance … à réussir l’entreprise …
J’ai gardé confiance, parce qu’en ce domaine aussi, la force du stage a joué, puisque avant que je ne parte, stage m’a menée jusqu’…
…à la nouvelle connexion avec Moi
Durant ce stage où tout me dépassait, où rien ne m’effrayait, j’ai pu aller chercher dans mon cerveau toutes les circonstances de ma naissance et les séquelles psychologiques qu’elle a pu laisser. Il a suffi aux animateurs de m’inviter, en même temps que les autres stagiaires, dans un nouveau travail du groupe, à aller les chercher à la mode de Stanislas Grof et de sa respiration holotropique. Du vécu de cet exercice reste gravé en moi, le final, l’expansion de ma conscience au-delà de l’espace-temps qui m’a donné à vivre à travers un « voyage » une rencontre avec un esprit animal de » pouvoir « , un « esprit guide ». C’était notre première rencontre, les années qui ont suivi, régulièrement, Il est réapparu dans des moments-clé et à chaque fois Il m’a procuré un sentiment profond d’unité avec ma vie.
Néanmoins, je m’étonne encore à l’écriture, de ma non-peur du vécu de ce moment de stage.
Dès Sa venue dans mon champ de conscience, dans ce champ de ma vision intérieure, j’ai suivi cet étranger, j’insiste sur le sens de ce mot « étranger » en tant qu’être très étrange, puisqu’il s’agissait d’un oiseau royal que je n’avais point jamais rencontré. Aigle a donc débarqué dans mes pensées tel un guide de Carroll Lewis pour lequel, curieusement, Alice-moi a immédiatement ressenti un sentiment de Confiance allié à la Certitude de le connaître depuis toujours.
Dès Son appel muet, je ne me pose aucune question. Ma Confiance est Totale. Non-étonnée par notre rencontre, tout de go, j’accepte de lui emboîter le vol .
Et je m’envole avec lui dans un voyage méditatif, hors du temps, hors de la vie quotidienne, un voyage durant lequel seul le fait de voler se vit et reste, à jamais, gravé en la mémoire.
J’ai volé derrière Aigle.
J’appelle cela : voler. Pourtant, en un rêve éveillé, corps ou pas corps, tu ne fais rien avec ton corps physique. Dans tes pensées, tu sais seulement que tu voles, que défile le paysage en dessous toi, de part et d’autre de toi, que tu planes, qu’allongée dans les airs Cela vole à travers toi.
Nous avons volé très haut, nous avons volé très loin, nous avons volé au-dessus des plus hautes cimes, toujours plus haut, par-dessus les pics des Alpes, par-dessus les sommets de l’Himalaya, paysages grandioses, féérie des lieux, puis nous sommes parvenus au summum du Tout. Là, qu’avons-nous rencontré ?
RIEN … R-I-E-N !
Aigle, pour notre première rencontre en conscience de moi, nous a arrêtés sur RIEN. Les vues superbes étaient finies, les paysages ne défilaient plus. Le film semblait cassé et des pixels blancs s’agitaient sur le fond gris de mon écran intérieur. Je vivais une panne de mon poste de vision, un poste comparable, en cet instant, au vieux poste de télévision en noir et blanc de ma jeunesse. En ces temps-là, je me désespérais de devoir regarder danser les pixels en attendant la recréation d’une image, je m’exaspérais de cette rupture de retransmission de mon émission préférée. Ici, après ce merveilleux, cet inattendu voyage, je suis silencieuse, tranquille. La rupture d’image ne génère en moi aucune déception ! Face à la panne du poste de ma vision j’accepte que Cela s’arrête, je donne libre champ à Ce qui veut venir.
Et Cela vient ! Ô Acceptation créatrice de merveilles, après ce long, ce lent silence qui nous a accompagnés tout au long de notre voyage, tu laisses naître le Son.
Le Son monte,
le Son s’amplifie,
le Son atteint mes oreilles de plus en plus clairement,
le Son vibre jusqu’en mon cœur,
le Son est
Voix d’Anges !
Chorale d’Anges !
Unisson de leur voix pour créer Symphonie !
Je Te connais Symphonie, je t’ai déjà interprétée, ici-même, dans cette chorale. Et là, en cette fin de vol, en cette fin de paysage, je sais ton Son primordial.
Comme épi est en grain, Son était en Silence. Ma voix retrouvait sa voie, ma voix se mêlait à celles des Anges, ma voix à leur diapason, sans effort était voix d’Ange. Je chantais, je m’entendais chanter.
EUPHONIE !
Le temps de ces chants angéliques, de mon chant si pur, si parfait, le temps pour mon cœur, ma gorge de s’éclater d’ivresse d’Être, Aigle a rejoint son monde des symboles.
C’est la fin du voyage ! C’est la fin des chants !
Je redescends sur planète Terre. Sans aucune restriction, j’accepte ce retour. Je suis de retour enveloppée d’une aura de Lumière, de Joie, d’Espérance, d’Amour !
Le stage quitté, je renoue avec mes voyages terrestres, pédestres, à bicyclette, en voiture ou par rail dans la vie au quotidien. Mais en moi une Lumière est, elle fait régner la certitude, la certitude que tout est possible, que la vie telle qu’elle s’offre, est telle qu’elle doit être.
Longtemps, j’ai flotté sur l’idée que ce voyage avec Aigle allait vers mon futur, sans parvenir à en saisir son sens, tandis que l’autre vérité attendait de se faire jour au fond de moi. Lorsqu’elle est née à ma compréhension, j’ai su qu’ Aigle m’avait embarqué jusqu’à l’Origine de Mon Âme, pour y ressentir le goût de Nos Projets, le sens de ma vie d’aujourd’hui … et je me suis encore plus allégée … et je me suis encore plus ouverte à la Confiance, à la Conscience de moi …
L’ultime chantier : la fin du bal
Avant de nous séparer, parce que nous nous sommes séparés ce groupe de chercheurs et moi-même, je me rappelle la ronde. La ronde des stagiaires tournait au rythme de quelle musique ? Celle de Jonathan Levingstone le Goéland que j’ai découverte ici, celle de Caruso « Con te partiro » également inscrite en mon émotionnel ici ? Je ne sais.
Pourtant je ne suis point entrée dans la ronde, dans le partage de la joie du groupe … je suis restée à l’écart. Je regarde tourner les autres. Quand l’animatrice a rencontré moi jouant l’électron libre, elle m’a propulsée vers ce manège. Forcée par elle j’ai tourné, sans enthousiasme réel … la solitude me parlait mieux. Est-ce un chantier final qui se propose à moi avant que ne revienne le quotidien ? J’ai pris conscience de ma nature d’électron libre ce jour-là. Dois-je m’en défaire, en jouant le forcing ? Suis-je coupable de ne pas entrer dans les rondes ? Suis-je coupable de ne pas adhérer aux groupes en dehors des travaux de stages pour privilégier ma solitude ?
Le stage s’est conclu sur ce chantier-là. Tout m’avait semblé juste ébauché et pourtant, en l’instant de ces écrits, tout me parait complètement abouti, merveilleusement organisé pour permettre au temps, à ma vie au quotidien, de m’aider à bâtir la réalité de celle que Je suis …
DEUXIEME PARTIE : LA VOIE SUR RAIL
CHAPITRE 1 : RETOUR AU QUOTIDIEN
Je quitte la salle de cinéma-stage dans laquelle Le Grand Metteur en Scène m’a offert de visionner le film de ma Vie. Ma tête est emplie d’images si belles, de musiques si puissantes, de touches émotionnelles à cœur de moi si palpitantes que l’envie de partager avec tout le monde ma joie-délire se développe en mental, que le désir d’envoyer d’autres êtres dans un stage identique pour qu’ils y visionnent leur propre film se manifeste, mais, dans le même temps, aussi puissamment, j’aspire à me taire et s’intensifie mon besoin de me retirer à des miles de ma vie d’avant le stage … car me voici face au vide.
Que va-t-il advenir au bout de ma plongée dans mon ancien monde ? Combien de temps les images de mon film éclaireront-elles mes pensées quotidiennes ? Combien de temps mettrais-je pour oublier mes rencontres intérieures, pour que glisse dans l’oubli ce qui est venu à ma conscience ? Combien de gens aurais-je à rencontrer avant de retrouver mes anciens réflexes ou de les effacer à jamais ? Saurais-je réanimer mon film ou s’autodétruira-t-il ? Saurais-je lancer les chantiers, me transformer ou tout mourra-t-il comme meurent les rêves ?
Barque est bien installée sur le rail de l’U,
ma distance à l’océan se réduit de moitié,
elle m’autorise l’usage d’une canne à pêche plus courte, plus légère.
La pêche devient moment de reliance
plus facile avec l’océan.
Pourtant, si je n’y prend garde,
le glissement automatique sur rail
peut, une fois encore,
m’incliner vers l’inconscience …
L’heure de nouveaux choix
Durant ces huit jours de stage, mon monde intérieur s’est révolutionné et a disloqué dans ma tête ma complicité d’avant-stage avec les autres. Suis-je capable de croire ou de me laisser leurrer encore par les dires de mes familiers sur leur compréhension de ma révolution intérieure ? Ils ne sont pas venus avec moi, n’ont rien vécu de ma folie, ne savent rien, ne peuvent pas imaginer ce vécu si peu rationnel, si hors du connu, si étranger à notre quotidien, comment vais-je les regarder ? Comment vont-ils me voir ? Après ce séjour dans un monde clos, sécurisant, dans un monde où tous les participants étaient portés par la même énergie, rassemblés dans le but commun d’une recherche consciente du Soi, la question de la vie hors de ce lieu protecteur flashe son « immense point d’interrogation ».
Pourtant, je dois rejoindre le présent … Des Êtres, Anges ou Messagers je ne sais, mais indubitablement des Forces de l’Invisible aidantes m’ont guidée vers des lieux de vie hors quotidien, m’ont propulsée dans des bulles de régénérescence de Moi en moi, m’ont initiée lors de pratiques, pour que je trouve ma route, et, maintenant, Ils m’invitent à me détacher de ces lieux de rêves, lieux de sécurité émotionnelle pour renouer avec mon quotidien, pour que « j’y insuffle ma nouvelle façon d’être ». Afin d’atteindre l’harmonie dans mes pas de danses devenus si étranges, Ils m’enjoignent de ne plus casser ma vie en deux, de cesser de m’écarteler entre le quotidien et la richesse bouleversante, transformatrice de ce stage. Le stage était une messe partagée en l’Eglise-Stage avec les autres participants présents, son effet qui dure toujours à cœur de moi me donne la force pour que, hors de cette église-Stage, je vive naturellement auprès des êtres athées (…de stage !!!) qui tournent autour et dans ma vie quotidienne, que je dépasse ma crainte de mêler mon vécu du stage à l’ordinaire de notre vie commune.
Et la réalité se frotte à moi, et je me pique à elle. Les rares personnes proches à qui j’ose évoquer, hyper-partiellement, mon vécu du stage-folie, ne partagent vraiment pas mon enthousiasme. Ils s’effraient de moi et ils m’agressent à la mesure de leur peur. Je me referme telle une huître en entendant leur mot couperet : « secte ». Ce stage serait-il sectaire ? Pourquoi ce mot m’agresse-t-il sinon parce qu’il s’infiltre exactement dans la brèche qui est mienne, parce qu’il touche du doigt la peur larvée logée à cœur de moi.
Ô peur de « secte », combien de fois ai-je ressenti ta présence capable de me donner à douter du bien-fondé d’une continuation de ma participation à ce stage durant les huit jours si riches ? Ô peur de « secte », je sais que tu furètes en mental, je sais que tu m’interpelles depuis le premier soir du stage et que tu as relancé ma peur tout au long du stage, tout particulièrement en ces moments où les animateurs parlaient de post-stage, de piqûres de rappel en ce même lieu, pour renouer avec cette intensité énergétique secouante à faire pleurer, pour remettre une nouvelle fois en cause les habitudes de vie et générer ces wagons de réforme de moi, de transformation de mes relations avec les autres. Ô peur de « secte », il est si facile de te réveiller, il est si simple à la peur de l’autre de me pousser à l’acte de rupture.
Car je romps, non point avec mon quotidien dans lequel au contraire je me réinvestis vaille que vaille, mais avec stage … Après la si belle retraite qu’il m’a accordé, c’est d’avec lui que je bats en retraite, d’avec lui stage et d’avec tous les stagiaires, les animateurs, mes écrits personnels, le compte-rendu, les photos de stage, les adresses des stagiaires envoyés par les animateurs … Je passe par la trappe, je déchire, je brûle, le moindre détail de ce qui peut témoigner de ces huit jours. Je m’extirpe de ma parenthèse factieuse, je me retrouve dépouillée d’elle, même si reste accrochée au fonds de moi la mémoire ineffaçable de ce vécu à moins que, sciemment, je ne l’occulte elle aussi.
Ai-je eu tort ou raison de détruire toutes ces traces tangibles ?
Un temps, j’ai su me faire croire que l’autorité de l’autre m’avait imposé de me délier du groupe des stagiaires. Mais la réalité est autre. Je n’ai à accuser personne du choix de mes actes, tout au contraire, j’ai préférablement à remercier l’autre d’être miroir de mes culpabilités. Je me suis servie de sa peur comme alibi pour fuir les complices du stage qui m’avaient aidée à Me rencontrer car je culpabilise véridiquement de ma participation à ce stage, de mon absence de la maison pendant ces huit jours, pour la raison inexcusable de « mon pur égoïste plaisir personnel ». Dieu que je suis loin de la perfection à laquelle aspiraient mes géniteurs ! Quelle immoralité d’avoir laissé seul, d’avoir abandonné l’époux une semaine en lieu et place de le privilégier, de le servir, d’être la femme à la hauteur de cette épouse-mère que le modèle familial m’a enseignée d’être. Loin de l’épouse parfaite voici que j’ai l’outrance d’ajouter mes remises en cause présentes et mes colères soudaines, dérangeantes qui arrachent l’époux hors de son ronron quotidien. En toute logique éducative, pour me punir de ma faute d’imperfection, mais principalement et plus immédiatement, pour assouvir ma soif de reconnaissance de l’autre dans ma vie quotidienne, j’avais à rejeter le stage et les hommes et femmes qui s’y étaient investis avec moi. Mes rejets montraient que je choisissais l’époux et mon image d’épouse se redorait.
Mon vieux schéma éducatif, si difficile à démonter, si ardu à abandonner comme me l’avait dévoilé en stage le personnage de ma grand-mère paternelle, est en train de s’ébrécher. Comme, il continue à jouer, en simultané, le rôle de bardage sociétal, il m’empêche à ce titre d’avoir réellement conscience de la révolution qui s’opère dans mon couple marital .
Ce choix stratégique appliqué intuitivement mais pas en conscience réelle, génère des colères contre moi, contre les autres que je rends cause de mes malaises non reconnus et relance en permanence la question du : « où trouverais-je refuge dans les moments d’orage maintenant que j’ai fermé la porte à la Voie de l’Ouverture ? Pourrais-je me débrouiller seule ? Saurais-je ? »
Les guides livresques
Rien n’est unicolore, tout est mi-ombre, mi-lumière. Dans mes déséquilibres-ombres s’infiltrent des zones de stabilisation-lumières et je sais que je ne suis pas seule, qu’autour de moi guides et gardiens de seuil veillent … Ainsi ai-je repris pied après plus de cinq années de doute en éloignant de moi la peur immense de ne pouvoir jamais parvenir à Me rencontrer. Sans que je le formule expressément, les mots d’Arnaud Desjardins « ashram, guru, lying » et mes « comment ? Où ? Qui ? » posés en 1988, ont trouvé réponse via ce stage.
Cette certitude favorise l’alternance du vécu de peurs avec la pénétration d’ondes de Force, d’Espérance, de Confiance, d’Amour, de Joie. Cela s’éclate dans ma poitrine ! Cela éclabousse par mes yeux, par ma bouche ! Sans l’exprimer encore clairement, je renais à l’idée que l’Ashram proposé par Arnaud Desjardins, celui où je continuerai mon initiation, est cette Terre de Dordogne, le lycée, la maison ou n’importe quel autre lieu où je serai. Dans cette perspective, Guru est La Vie. Il prend la forme de Tout Ce qui peut faire écho à mes zones énergétiques, hommes ou choses, plantes ou minéraux, animaux ou ciel, étoiles, air, eau, terre . Ainsi Ashram et Vie s’allient pour me permettre d’entrer dans la conscience de mes actes et de mes émotions, deviennent mes complices pour m’autoriser à dépasser la voix de petit ego, alias Maître mental, qui, pendant le stage, lors de sa rencontre avec Aigle, a mesuré jusqu’où un lying peut ouvrir la Conscience .
Mon chemin de solitaire est peuplé de rencontres non palpables, de réponses intérieures, de Confiance et d’Amour … Je sais que je ne peux espérer en de nouveaux stages pour savoir comment vivre mes relations avec les élèves, avec les collègues, avec l’ époux, avec mes parents, puisque je viens d’en barrer la porte avec ma rupture. Je dois donc trouver une réponse ailleurs, autrement et immédiatement.
C’est ainsi que les Forces de l’Invisible aidantes m’offrent de voir et acheter en librairie de nouveaux livres , de rencontrer via ces écrits de nouveaux Êtres, et par eux de trouver réponse à mes questionnements du moment.
La lecture de Rampa m’est proposée après mon rêve éveillé fantastique avec Aigle. L’irrationnel de Rampa peut me pénétrer aisément. Je laisse les deux ou trois livres que j’ai lu de lui conforter ma Foi en un Être Supérieur, en une Vie Au-delà de ma vie au quotidien, en l’existence autour de moi des Forces de l’Invisible aidantes.
C’est naturellement, dans ce chemin d’ouverture à Tout ce qui vient, que j’entre dans la compréhension profonde de ma liaison avec La Source d’Energie qui m’anime en méditant sur « la 10° révélation de la Prophétie des Andes » de James Redfield. En cette période, en témoigne mon journal intime, je deviens capable, de plus en plus souvent, de ne plus m’affoler, de revenir à la Source, de chercher toute solution en Elle, d’attendre pour me comprendre afin de voir l’action à mener dans la vie pratique. Mon nouveau regard génère mes nouveaux comportements qui me surprennent, m’émerveillent. J’apprends à observer les autres et moi-même dans leurs prises de pouvoir, dans leurs vouloir dominer les êtres qui les entourent. Je vois mon orgueil d’être à la place où je me trouve, que je crois « supérieure » à celle de l’autre, j’apprends à changer mon regard. J’apprends à aimer, soi, Soi et les autres sans dominer quiconque. Mon éducation en particulier paternelle, m’a inculqué l’obéissance aux lois et à l’Autorité. J’ai obéi avec rigueur et sans aucun esprit critique. Mon travail d’observation, éclairé par « la 10° révélation de la Prophétie des Andes » me mène à la recherche de La Loi Universelle. C’est à Elle seule que je dois obéissance. Je suis consciente qu’un tel renversement ne peut se vivre si, en parallèle, je ne m’éloigne pas de mon besoin d’être vue, approuvée, reconnue. Je commence à entendre l’idée qu’il n’y a aucun être terrestre qui puisse avoir un pouvoir sur moi et son corollaire, que moi-même je n’ai aucun pouvoir sur l’autre. Seule est La Loi Universelle. Saurais-je la reconnaître quand elle déroge à la loi mise en place par les hommes ? Je ressens où je vis ma part de libre arbitre d’homme acceptant La Vie, reconnaissant le poids et le sens de Ses Lois et je sais que mon chemin a à passer par cette unique voie médiane, voie de Vérité et d’Authenticité avec Moi, voie d’éloignement de la peur de Moi.
Quand Bach avec « Un » m’ouvre ses pages, j’accueille favorablement l’idée que tous les carrefours de mon parcours de vie ont été et seront toujours lieux de choix de ma Vie. Au carrefour se croisent la route du « oui » et celle du « non ». Les routes que je laisse en disant « non » sont reprises par des « moi parallèles » qui déroulent un autre film de La Vie. Ainsi, la part de moi qui s’est laissée obliger à faire l’escalade, en mars 1992, a ouvert ma route au stage de Gérard. La part de moi qui a refusé l’escalade, au même moment, est partie pour un autre voyage dans une vie parallèle. Dans cette perspective des routes parallèles la multitude des possibles fait que le temps et l’espace n’existent plus. C’est un tout autre regard sur Ce qui Est que je pose et il génère en moi mille pensées. Je vous capte dans l’air ondes pensées, mon récepteur vous emmagasine et mon émetteur en retour vous diffuse. Vous vous posez en mental, me construisez et à mon tour je vous construis. En cet instant, je suis Une avec le Grand Jeu de la Création !!!
Pendant ces années après stage, moi nouvelle graine germée dans le stage, arrosée par mes expériences vécues au quotidien et mes lectures, mes prises de conscience, je pousse et je commence à enlever mes œillères. Je balbutie encore mais je prends tout comme source de compréhension et de transformation. Et mes lectures s’enchaînent.
« Le Message des hommes vrais au monde des vivants » de Marlo Morgan pose en moi son nouvel embryon, celui de la compréhension de ma tâche d’enseignante. Elle est de mener un groupe dans mon activité de professeur et d’être le guide de ce groupe. Pour éduquer justement, pour offrir au groupe une nourriture spirituelle et réelle, pour favoriser l’accès à la connaissance des élèves et des étudiants qui me sont confiés, moi, enseignante je dois devenir ce que je cherche à leur transmettre. Si je cherche de l’eau, je dois me faire eau et par extension, si je suis ce que j’enseigne je pourrais mener mon groupe. J’opère un nouveau changement de regard sur la préparation de mes cours …
Pour réussir mes évolutions, mes révolutions j’appelle à l’Aide les Êtres de l’Au-delà qui ont la Bonté de m’aider depuis toujours. Je me relie au Ciel de plus en plus souvent, et je m’enracine, je laisse mon côté hémisphère droit fonctionner, je lui rends une part de sa place usurpée par côté gauche depuis bien longtemps … N’est-ce point ce que fractures du rocher et du pariétal droits sont venus me signifier de mettre en œuvre lors de l’accident d’escalade ???
Autres points d’appui
« Comme une rivière crée les berges qui la contiennent, l’énergie en quête de vérité crée sa propre discipline sans aucune forme de contrainte, et comme la rivière trouve la mer, l’énergie trouve sa propre liberté. » Krisnamurti
Ma liberté a exigé un long apprentissage, une discipline nouvelle, subtile, bien éloignée de celle de mon éducation puisqu’incompatible avec la peur, une discipline toute en amour et en don de soi. Forcing et « il faut que je fasse », leitmotiv de ma discipline ancienne, de celle usée en mon enfance, abusée au long de ma vie de femme, sont de pures illusions du faire, sont maya.
Pour vivre Ma Liberté, j’ai commencé, en cette sortie de stage, mon apprentissage du « no forcing ». Chaque jour, j’ai, à petits pas, parfois minuscules pas, troqué le » fer » contre l’amour de Moi. Mon environnement, associé à des cellules de mon vieux blindage toujours actives, résiste à ma nouvelle conception d’être. Le mot, le sourire, le charme, qui hier encore permettait à quiconque de m’entraîner hors de ma route, peu à peu, perd de son impact. Je grignote ma liberté, j’ouvre l’espace à Ma Vérité, je laisse se déployer Ma Confiance et je dépasse, au goutte à goutte sans doute encore, mon vieux comportement.
Pour m’aider à opérer cette révolution en moi, j’ai appris à installer de nouveaux outils, à m’ouvrir vers La Conscience, à opérer la transformation permanente de moi.
Journal
Ainsi, ai-je pris l’habitude depuis 1994, d’écrire mon journal. Les premières années, je me suis mise à l’abri du regard des autres pour le rédiger, je le rendais le plus inaccessible possible, le mêlant à mes dossiers d’étudiants, le refermant en pleine écriture si quelqu’un pénétrait dans mon repère à ce moment-là.
Car mon journal était le miroir de mes pensées. Sur ses pages, je posais, et je pose encore, noir sur blanc mes émotions, il est mon confident le plus neutre, le plus fidèle, il accepte tout, je peux cracher sur lui mes colères, je peux les analyser, relever les critiques lancées par les autres dans la journée, les fermetures des autres, mes fermeture-silence face à eux, mes critiques intériorisées. Il reçoit mes remerciements au Ciel, aux Aides quand s’achèvent mes crispations ou mes crises.
Sur journal, je m’interroge, je cherche à comprendre. Lorsqu’un évènement déclenche l’ouverture de ma conscience sur un thème donné, le travail dure des jours et revient sur le métier régulièrement, voire durant des années. Les écrits des différents cahiers témoignent de moi-Pénélope, de mes travaux d’aiguille, du faire et défaire la tapisserie émotionnelle de mon Être jusqu’à ce qu’un jour merveilleusement Ulysse revienne !!!
Ainsi lorsque d’aucuns me reprochèrent ma rigidité, avec des mots qui firent choc émotionnel sur une image de moi que je refusais, durant une semaine, chaque jour, j’ai inventorié les causes, les « à qui la faute », j’ai cherché à déceler l’origine de ce comportement qualifié par l’autre de rigide. Depuis le stage, mon envie d’ouvrir à ma douceur, éveillée par « la peinture de Monet », m’invitait à quitter virago mais se heurtait à cette part de moi qui ne pouvait supporter le laxisme ambiant sur mon lieu de travail. Mon dynamisme m’avait propulsé responsable d’équipe et m’amenait à la prise de décision, et je tranchais les litiges de manière trop tranchante -sans aucun doute- lorsque je me frottais à ce que je jugeais le laxisme des étudiants ou de quelques collègues. Je me laissais porter par virago et déviais vers la rigidité même si elle n’était point utile. Néanmoins, en cette période-là, sans me débarrasser de virago, j’ai atténué son poids.
Sur journal, je témoigne de mon nouvel apprentissage du pouvoir. » Mon pouvoir, ai-je écrit, est lié à l’image. Je me donne l’image de quelqu’un qui ne se fera pas marcher sur les pieds et j’attaque qui le fait. Se donner l’image de ce que doit être l’autre me heurte à son inadaptation à ce que j’attends de lui. » Pour Pénélope-moi il est temps de regarder au-delà de l’apparence, de réussir quelques pas dans cette nouvelle conscience du pouvoir. Je me suis reliée au Ciel. Je l’ai invoqué sur journal, chaque jour. J’ai cherché dans le yoga à m’enraciner. J’ai prié. J’ai laissé le côté hémisphère droit de ma tête fonctionner plus librement. Je suis un peu plus devenue copine avec moi. Journal m’aide, journal témoigne …
Par mes écrits du matin, par ceux du cours de journée, je nourris mon journal, en les accueillant sur ses pages, je libère mon esprit, je fais mon auto-analyse, je bâtis des repères de l’instant, je grave sur papier la mémoire de ce moment de moi auquel je peux me référer à convenance quand Monsieur doute prend ses aises en moi. Lors du stage de Gérard le rêve éveillé sur « les deux cheminées » avait révélé l’existence des poutres SNCF. Journal m’offre de les voir, de m’apaiser de leur impact. J’apprends, grâce à sa mémoire accessible, à relier mes comportements présents à des échos d’enfance. Je me fais du bien, je révise mon passé, je crée des liens entre moi d’aujourd’hui et moi d’hier, entre les préceptes éducatifs reçus et l’attitude que j’adopte dans des situations particulières présentes.
Journal tisse merveilleusement la toile de ma mémoire. Ce jour, j’écris sur la vingt-troisième page de mon journal en cours, qu’ai-je pu écrire dans le précédent cahier en ce même numéro de page ? Ce jour si je l’ouvre au hasard, journal me relie vers une part de moi, vers une émotion toujours en cohérence avec le moment présent. Dans ces plongées dans le monde des coïncidences, je me désaltère , une nouvelle fois, à la Source de ma Vie, à la source de mon Etonnement et de ma Confiance en la Vie.
Journal est mon psy. Journal est dépositaire de mes rêves, gardien de mes dessins, des griffonnages que je jette sur ses pages pour exprimer mon désarroi mieux que par un long discours certains soirs.
Comment pouvais-je laisser quiconque pénétrer dans mon jardin secret qu’il matérialisait si merveilleusement au début de sa création alors qu’en moi Confiance hésitait encore à s’installer sans retenue ? A présent, vingt ans après sa naissance, journal est toujours mon précieux allié, mon témoin de la vérité de moi, mais je n’ai plus besoin d’en faire mystère, c’est pourquoi, ami(e) qui me lit, tu peux accéder à son contenu et rencontrer mes profondeurs.
Rêves
Rencontre avec Aigle a définitivement ouvert une brèche vers le pays de mes rêves. Dès le retour du stage le besoin s’est manifesté de comprendre leur langage.
Mes rencontres livresques en librairie m’ont permis de découvrir le dictionnaire des Symboles de Chevalier et Gheerbrant, Daco et son « interprétation des rêves », Geneviève Saltvage et son livre « décodez vos rêves ». Guidée par les auteurs de ces ouvrages j’ai commencé à exploiter mes rêves. Un travail très scolaire, laborieux m’a permis de continuer le message de mes nuits. J’appliquais les conseils de Geneviève Saltvage à la lettre, je titrais chaque rêve, je synthétisais par un mot, une idée ce que voulaient me dire chaque paragraphe, je reliais leurs propos avec mon vécu émotionnel du moment, à mes chocs avec l’autre dans ma vie quotidienne. Les chocs ne manquaient pas. Ils venaient de tous bords. Ils pouvaient être ébranlement dans mon couple marital à la maison parce que la réalité quotidienne ne collait pas à mes idéaux de couple si utopiques, à ces folles espérances à la Delly dont mon émotionnel avait été alimenté par une mère fortement imprégnée d’eux. Ils étaient téléscopages au travail, dans mes relations d’enseignante avec les étudiants, dans mes contacts avec les autres profs dont tout particulièrement dans ceux avec dame en noir. C’est par mes rêves, mon auto-analyse d’eux dans journal que j’ai été amenée à bouger ma relation avec dame en noir. Je me suis vue perdre mes abus de dons vers elle et recevoir en réponse – oh surprise – des cadeaux d’elle. Le jour de ce retour j’ai été ennuyée mais j’ai ressenti aussi quelque chose comme une réparation de ses non-dons passés …
Au début, comme pour tout apprentissage, l’analyse de mes rêves fut un travail lent et fastidieux mais si stimulant pour mental que j’en ai accepté le poids, que j’ai été fidèle à ce travail quasi quotidien. Peu à peu, j’ai glissé vers une synthèse plus rapide du rêve et de son étude. Mais, aujourd’hui encore, chaque fin de nuit, quand mon sommeil s’achève, quand l’esprit s’est ouvert au nouveau jour qui est, je recueille le rêve resté accroché à ma mémoire, déposé en moi par quelque vague de ma nuit, je l’offre à ma grève. Ma plume gratte le message d’Au-delà, sur la page blanche de journal, idées et ressentis s’invitent, je les laisse nous rejoindre puisque, le temps est venu d’accueillir la vague du jour qui est. Les matins sans retenue de rêve, j’écris « bonjour » sur mon journal, je le griffonne ou je dessine, je donne une pensée, ma joie, ma tristesse, ce qui vient et la journée peut démarrer.
Dessins spontanés
Les esquisses de pensées que les mots ne savaient suffisamment traduire, les griffonnages, sont bientôt devenus des approches mandalas. Quel que soit le dessin, son positionnement sur ma page journal, je l’enveloppais dans son cercle. Ce cercle découvert grâce à l’ouvrage de Suzanne F. Fincher « la voie du mandala » crée mon propre espace sacré, mon centre de réunification sur lequel par la méditation je peux encore plus profondément concentrer mes énergies si j’ai compris le sens des symboles. Suzanne F. Fincher aborde simplement mais richement le symbolisme des couleurs, des nombres, des formes et des motifs qui me permettent d’entrer dans l’interprétation de mes croquades pour suivre mes inspirations, comprendre ma vérité intérieure.
Mes découvertes via ces mandalas sont inimaginables, merveilleuses, porteuses d’une énergie de Confiance, de certitude qu’autour de moi, de nous, il existe des ondes , des Energies suprahumaines si puissantes qu’elles ne peuvent me conduire qu’ à l’humilité, à l’ouverture, à l’Amour.
Un mandala que je pose là dans la page de journal, est une liaison avec mon Âme, avec mon Moi supérieur, il est mon lien avec l’Au-delà, cet Au-delà qui veille toujours sur moi, dont je ne me suis point éloignée malgré ma rupture avec le monde du stage, cet Au-delà par lequel je rééquilibre ma vie.
Dialogue avec le corps
L’énergie attire l’énergie de même nature par la loi de la synchronicité. Les jours où quelque révolution de moi crée des moments d’égarements, je lance mes « help-me » sur le cahier vers un Au-delà indéfini. Je suis sans lien avec les membres du stage mais pas avec l’énergie de ce stage et les Êtres de l’Invisible gravitent autour de moi. Ainsi ils lancent sur ma route des hommes et femmes ouverts spirituellement que jamais je n’ai su rencontrer avant. Aujourd’hui, ces humains arrivent à moi par le biais d’une rencontre inattendue, leur petite annonce déposée en des lieux insolites … C’est à cette époque que mon corps a sollicité des mouvements d’énergie et que j’ai rencontré le yoga. La pratique du yoga et du mouvement corporel éducatif de l’école de Dany Bois ont initié mon corps et mon esprit au jeu de la reconnaissance de l’énergie dans mon corps, à mon écoute d’elle, à ma prise de conscience d’elle, dès 1993. Je l’écoute dedans, en mon corps, je l’écoute via ma respiration et Ce que j’accueille ainsi en Conscience est purement La Vie qui m’anime.
Là encore ce fut un lent travail, dans la solitude. L’animatrice de yoga n’avait pas le même poids que les animateurs du stage pour m’ouvrir à plus de remises en cause de moi. Le seul témoin de mes changements et des mouvements de mes doutes était, bien entendu, journal. Savais-je lire mon corps ? Savais-je l’écouter ? Savais-je y puiser la Confiance qui me porterait encore plus loin vers l’harmonie, la paix, l’amour de moi et d’ondes en ondes l’amour de l’autre.
Des années de pratique ne m’ont pas transformée en yogi, parce que telle n’a jamais été mon aspiration, mais elles m’ont appris à mieux entendre l’Energie en mon corps physique, en mon corps éthérique, à trouver dans la respiration l’outil d’apaisement, de Confiance, le plus direct et le plus Reliant à La Source .
L’énergie trouve sa propre liberté …
la barque vient de se positionner
au plus près de l’océan,
je lance ma ligne ,
je sens la prise,
ce doit être un super poisson,
je m’effraie,
saurais-je le remonter ?
Parce que les énergies en moi se sont bougées, ont débloqué des bouchons qui empêchaient mon être profond de s’exprimer jusqu’alors, je me retrouve face à moi-même, dans plus de cohérence.
Ma barque sur rail glisse aisément. Elle a quitté le tourné-en-rond de manège dans ma prise de décision. J’ai changé ma perspective, elle est ligne droite. Ce n’est plus la reconnaissance de l’autre qui dirige toute ma vie, aujourd’hui, j’attribue une part de plus en plus importante à ma propre reconnaissance de moi, à ma vérité, à mon authenticité. Quelqu’il soit, l’autre est surpris par mes révolutions puisque, soudainement, elles changent les règles de notre jeu de société. Je ne colle plus à sa connaissance passée de moi, je le désarme, voire, parfois, je déclenche sa colère devant moi. Les mutations en moi génèrent les mutations en mon environnement. Les changements dans mes relations sont profonds. Certaines relations, celles dans lesquelles l’autre tourne toujours sur manège, craquent, d’autres dans lesquelles la glisse sur rail a commencé, s’approfondissent.
Nous voici en 1997, quatre années se sont écoulées depuis ma sortie du stage, quand ce jour de février, le courrier arrive, il me désarçonne mais je décide de me laisser emportée par son nouveau courant, ce nouvel élan qu’il me propose … La rivière continue à creuser son lit, et cette fois-ci, en conscience, je décide de plonger dans son eau.
CHAPITRE 2 : SORTIE DE CAVERNE
Saisir la vague au bond !
Bien positionnée dans barque,
je suis pêcheur.
Voici que monte,
le long de mon bras,
une vibration.
Au bout de ma ligne,
j’ai ferré une prise.
Lentement, je remonte le fil …
Le facteur m’a remis le courrier et je tiens entre mes mains l’enveloppe blanche qui m’est adressée . Je lis la suscription. Les expéditeurs sont Gérard et Françoise, les formateurs du stage de 1993. La lecture de leurs noms allument le feu en mon émotionnel. Mon coeur bat la chamade …
Leur dernier courrier bilan de stage, fin d’été 93, couardement passé à la trappe par mes soins, n’avait pas connu de suite. Ma non-réponse à leur proposition de « piqûres de rappel » avait généré la suspension de leur correspondance pendant quatre années. Quel bon vent les amenait ce jour à rompre le silence ?
Je vibre
Je me ressens aussi fébrile qu’il y a deux mois lorsque j’ai, par hasard, croisé Gérard dans la ville. Il a traversé à pied le passage piétons au feu tricolore, moi j’attendais au volant de ma voiture dans la file des automobilistes en attente du feu vert. Il rejoignait sa voiture garée à quelques pas de là. Rêve insaisissable de Gérard traversant la rue ! Son apparition a réveillé ma nostalgie du stage. En moi, se sont emmêlées ma tristesse de ne pouvoir revivre tel moment et ma peur de renouer avec le conflit marital si je m’aventurais à recommencer cette expérience. Tristesse et peur se sont lovées en moi toute une matinée.
Hasard, tu n’existes pas … par hasard ! Hasard, tu es volonté d’Au-delà pour que j’expérimente. Tu m’as donné, ce matin-là de vision éphémère de Gérard, le préambule à la scène actuelle de cette réception courrier, pour que je sache me réarmer, pour que je sois prête au jour J qui allait venir. Et jour J est aujourd’hui !
Que contient votre enveloppe Gérard et Françoise ?
Mes mains ne sont point sûres. J’ouvre nerveusement votre pli, j’en extrais une lettre circulaire, une invitation pour un stage en mai, un stage consacré aux enseignants ayant participé préalablement à un de vos stages de travail sur Soi.
Oh l’envie déchirante d’y participer ! J’ai libéré la route du « oui, je viens », j’ai tant conquis de Ma Liberté intérieure durant les quatre années écoulées que n’a pu rester perenne en moi la supposition sectaire sur votre formation. Telle idée est à jamais éteinte. Par contre, un barrage m’empêche encore d’accéder aisément à ce « oui, je viens », un très vieux barrage, il est le modèle éducatif et sociétal de ma jeunesse. Je barre ma route avec l’épouse idéale que je dois être, celle conforme au modèle maternel, celle qui partage tout, qui ne laisse pas sa moitié seule, qui n’abandonne point la barque. Barrage s’était réveillé il y a deux mois lors du passage de Gérard à deux enjambées de moi, et barrage traîne ses savates de nouveau dans mon émotionnel.
Comment vais-je affronter l’époux ? Comment vais-je obtenir son assentiment ? Je ne sais agir. Je suis égarée. Petite fille sur le chemin de sa liberté se perdra-t-elle en cet endroit-clef, en ce carrefour où se croisent la route de la tradition de la lignée des femmes de laquelle elle est issue et celle de la modernité qui pénètre de plain-pied dans la vie choisie par son Âme … ?
Help me !!!
Ô chers Aides de l’Invisible, Vous êtes à l’oeuvre à jamais auprès de moi. Vous m’offrez sur plateau d’argent l’opportunité d’agir dans le sens de la soif d’Âme.
Tandis que je vibre et que mental s’agite dans cette pièce depuis que j’ai découvert l’invitation, dans la pièce à côté l’époux dépouille son propre courrier et, à l’ouverture d’une enveloppe, lance haut et fort : « dimanche je ne mangerai pas là, il y a repas des chasseurs … ». C’est une affirmation. C’est une information. Ce n’est nullement une demande d’avis ou d’autorisation. C’est une certitude de se rendre à l’invitation qu’il vient de recevoir quelle que soit ma position. Il est maître de son jeu. Pourquoi ai-je scrupule à me poser encore la question de maintenir la vieille habitude maternelle ? Pourquoi vouloir solliciter l’assentiment de l’époux pour tous mes choix de « loisirs » ?
Barque s’agite,
superstructure porte-avions est, soudainement,
secouée par une vague de fonds.
Ma ligne se tend,
poisson ne doit pas m’échapper.
Agir juste !!!
Je me décide très vite. En retour boomerang à son affirmation, la phrase tombe de ma bouche : « OK ! Au fait, en mai, je suis invitée à un stage de Gérard. Je vais m’inscrire … »
C’est dit ! Grand vide en moi ! Grand vide de moi, parce que mon stress s’est évadé ! Poisson est bien ferré, je n’ai plus qu’à le laisser remonter.
Ai-je voulu croire, ou est-ce ce qui a été dans la pièce à côté ? J’ai senti le trou noir, la peur chez l’autre … celle de l’animal piégé par mon jeu, le même jeu que le sien.
Entre deux vagues
Quatre mois d’attente ! Quatre mois de travail sur moi conscient, plus conscient que jamais pour pouvoir, demain, traiter devant Gérard et Françoise de mon état d’être.
Les jeux de rôle entre l’époux et moi dansent autour de ma détermination à me rendre à ce stage et de son souhait que j’en abandonne l’idée. Mon choix soustendu par ma quête d’estimation, de mesure du chemin que j’ai su parcourir depuis août 1993, en dépit des sursauts de vieilles peurs qui s’agitent en moi, ne déviera pas. Je suis capable d’avancer en étant plus grande que la peur, en voyant sa nature illusion. Stimulée par ces prochaines rencontres avec Moi, je sais casser de nouvelles amarres, mais combien d’entre elles restent encore accrochées à ma vieille structure ? Si je ne sais les compter, je reste lucide et suis aidée pour les ressentir par la partie cachée de mon inconscient-iceberg. Inconscient me révèle l’existence permanente de mes peurs larvées en me poussant à de belles boulimies qui égratignent, le mot est faible, mon espérance d’image de femme plus menue.
C’est une certitude, je vivrai le stage qui vient en attention pour mon couple marital. J’ai tiré leçon de l’expérience du premier stage. Je n’installerai plus le silence total pendant ces journées à l’extérieur de la maison. Je ne laisserai plus quelque panique générée par mes découvertes spirituelles me rendre muette. Je téléphonerai à l’époux au quotidien. L’ignorance de la réalité de mes vécus en stage d’août 93, aggravée par mon silence total, a eu tout loisir de laisser mental créer en mon époux n’importe quelle folie dont sectaire sur mon expérience. Ce mois de mai 1997, j’ouvrirai plus mes découvertes sur ma vie, je chercherai à voyager au-delà de ma vieille peau de résistante, je chercherai à voler … C’est cela, je vais devenir papillon afin de voler. Le papillon vole si bellement quand il quitte sa chrysalide !
Question : ai-je quitté la mienne ??? Plus la date approche, plus ma hantise grandit.
Tant d’idées ne savent se poser que mon mental délirant ne cesse de projeter à partir du connu son faux inconnu. Les mots émis par Gérard lors de mon appel pour l’inscription, tambourinent : » Tu trouveras des réponses sur le devenir spirituel des jeunes mais ne crois pas tout trouver dans ce stage ». J’ai beau penser « OK ! », mental piétine, ne sait rester inactif, mental remplit le vide avec du vide, mental efface ses incertitudes avec le vent de son impatience. Oui ! Je peux être déçue. Oui ! Je peux recevoir moins de richesses qu’en 1993. Pourtant, si je peux me laisser dire cela, persiste plus forte que mes doutes l’idée que je vais m’enrichir follement.
Pour apaiser mental, j’ai besoin de le rassurer et tout signe en ce sens est bienvenu ! Le 6 mai, un participant m’appelle pour me demander d’aller le chercher à la gare le jour J. Il me dit que nous serons onze stagiaires. Onze est en numérologie le nombre de mon chemin de vie. Onze devient un augure on ne peut plus favorable pour la réussite de ce stage ! Autre présage apaisant pour mental : l’Ascension … Des temps forts de ma vie ont été portés par l’énergie spirituelle de l’Ascension, cette énergie, indéniablement, est synchrone avec ma sensibilité profonde. Or, par la Volonté du Ciel alliée à celle des animateurs, le stage se déroulera le week-end de l’Ascension 1997 !!!
A présent j’essaie d’être Patience, si possible dans le Silence. Mais saurais-je jamais être silence ?
Un stage pour revivre
La Reconnaissance
Le centre de loisirs, décor plus moderne que le château du stage de 1993, se niche au creux d’une vallée, dans un parc récemment arboré, en un lieu qui respire la vie actuelle, qui transpire mon quotidien. Je logerai dans un des bungalows et partagerai la chambre avec une colocataire que je ne connais pas comme je ne connais aucun(e) des stagiaires. Les animateurs nous accueillent dans une banale salle de réunion. Les tables ont été associées en forme de U. Nous sommes dans un cadre similaire à nos salles de cours de BTS, tout est organisé pour favoriser les échanges. La tenue des participants est celle des enseignants de tous les jours exception faite de la mienne et de celle d’une ou deux autres personnes. Sur la feuille jointe à ma convention de stage, la tenue jogging était recommandée. L’obéissante n’a pas dérogé à cet ordre. Et là … les animateurs reconnaissent la mal-donne de ces consignes dans quelques uns de leurs envois dont le mien. Ainsi ai-je aggravé mon apparence à contre courant du paraître prof ou instit. Je suis là, en jogging, mes cheveux tirés se terminant par une queue de cheval, mon allure virago largement renforcée par les kilos en abus liés aux boulimies récentes et, à autour de moi des femmes soignant leur paraître … Complexe !
La banalité déroutante de ce début de stage cesse lorsque commencent les présentations, les échanges sur la façon d’aborder l’enseignement. Mes remises en cause sont distinguées, mes attitudes vérités, mon attention écoute, tout converge vers la reconnaissance par les animateurs, de mon approche pédagogique positive, approche reflétant mon évolution depuis 1993. Françoise et Gérard s’en étonnent et s’émerveillent à haute voix, devant le groupe. Cette reconnaissance de mon avancement sur le chemin par ceux-là même qui m’avaient donné l’outil, la fameuse serpe d’or, pour défricher, je l’attendais depuis 1993. Exprimée à haute voix, elle me certifie ce que je pressentais mais que je n’osais affirmer. Leur admiration, leurs compliments sincères me font un immense plaisir et arrêtent mes interrogations sur l’aboutisssements du premier stage.
Cependant, en simultané je m’effraye car les séquelles de l’éducation reçue ressurgissent. Je replonge dans mon travail sur l’orgueil révélé lors du premier chantier en août 1993. Ces compliments ne vont-ils pas me conduire à trop valoriser la fillette en moi, ne risquent-ils pas de développer son orgueil, et surtout d’humilier les autres autour de moi qui ne bénéficient point de tels compliments ?
J’ai l’impression -je suis certaine qu’elle est erronnée- d’être la seule du groupe si douée (!!!) et cela change intérieurement mon attitude. Je me ressens douée pour la quête de la Connaissance que nous menons ici, avec ces animateurs-là. Je ressens une soif de poursuivre ce chemin parce qu’enfin je me sens vivre. Pourtant je reste encore dans l’incapacité de nommer ce ressenti « Confiance en Moi ».
Le contrat de survie
Et la richesse de ce stage est bien dans cette relation à la vie. Certes je viens d’être valorisée par le regard de ces autres que j’écoute, mais ils me donnent plus encore en me faisant découvrir mon contrat de survie.
Chaque être humain signe, en son for intérieur, avec ou sans conscience, à la date qui se propose à lui, dans sa petite enfance ou avant ou après, peu importe, le contrat qui lui permettra de survivre après avoir quitté le refuge du ventre maternel. Les termes et la période de signature de mon contrat commencent à se révéler ce mois de mai, j’en discerne clairement des lignes.
Ainsi, petite fille je me suis convaincue de pouvoir être aimée, si et seulement si, je devenais aussi forte, solide, nette que père. Alors, j’ai décidé la mise en retrait de mon féminin et j’ai commencé à monter sur le devant de la scène de ma vie, ma part de masculin, j’ai commencé à dessiner mon personnage de virago. Dans le plus grand secret je signais cet engagement. J’ai souvent rêvé d’une maison refuge, superbement belle à l’intérieur, mais si banale, si peu attractive à l’extérieur que peu de gens cherchaient à la visiter. Un isolement idéal pour cacher un secret. Un isolement que ma demeure corps cultivait dans ma vie quotidienne ces dernières années en particulier, que ma tenue décalée entérinait ici même dans ce stage. Ce contrat ne concernait que moi et ne demandait aucune publicité. Sa mise en oeuvre favoriserait assurément la reconnaissance de moi par l’autre, qu’il soit ma mère et/ou les autres dont je quêterai l’amour. N’en déplaise, le secret ronge, du moins ce qui le cache, l’enveloppe. La façade de ma demeure ne m’a guère aidée et m’a conduit à des victoires amères, de ces victoires où l’autre reconnaît l’acte accompli mais point les valeurs cachées de l’actrice.
Et le stage m’ouvre à voir cela. Et le stage me conduit à quitter le secret, à m’ouvrir à la Vie. Et le stage m’interroge sur le comment ouvrir sans heurter, sans agresser, sans violer l’autre qui ne me reconnaîtra plus ? Et ce stage fait voltiger ma coquille protectrice, débute un nouveau chantier dans ma vie. Je vais à nouveau changer toutes les facettes de ma vie au quotidien, quitter l’apparence virago, redorer le blason de mon féminin extérieur, que le dehors égale le dedans de ma demeure, à la maison comme dans mon métier d’enseignante. Mon travail intérieur sera intense. Les nouvelles approches, les actions à mettre en oeuvre seront nombreuses.
Pourtant dans l’immédiat de sortie de stage, soudain, je baisse les bras, je n’arrive pas à me retouver. Où suis-je ? Tout a bougé si fort, si brutalement, si bruyamment. J’ai tant appris et rien ne semble être resté en moi. J’ai l’impression du vide total.
Le rêve de fin de contrat de survie
La nuit qui suit le stage imprime en moi un rêve marquant. Au réveil de ce 12 mai 1997, un rêve me porte, me transporte aussi puissamment que le voyage avec Aigle le fit en fin du premier stage, mais cette fois la relation à cette profonde part de Moi s’opère dans mon lit, de nuit, dans ma demeure.
Je vais dans la Capitale avec mon fils.
Qu’allons-nous faire ?
Allons-nous aller au cinéma ? Oui, mais mon mari ne viendra pas voir le film projeté : « Shéherazade »
Le personnage principal du film est un jeune prince maure, aux traits fins mais au nez épaté, aux narines larges et poilues.
Je suis ce prince, et la transformation vient de démarrer sur mon visage. Qu’est-ce que je deviens ?
– Un personnage laid ?
– Non!
– Un lion, un vieux lion fatigué ?
– Non!
La plastique de mon visage se construit et la lionne nait.
Le transformateur dont on ne voit que les deux mains, avait dit que doit exister la tâche blanche sur l’oreille gauche.
Frère et mère sont dans la grotte, proches du lieu où, sur la couche, lion/lionne est couché.
« Venez aider père ! » Mais ils refusent tous deux, ils sont transformateurs, ils veulent la tâche blanche,
ils ne la voient pas, ils laissent choir leur quête et se retirent.
La lionne se lève : douceur, force, majesté, on distingue une tâche blanche sous le bord de l’oreille gauche.
Lionne vivait dans le noir, avec les autres membres de la famille réunis autour du feu, du foyer.
Ils vivaient dans l’ombre, ne voyaient que des reflets des flammes dansant sur les murs.
Elle sort de la grotte. Elle se dirige vers la lumière.
La grotte est au sommet de la montagne, alentours l’air est pureté
le regard ne rencontre que pureté.
Je suis avec l’aigle volant.
Au réveil c’est merveille ! Mais, je désire affiner cette émotion, ce ressenti, mieux comprendre le sens de ce message onirique. Au risque de quitter cette impression d’exaltation, de transport de moi, je feuillette le dictionnaire des symboles.
Dans cette Capitale, telle Paris la ville riche et formatrice qui m’a tant donné culturellement et professionnellement, je suis avec mon fils, mon côté enfant yang intérieur. Je suis non accompagnée par l’ époux, sans doute n’a-t-il pas, ou plus, à jouer de rôle dans mes choix. Nous allons au cinéma à la rencontre de « Shéherazade », la princesse des « mille et une nuits ». C’est le mirage, l’illusion de l’Orient dans toute sa splendeur que je vais rencontrer. Le prince maure, héros de la belle, c’est moi. Maure, dans la langue des oiseaux raisonne comme « mort ». Ce prince, le côté virago de petit fille serait-il mort. Prince a un nez -symbole de clairvoyance, de discernement- épaté ou encore dit camus ou « qu’ a mu » si l’on joue encore avec la langue des oiseaux. Prince peut se servir de sa pilosité, signe de perspicacité, d’intuition, pour voir différemment la vie, discerner mieux vers où diriger sa vie.
Les deux mains du transformateur, celles de Gérard ostéopathe et animateur de ce stage, travaillent la plastique, la beauté des formes de son visage. Le visage est la partie du corps la plus vivante et la plus sensible que bon gré mal gré on présente à autrui, il est le moi intime partiellement dénudé, infiniment plus révélateur que tout le reste du corps, il est le symbole de ce qu’il y a de divin en l’homme, il est la façade de ma demeure que ces mains vont modifier. Dans un premier temps le visage de prince maure-mort devient lion. L’énergie de mon signe solaire, énergie psychique puissante, impétueuse, indomptée, que l’on peut assimiler à l’Animus négatif, à l’image fixée par le père dans le psychisme féminin, est dans la gueule de ce vieux lion, la même gueule que la virago, et elle se manifeste, s’est manifestée avant ce stage, avant que les deux mains du transformateur ne la rendent lionne. Lionne montre le signe attendu sur son oreille gauche, fixé par la couleur blanche, couleur de passage par lequel s’opère les mutations de l’Être. En 1993, l’accident a porté sur l’oreille droite de ma petite fille, maintenant il est temps de grandir à gauche, côté féminin du corps, côté de l’écoute du langage de l’inconscient de ce qui est nécessaire à mon évolution de lionne. S’ajoute à ces êtres ô combien parlant à mon ressenti, à mon émotionnel, la symbolique de la caverne de Platon. Je retrouve en ce lieu le contexte parfait de la signature de mon contrat de survie. Père absent pour cause professionnelle, mère, frère et moi vivant en osmose dans notre demeure, durant les premières années de ma vie, sommes enchaînés à notre caverne, avons toujours vécu ainsi et n’avons jamais su aller près de l’entrée. Pour nous la « réalité », ou plus exactement notre conscience de la réalité, se réduit à des ombres bougeant sur le mur et des bruits qui les accompagnent et principalement aux peurs et émotions maternelles.
En 1993, via le premier stage de Gérard et Françoise, moi, prisonnière de cette caverne, je me suis arrachée à ma captivité pour être amenée à la surface. Autant j’ai été surprise, enthousiasmée par mon vol avec Aigle, autant j’ai commencé à me sentir « agressée » par cette nouvelle vision de la réalité qu’il générait en moi, éblouie par sa trop forte clarté, craignant qu’elle ne soit sectaire, m’éloignant d’elle et de Lui-Aigle. Pourtant, à force de mieux vivre, durant ces quatre dernières années écoulées, je m’accoutume. Et par ce nouveau stage, en haut de la montagne, j’accepte de sortir de la caverne une nouvelle fois, de quitter cette partie de la famille qui s’y perd en inconscience du réel. Sur le pas de porte de l’antre, l’air que je respire est pur, le soleil est merveille, la reconnaissance présente de Gérard et Françoise m’assure. Confirmée dans la justesse de ma nouvelle perception, je comprends mieux ce que je vivais en captivité. Je n’envie plus ce vieil univers souterrain et mes anciennes illusions. C’est une étrange découverte. Je peux, à présent, diriger mes pas vers le deuil de la perfection, de la reconnaissance de l’autre puisque je viens d’atteindre celle que j’attendais en m’inscrivant à ce stage.
Premiers pas de sortie de stage
Le pas suivant ne se fera plus sur un chemin praticable
le chemin s’arrête ici.
Il n’y a même pas d’eau où poser vos pieds.
C’EST LE PREMIER PAS DE L’ENFANT
Défense de regarder derrière !
Et si vous avez vraiment la foi, le chemin impraticable portera vos pas :
CEST LA NOUVELLE TERRE.
Mais prenez garde, même la foi ne vous aidera pas,
si vous emportez avec vous quoi que ce soit d’ancien !
Dialogue avec l’Ange page 122
La sortie de la grotte sombre pour rencontrer le plein soleil, m’ éblouit. Je déborde de joie. Je suis dans une autre dimension, elle est indéfinie. Quelle diffusion ! J’ai l’impression d’être un diffuseur de parfum ! Fou !!! Je veille cependant, à alléger, à trouver le geste juste, car lorsqu’une diffusion est trop forte tout peut s’alourdir. Et je danse. Un pied revient vers l’intérieur de la caverne. Quelque part il se laisse happer par ma peur de les abandonner. Un pied me dirige dehors, vers le nouvel espace où je pourrais assouvir ma soif de liberté. Ici, en haut de ce sommet de montagne où me laisse mon voyage onirique, où m’ a abandonné le stage achevé, la seule route à suivre est descente vers la vallée, vers mon incarnation consciente, réelle. Je dois mettre fin à une quelconque idée de montée puisque je suis déjà au sommet de la montagne. Ne pas créer d’illusion nouvelle, il ne saurait être question de voler plus haut, je m’envolerai vers l’irréel. Le chemin est celui de l’ Être dans la vie réelle, au quotidien, celui d’une resdescente dans la vallée où m’attends Ma Vie.
Superstructure porte-avions se traîne,
je devine l’eau,
je sens les vibrations de ma canne plongée en elle,
mais Dieu que me manque un contact …
Ô que j’ai soif du contact de ma main
glissant au fil de l’eau …
Ma barque axée sur son rail rigide,
ne m’offre plus l’étourdissement comme le fit manège,
mais comme j’ai envie de quitter cette si lourde
superstructure porte-avions …
« J’entends » se meut en « je suis à j’écoute »,. « je passe devant vous sans un regard » devient « j’arrive, je sens, je suis présente ». Les rideaux se lèvent sur mes leurres. Je suis portée par le jeu d’application des conseils du stage et je découvre ma démesure. Des chauds et froids alternent et dureront tout le temps que le nouveau climat qui s’installe en moi se pose. Mes nuits, je suis émotion et orgueil mélés. Mes jours, je ne prie plus avec la même foi, ma peur de l’Au-Delà a diminué tandis que montait ma confiance en moi. Subsiste la peur de mes nouveaux changement de repères, je ne visualise plus aucuns d’eux, ni les vieux, ni les nouveaux. Je suis en attente patiente que tout se repositionne. Je quitte ce stage assurée, rassurée, plus forte que jamais, mais effrayée parce que la douteuse en moi, celle jamais reconnue pour elle-même, laisse de temps à autre remonter ses doutes, s’inquiète : ne se leurre-t-elle pas ? Je sens mon identification à ma forme physique prête à se mettre en nouvel ordre, l’étincelle est là, une de ces étincelles qui ouvrent à l’espérance, qui maintient la Foi mais qui ne peut pas encore maintenir, allumer un grand feu de joie. Je suis homme de Cromagnon en train de découvrir comment le feu se fait par soi, avec Soi, en soi.
Les premiers pas après staqge dans ma vie professionnelle sont belle remise en place de moi. Je croyais ne pas sacraliser, je croyais ne pas rechercher la domination, je me bluffais ? Quel bluff !
Dans une rencontre avec des étudiants je me laisse piéger par ma sacralisation du pouvoir. Je crois être reconnue comme la « plus… » que les étudiants invitent au repas de fin d’année. Avant le stage de Gérard et Françoise j’aurai refusé l’invitation, là je ne cherche nulle excuse pour ne pas l’honorer, je réponds « oui », j’accepte ce compliment que mental pense soustendre une telle invitation ! La phrase de l’étudiant qui suit mon oui, tombe » Ce repas vous préférez le payer quand, au restaurant ou maintenant ? ». Quels vieux repères éducatifs avais-je en tête ? Quelle vieille image du respect de l’enseignant tournait en moi ? Descente en chute libre dans la réalité estudiantine du moment !!! Pourquoi mon repas n’a-t-il pas été payé par les étudiants comme au temps jadis lorsqu’on invitait les profs. Le piedestal est tombé et je suis révoltée de n’avoir pas été plus reconnue, alors, de remarquable je deviens prof-caricature d’une dominante outrée. Deux mots secs, puis je retrouve mes esprits …
Leçon de vie ! Le chemin sera long. Je voulais quitter la superstructure porte-avions mais le rail est, assurément, encore ma route jusqu’à ce que ma barque devienne capable de s’alléger pour s’envoyer en l’air … -que dis-je ?- pour s’envoyer, plouf, en l’eau, seule sans que les autres la bloquent, ces autres qui me montrent du doigt tous les manques qui sont avant qu’elle ne soit libérée de superstructure, de mes principes, de mon éducation, de mes vieux modèles ..
CHAPITRE 3 : A COEUR D' »U »-RAIL
Naître à la rotondité d' »U
De barque à superstructure porte-avions,
de mon corps à mon couple embarqué là,
tout s’alourdit,
et,
la glisse de barque se ralentit …
… son inclinaison diffuse dans toutes les cellules de mon corps. Nous abordons ensemble le changement directionnel de rail et j’éprouve vivement l’arrondi de son « U ». Mon ressenti ne saurait être matérialisé par quelque vision de moi en déplacement sur rail, je n’ai point le recul suffisant en cette fin de printemps 1997 pour imaginer ce lieu, cette superstructure porte-avions, ma position au milieu de cet océan, mais par contre, mon nez dans la barre à roue de barque, je vis tout cela en mon corps. Par échos les mouvements de barque me traversent et, c’est une évidence, en cet instant barque m’entraîne vers cet arrondi d' »U » qui s’éclaire pour elle tandis qu’il m’assombrit.
Car arrondi d' »U »,
toi à portée de barque,
toi si proche de moi,
tu me stresses,
tu m’affoles.
Ô courbe d' »U »,
tu figures si bellement
le symbole du féminin,
que tu me renvoies
à mon féminin présent.
Je le sens,
féminin en moi
pousse hors de barque,
éjecte hors de moi,
lentement,
en douceur,
mais ô combien fermement,
les vieux pans de virago encore accrochés à mon être,
et je me perds dans ce vide qui vient …
Depuis la fin du stage,
cela déborde
et je ne sais
ni pourquoi,
ni comment.
Ô mamelon d' »U »,
combien me voici,
à ton approche,
mal installée en barque,
combien j’y suis secouée …
Fuir est-il ma solution ?
Puis-je m’éloigner de toi ?
Je n’attends pas ta réponse,
je ne puis encore l’entendre,
je prends mes jambes à mon cou et je fuis,
je fuis tout,
je fuis les autres,
je me fuis
et
je Me fuis.
Les aides pour ma dérobade sont à portée de moi. Il est si facile de laisser les journées overdose-boulot s’enchaîner. Il est si simple d’alterner les longues présences au lycée pour remplir les formalités de fin d’année, préparer la prochaine rentrée et les visites en entreprises des étudiants stagiaires. Toutes ces activités m’éloignent de la maison et des moments de calme qui me confronteraient à moi-même, car là est ma vérité profonde : je veux éviter mental, son nouveau regard sur ma vie, son cortège d’interrogations. A ce rythme, fatigue et déséquilibre intérieur coopèrent, l’instabilité de barque se déploie en moi. Si, lors du stage de l’Ascension, la puissante reconnaissance des formateurs ne pouvait que générer ma propre reconnaissance de ce féminin si longtemps mis en latence au profond de moi, elle est aussi, revers d’une si merveilleuse médaille, la source de ma névrose présente.
Ô combien je suis colère de n’avoir su raviver plus tôt mon féminin, de l’avoir occulté si longtemps. Pourquoi ai-je agi de la sorte ? Après cinq années de sagesse sans elles, les cigarettes redeviennent une valeur refuge : j’aspire abusivement, sans pitié pour mes poumons, je laisse s’envoler en fumée sans attention pour l’air, indifférente à ce et ceux qui m’entourent, un paquet de blondes si ce n’est plus, tous les deux jours. Ainsi, sans réponse à ma question obsessionnelle, sans compréhension de moi, de faux-fuyants en faux prétextes, j’atteins l’overdose-fumerie et tout en moi devient faim d’ogre.
Quand le travail du Lycée ralentit son mode échappatoire, je dévore des romans. Je me noie tout particulièrement dans la lecture du « Passeur de lumière » de Bernard Tirtiaux. Chère Âme, à travers mon propre vitrail j’ai tant de mal à découvrir mes lumières nouvelles que je ne peux que m’émerveiller de la quête de ce vitrier passeur de Lumière qui anime ce roman. Je me compare à lui, je me juge et je me désespère d’être si piètre chercheuse.
Folie jugement m’éloigne de Moi, et, en vertu de la logique de La Vie, fait naître en mon corps une allergie. Je n’avais jamais fréquenté d’allergie et celle-ci débute avec fracas. Son oeuvre en moi, ce printemps-là opère via mon nez qui se perd en éternuements nombreux et fatigants et mes yeux qui souffrent des overdoses du soleil et du pollen. L’éclat de la renaissance de la Nature est devenu douleur en mon corps. Renaître à ma vie est si difficile que je ne parviens pas à vivre la renaissance des autres, et particulièrement celle de la Terre qui me porte.
Désorientée, ou plus justement dit, réorientée en ce point particulier de « U », je n’ai pas le courage d’accepter au fond de moi le nouveau chemin. Mon intuition dominante est certitude d’être en train de revivre un état de rupture fusionnelle. Je me libère de son souvenir pour entrer dans la phase initiale d’un voyage héroïque dans les ténèbres, pour me/Me rencontrer, pour me/Me redécouvrir.
Ô Seigneur c’est trop !
Je sais que Tu ne nous donnes que ce que nous pouvons vivre mais, ce jour de début d’été 1997, je trouve cela lourd ! Lourd ! La structure en bois de barque paraît aussi pesante que puissante. Grâce à elle, nous avons glissé rapidement, en toute sécurité, sur le premier jambage de « U », mais ce virage qui vient est si différent, si arrondi, si fragilisant ! Comment allons-nous le négocier barque et moi ? Ce ne peut plus être nous … Du changement pour virago en moi naîtra changement pour matière en barque … Toutes deux nous devons devenir autres …
Un couple plus harmonieux monte en nouvelle barque.
Barque est toujours de bois,
barque glisse toujours sur rail,
mais féminin et masculin ont changé,
ils manouvrent conjointement,
la barre à roue de barque …
Dans ce virage d' »U » tellement particulier, nouvelle barque est sollicitée dans sa douceur, sa conscience et son Amour.
Car virage d' »U » est totalement étranger à la masse des virages récurrents de manège. Ces vieux tournoiements de manège, transporteurs fous, faisaient des tours sur eux-mêmes, faisaient tourner ma tête, me saoulaient à ne plus savoir qui j’étais, à me plonger dans l’inconscience, à m’y perdre …
Car virage d' »U » n’est plus un virage victoire, ni un virage de fin de guerre, ni même un virage en « V » à l’angle abrupt lançant un changement de route dans un orage fracassant, provocant quelque choc de rocher contre un autre rocher tel celui que je vécus en 1992 …
Car virage ‘ »U » se dessine avec une plume d’oiseau, une plume légère, caressante, délicate qui offre à l’Être en quête d’harmonie, Réconfort et Joie.
Car ce virage d' »U » est virage de reconnaissance en barque de féminin délaissé, du féminin imaginé inapte à être vécu par ma petite fille effrayée des inégalités garçon/fille, homme/femme. Ma petite fille, dans ce temps panique de la toute petite enfance, a cru solutionner les injustices en bannissait robes et allures trop féminines, en se masculinisant, en associant port de pantalon à liberté. Liberté dans ses mouvements, liberté dans ses sauts, liberté pour passer outre les exigences paternelles de retenue, de « serré-les-jambes », d’une veille permanente, paralysante de son assise en public. Que n’a-t-elle su voir qu’un féminin rendu invisible par le pouvoir de sa virago impérative, écrasante, allait étrangler son Être, allait la rétrécir ?
La descente du premier jambage de « U » a réveillé féminin en moi. Féminin murmure sa présence, recommence à prendre chair en mon corps, balbutie, soupire, pour être reconnu par les autres et, surtout, par moi-même. Féminin enfin désiré par moi, féminin visible s’associe à ma petite fille en perte de rébellion, féminin exige pour son approche, pour son retour dans ma vie, mon changement de stratégie.
Virer de bord,
prendre ce virage d »U »,
épouser la nouvelle route
exige la fin des coups secs sur volant .
Virer de bord,
prendre ce virage d »U »,
épouser la nouvelle route
se conjugue avec
une conduite douce,
une conduite Amour,
une conduite ouverture sur la nouveauté,
une conduite jouissive du moment présent.
Je cohabite avec l’époux,
nous sommes masculin et féminin associés en barque.
Mes meubles d’accueil pour cette femme en moi si longtemps reniée, doivent être débarrassés de la poussière que j’ai accumulée depuis que je l’ai chassée de ma vie. Un souffle douceur, vent de tendresse, bise d’amour sort de ma bouche. J’ouvre. Je m’évertue à loger en moi des rondeurs. Virago est en train de céder sa place. Mais j’hoquète encore.
Féminin ne peut prendre la main car virago a pris l’habitude de mener toutes les actions. Certes, virago est d’accord pour céder la place à la femme en moi, mais pour l’aider à la prendre elle est pure maladresse, elle n’agit que comme elle sait le faire en pure action à la virago. Elle est vaisseau plutôt que barque, elle est vaisseau fonceur sur une superstructure porte-avions !
Cela me rapproche plus près d’un déguisement que de ma réalité au féminin . C’est pourtant le seul chemin que je sais emprunter pour me rejoindre.
Soudain virago s’affole? C’est la débandade. Elle s’écrit : « Nouvelles approches maladroites, empreintes de ma vieille enveloppe, de mon accoutumance aux angles aigus, je ne veux plus vous garder, je vais vous jeter. »
Ô Douce belle,
ne vois-tu pas qu’en agissant de la sorte,
tu replonges dans le masculin, le guerrier, le lutteur,
et que ta douceur redevient bagarre ?
Virago a rouillé tes rotules, belle douce,
elle agit encore,
vois ,
elle change ton look en croyant naïvement te quitter.
Elle te fait faire des régimes,
tu perds dix kilos,
tes rondeurs superflues,
tu t’en réjouis
mais elle t’invite à en créer d’autres,
capillaires,
chez son figaro.
La permanente avec ses boucles factices
au prix d’une agressivité ammoniaquée,
d’une longue patience,
d’une traversée chaleur sous un casque bruyant,
de tiraillements de ton cuir chevelu par des rouleaux meurtrissant, t’invente une souplesse capillaire.
Tu te crois libérée de ton vieux modèle …
Mais alors dis-moi : pourquoi fais-tu demi-tour ? Pourquoi reviens-tu dans la caverne ? Pour embrasser Mère castratrice coincée dans le fond de ton lieu d’enfance ? Pour qu’elle admire ton nouveau look ? Une part d’elle a été ravie puisque petite fille se rapproche de ce qu’elle souhaitait pour elle au plus profond d’elle-même. Mais dans l’obscurité de la caverne il n’y a pas de Lumière. Douche en chaud et froid alterné, rejet et reconnaissance alterné s’abattent sur toi. Certes elle a reconnu ton amincissement mais elle relevé que subsistait ta forte poitrine, et que jamais tu ne pourras la perdre !!! Refus de tes formes féminines, de ta douceur féminine naissante. Elle met un frein à cette LIBERTE toute neuve que tu commençais à respirer l’air à pleins poumons, en haut de la montagne.
Pourquoi as-tu eu besoin de son assentiment ? Autour de moi, ceux qui ne sont pas de la caverne familiale, s’étonne et s’émerveille de mes changements. Pourquoi ne sais-je m’en contenter ? J’insiste et entre dans une nouvelle quête de leur reconnaissance. Il faut que je leur montre mieux encore mes rondeurs. Si je changeais ma signature, si je lui enlevais les aigus propres à virago ? Je passe des heures, j’use des feuilles à arrondir ma signature, et … au premier chèque à signer, mon vieux paraphe réapparait …
OK ! Je quitte ma volonté abusive de changement, c’est elle qui devient roideur en vérité.
Quoi que je fasse
qui que ce soit qui tienne le volant sur barque,
le rail suit sa route,
barque épouse le chemin qu’il lui donne.
A quoi me sert le volant ?
Où est ma part de libre arbitre ?
Qui m’a parachutée sur cette superstructure ?
Par quel miracle suis-je embarquée dans cette barque ?
Qui a choisi mon compagnon de route ?
Oui vraiment quel est mon pouvoir dans tout ce changement ? Qui fait quoi de ma vie ? Mère ?
Je reste souffle coupé le jour de cet été 97 où je cherchais encore une fois une reconnaissance de quoi ? De qui ? De moi femme nouvelle ? De virago ? Ou tout simplement de petite fille qui ne sait plus où elle va et qui voudrait l’aide de maman ?
Elle me parle de ses prières pour que je puisse me transformer. Elle relève son émerveillement dans la force de ses prières pour changer les autres.
Ô maman ! Tu as en toi, ta propre petite fille qui ne sait répondre à la mienne qu’en sapant ma foi en mon idée d’un quelconque rôle que je pourrais jouer sur le cours de ma vie. Si toi Mère tu ne peux m’aider, qui le fera ?
Nous, point minuscule dans l’Univers, point Mouvant, aussi agité que le grain de poussière qui danse dans le rai de lumière, sommes point de convergence de multiples rayons, d’Êtres, d’Etoiles, de Planètes qui nous offrent leur énergie, leur éclairage pour nous créer, nous dé-créer, nous recréer, pour nous permettre de croître de l’homme vers l’Homme .
Il nous est facile de croire en l’impact sur nos vies de certaines planètes ou luminaires, tel le soleil réchauffant, éclairant, telle la lune tirant et poussant les marées. Peu d’humains refusent de reconnaître leurs poids, mais plus rares sont ceux qui acceptent l’impact sur soi d’Uranus ou de Neptune, de Jupiter ou de Saturne, de Mars que de Vénus …
Le jour où j’ai accepté que ma colocataire du stage, astrologue par passion dont je partageais des idées sur la force de guru-vie, monte mon thème astral, je ne savais pas où je m’aventurais. Son étude pour mon 51° anniversaire, sur une cinquantaine de pages manuscrites, me révèle mon être au travers des étoiles .
Je suis bouleversée. Qu’ais-je encore à faire puisque tout est écrit ?
Je suis tellement désarmée devant tout ce que la lecture de mon thème me révèle de ma vie sans confidence particulière de ma part à l’astrologue qui le transcrit, que très vite j’en viens à lui donner pouvoir, à lui demander de guider mes actes au regard de l’influence des planètes qu’elle sait lire. Je vis dans cette dépendance deux années, jusqu’à ce qu’elle se lasse, qu’elle se défasse de son rôle abusif, qu’elle m’abandonne et que moi Pinocchio comprenne qu’il est temps de quitter ma marionnette astrologique pour redevenir responsable de ma vie, sans quête de bouc émissaire astral.
Néanmoins, cette écriture des lignes de ma vie dans les étoiles m’a intriguée. J’ai recherché d’autres témoignages du poids de La Création sur ma vie, sur mon Être. J’ai fouillé dans la numérologie. J’ai fait étudier mon thème par un numérologue. Il a confirmé le portrait de moi lancé par l’astrologue. Je reste ébaubie quand il me parle de ma traversée de phases de vie qui aboutissent à ce chemin sur jambage de « U ». Il découvre dans mon portrait numérologique le poids de ma mère. Je ressens d’autant plus son pouvoir qu’elle a, en cette période, prié le ciel de me transformer à l’image idyllique qu’elle s’est créée de moi. Il me parle aussi de la superstructure autoritaire du père, des traversées de ses guerres d’autorité, et de ce modèle de solidité qu’il représente pour ma petite fille. Je m’ étonne qu’il puisse lire tout cela au travers de ma date de naissance et de mes nom et prénoms de naissance.
Je décide de prendre quelques cours d’astrologie. Je veux mieux comprendre, en tout cas suffisamment pour suivre les transits des planètes sur leur positionnement à ma naissance dans mon thème. J’acquiers des livres, m’y plonge, reconnais des planètes, rencontre livresque d’autres astrologues dont Liz Green. Je sais traduire ma révolution solaire, rien que pour me suivre, voir les grandes lignes que me souffle guru-vie, et après avoir lu, me vivre en responsable de mes actes. Mon travail d’astrologie est très limité. Je me contente, lors du passage de planètes rétrogrades sur mon thème d’aller lire dans mon journal les évènements, le travail émotionnel, qui furent le jour du premier passage de la dite planète. L’astrologie me permet de me rencontrer, de mesurer aussi mes changements comportementaux, de me faire du bien, de m’étonner des synchronicités évènementielles qu’elle révèle. L’astrologie seule ne créerait guère d’effets en moi s’il n’y avait mon journal témoin des évènements clefs de ma vie.
Juste au moment de la tempête de cette fin de siècle, à l’astrologie confirmée pas la numérologie, par les tarots que m’évoque une amie, par des jeux de cartes « Symbolon » , j’ajoute des massages corporels que je reçois. Massage-message et surtout massage-libération de tensions, de stress et mon corps riche en fermetures dorsales, empli de pleurs retenus s’ouvre.
Je m’ouvre et j’ouvre la porte à l’arrondi d »U ».
En ces temps-là, mon féminin sous forme de frisette, de signature en arrondi, de maquillage, de talons aiguilles, de miel dans ma voix parait encore bien fragile mais mon féminin ouverture, foi, confiance, amour des choses de la vie et des êtres de la vie, est en plein expansion. Virago n’avait pu tout refermer et son départ accepté permet de réouvrir grandes les portes. En cette fin de XX°siècle je prépare mon voyage en arrondi d' »U », et ce virage est un virage plein de surprises …
Troisième partie : « U » L’OUVERTURE VERS L’OCEAN
CHAPITRE 1 : L’EMPIRE ECLATE
La rouille commence à attaquer la tôle de vieux porte-avions,
combien de temps résistera-t-il aux assauts de l’eau salée ?
Comment l’entretenir ?
Veux-je l’entretenir ?
Pourquoi l’entretenir ?
Vieux porte-avions superstructure, vieux porte-avions à l’ossature bâtie par l’armateur « Grande-Famille » à coups de principes éducatifs dégotés en cette morale judéo-chrétienne dans laquelle baignent, depuis moultes générations, mes ancêtres, s’offre à moi, mélange d’ouverture et de fermeture au ciel, amalgame de foi et de mille peurs d’être mangé par l’autre gravés dans les gènes des hommes et femmes de ma lignée. Au fur et à mesure que s’est égarée la foi en l’Eglise dans mon environnement familial, durant ce XX°siècle, l’ossature de mon vieux porte-avions est devenue bancale. Abus de peurs, création permanente de nouvelles peurs ont alimenté son illusion de se maintenir en vie. Car qu’est sa superstructure bâtie sur les peurs sinon un mirage de superstructure aujourd’hui en train de rouiller et de s’auto-détruire.
En somme, je vis à bord de mon Titanic et il vient de recevoir deux chocs mortels via les stages de Gérard et Françoise. Ayant vécu en conscience ces chocs, j’ai compris l’urgence de me préoccuper peu de vieux porte-avions et de me concentrer sur les renforcements de ma barque, de mon corps, de moi. J’hésite à abandonner superstructure, pourtant je dois me préparer à l’abandonner car, demain, quand coupée en deux sa carcasse sombrera, seuls ma barque, peut-être, et mon corps, assurément, navigueront avec moi sur l’océan …
Réfection de barque, réfection de mon corps
Bien positionnée dans barque, je suis pêcheur.
Voici que monte, le long de mon bras, une vibration.
Au bout de ma ligne, j’ai ferré une prise.
Lentement, je remonte le fil …
En solitaire la pratique du yoga alliée aux ballades à vélo, aux marches, aux travaux ménagers, au jardinage, ne me permettent pas d’atteindre les zones d’ombre qui barrent ma joie … j’ai besoin d’aide pour me dénouer.
Ce matin, comme nombre de matins de ces années 1999, 2000, 2001, à peine entrée, l’envie d’abandonner, de dire « je pars », me tenaille. Pourtant, je me retrouve allongée sur la table de travail de Corinne Devillards. Massée par elle en profondeur, particulièrement en ce dos si parlant, je me demande l’utilité de ce massage, j’ai tant pleuré hier qu’il ne doit plus rester d’eaux en moi, et surtout je m’inquiète du trop abus de ce travail de l’autre sur mon corps … j’ai si mal au milieu de mon dos. Déchirement !
La peau de mon dos une nouvelle fois grince … et je suis renvoyée à mon passé. Je renoue avec la petite fille de mes trois ans, je pleure devant la glace, j’entends les mots de maman « vois comment tu es laide quand tu pleures ! »… Je suis ma petite fille côté ombre, côté froid de la maison de mon enfance, là où, loin de la protection maternelle, je suis agressée par l’autre. Je remonte le temps jusqu’au souvenir de l’érable, de la rencontre d’un fol épi d’herbe avec mon oeil droit sur bousculade jalousie du frère … et j’atteins cette non écoute maternelle de ma douleur, son abandon de moi petite fille pleureuse à la limite de la perte de cet oeil. Toutes ces douleurs se bousculent en mon dos sur sa table de travail : « Ô Corinne, excusez-moi, pardonnez-moi, donnez-moi le droit de pleurer ! » Corinne a accepté. Sur la table de travail nous laissons aller ma petite fille intérieure, elle pleure ma douce, elle peut, enfin, pleurer.
De pleurs en pleurs, dans d’autres rencontres, pleurs de petite fille redeviennent pleurs de nouvelle-née … Ses pleurs-là aussi sont à expulser et s’accompagnent de ma colère. Cette colère change de cible, quitte celle de ma famille biologique pour rencontrer celle du Créateur de cette galère, de cette souffrance, pour attaquer Celui qui a organisé ma venue sur terre … alors que, personnellement, je n’avais jamais rien demandé !!! Cette colère m’emporte de la série de voyages-massages au pays des pleurs à la série de voyages-massages au pays des doutes : où suis-je ? Qui suis-je ? D’où je viens ? Où je vais ? Je ne sais plus rien. Je ne reconnais mon corps que dans sa douleur dorsale, je polarise sur mon être physique, je ne définis plus mon corps que par sa boutonnière-douleur dorsale qui écorche ma peau du niveau du coeur au niveau du plexus solaire.
Je suis contente de me faire masser, les pleurs libérés m’allégent, mais je suis désarçonnée aussi. Certains massages apaisent l’écorchée vive pour ne laisser qu’une douleur plus ordinaire et plus douce. D’autres massages animent mon corps souffrance, font ressortir des chocs aux chevilles, aux poignets, à la nuque, aux omoplates, sur le sternum et réveillent des pans de souvenirs en mental. Les histoires que je croyais anodines de mon enfance deviennent graves. Je les avais étouffées, je n’avais gardé que le souvenir de leur croûte, pis je n’avais placé en ma mémoire consciente que l’étiquette d’identification de cette croûte. J’avais intellectualisé l’histoire que je ne voulais plus toucher, la croûte que je ne voulais plus gratter croyant ainsi éluder ma souffrance. Les massages me plongent dans la relecture de l’étiquette, la manipulent si fortement que j’arrache un peu, voire beaucoup, de sa croûte et me font renaître en écorchée vive. Je continue les massages pour aller au plus profond de ma plaie, ôter son pus, la désinfecter pour qu’ensuite elle se referme et cicatrise réellement.
Naturellement, cette réfection de mon corps entraîne dans son sillage celle de mon esprit …
Réfection de mon esprit, innovation-coaching
Assise dans ma barque positionnée au bord de l’arrondi d' »U »,
je pilote les yeux rivés sur le rétro,
j’entrevois sur manège de vieilles barques qui tournent encore,
et sur premier jambage d' »U » je vois se glisser l’une d’elles …
A piloter en me polarisant sur le rétroviseur, en cet automne 1999 si proche de la tempête du siècle, une part de moi se manifeste qui ne vient ni du caroussel, ni de premier jambage d' »U ». Cette part de moi est, sans que j’en sois viscéralemenr consciente, déjà installée bien à l’avant de ma présente barque, mais mes yeux et mon mental en quête du passé sont incapables de la voir. Peu importe puisque son courant futuriste me propulse.
Dès la rentrée de septembre je lance l’opération coaching. Portée par les apports de gestion de groupe du stage de mai chez Françoise et Gérard, j’entraîne l’équipe pédagogique des BTS, nous sommes six enseignant(e)s, à coacher chacun(e) quatre à cinq étudiant(e)s, à les guider dans leurs choix professionnels, à les stimuler dans la préparation de l’examen, à les rencontrer à leur demande sinon au moins une fois tous les deux mois, et à les aider à résoudre leurs problèmes de formation. Surprise, ô surprise, cette initiative coaching me transforme en un Eole déclencheur de tempête. Avant même la fin de ce premier trimestre d’expérimentation, sort de l’eau le serpent de mer. L’attitude de chaque enseignant du démagogue au colérique -dont je suis-, les jeux de pouvoir sur les étudiant(e)s se dévoilent. Je remue avec mon outil coaching une fange « insulte et rabaissement des étudiant(e)s » à la mode « Bernard Tapie », fange générée par une enseignante-coach que l’on soupçonnait depuis longtemps, mais qui, révélée au grand jour, va m’obliger à une action dont l’impact dépassera largement ma vie professionnelle. A la demande des étudiants auprès de leurs coaches, auprès de moi coach, et sur invitation des autres coaches qui souhaitent que le coaching joue son rôle au-delà de simples rencontres individuelles avec les étudiant(e)s, moi l’initiatrice de ce nouveau fonctionnement de l’équipe je vais porter le coup décisif pour que cessent ces insultes.
Depuis le premier stage de Françoise et Gérard durant lequel Aigle est venu me chercher, « moi-la sauveur », dans notre relation de travail, j’ai mis en oeuvre le déboulonnage de la statue de petite dame en noir. Sur la scène du lycée, pendant plusieurs jours, je remonte jouer avec elle le rôle de « moi-la coupable » qui a l’impression de trahir l’autre si je l’oblige à quitter son jeu de rôle à la « Bernard Tapie », car c’est elle l’enseignante visée par l’opération coaching. Alors que je jouais depuis neuf années « moi-la sauveur » de petite dame en noir, voici que je l’abandonne au profit de ma petite fille intérieure, voici, que je choisis la Vérité au mensonge, que je libère « moi-la victime » après ces si nombreuses années de trahison de moi-même. Naturellement, la scène du lycée se fond doucement en scène de ma vie hors profession. Tout ne fait que se répéter, inlassablement, pour que j’entende le message que me crient les massages et que relance coaching : « il faut te recréer dans ce monde ».
Trop de rabaissement dans l’enfance pour sauver l’image de l’autre, pour créer l’illusion qu’il était « mieux » que moi, sont à fleur de ma peau émotionnelle, juste au niveau de ma « boutonnière dorsale »et je culpabilise de la peine de petite dame en noir, je réadopte le profil bas que mes éducateurs voulaient pour moi. Si les compliments pleuvent sur moi au Lycée pour avoir mis en oeuvre un outil d’aide positif pour les étudiant(e)s, la toile d’araignée collée à ma peau, celle de ma petite fille « la sauveur » avec ses fils ténus, m’emprisonne, m’interdit de me reconnaître un droit à ces compliments. L’orgueil jadis étouffé de ma petite fille est si grand qu’il m’amène à descendre en-dessous de l’humilité, à nier toute qualité reconnue par les autres pour moi. Coaching, outil de transformations des conditions de travail des étudiants et de l’équipe, devient outil de transformation de ma vie personnelle, éclaire la vedette : « moi-l’aveugle », « moi-la sourde », « moi-la coupable », « moi-la victime », « moi-la sauveur ». Comment ai-je pu vivre dans ce monde professionnel sans voir que, de tous temps, je rencontrais là mes modèles d’enfance déguisés sous des masques d’adultes intelligents, formateurs de jeunes ? L’outil coaching m’oblige à me redéfinir face à eux ici au lycée et par ondes porteuses jusqu’à coeur de ma vie privée. Le lycée se mute en nouveau ventre de ma mère et j’éprouve comme au moment de l’accouchement en 1946, la peur de venir au monde, l’envie de faire demi tour et le forcing mis en oeuvre par l’accoucheuse en son temps est remis en place par ma Vie …
Coaching m’oblige à cesser d’avoir peur de la non reconnaissance de l’autre, et par dessus tout à ne plus craindre la non reconnaissance de « l’Au-delà », ne plus craindre de ne savoir commettre l’acte juste. « Au-delà », je te confonds carrément avec les hommes, je n’arrive toujours pas à t’identifier. J’ai peur de mon ego qui peut se tromper. J’ai peur de l’injustice. Je vois l’injustice de l’autre, mais moi, suis-je juste ? Quand j’ai peur d’être mal vue, mal aimée, c’est par qui ? J’ai peur de quitter moi d’avant qui savait soutenir celle qui me mangeait, qui fermait ses oeillères pour ne plus voir moi éludant les doléances des élèves. J’ai peur de cette petite fille en moi qui défendait l’indéfendable, c’est à dire les autres membres de la fratrie, leurs crises abusives de domination, pour éviter la douleur de sanctions paternelles contre eux. Et moi petite fille dans tout çà où étais-je ?
Le chemin en pointillé
C’est avec le ciel que tu travailles sur terre,
arrête de regarder derrière toi
lance ta canne à pêche
tu es au plus près de l’océan
pêche !!!
Oublies mental !!!
Mon appel à l’aide quotidien, dans mon journal, est indéniable. Je tutoie l' »Au-delà ». Je pose une belle majuscule à ce « Tu » qui l’identifie et je l’implore chaque jour. Définir ce « Tu » est subtil. « Tu » est l’Au-delà jusqu’où Aigle m’a menée en août 1993. Parler à « Tu » c’est parler à mon Âme, à cette part de moi Mystère à laquelle je m’accroche quand je lance mes appels à l’Aide. Ce « Tu » agis vers moi, répond à mes questions quand je m’y attends le moins.
Un soir de quête de réponse à mes inquiètudes, j’ouvre au Hasard un livre de mandalas et je rencontre la réponse « dissoudre les rigidités ». Je m’émerveille ! Qui a entendu ma réponse ? Qui a guidé ma main pour ouvrir le livre à cette page ? Les soirs comme celui-là, je n’ai pas peur de mourir, j’aimerai presque mourir. S’efface ma peur de mourir de mes vieilles peurs parce que leurs morts me faciliteraient la vie et que ma libération d’elles ferait que « Tu » là-haut, Lui qui m’entend, m’aimerait plus. Mais dès dissolution de l’effet « réponse du Hasard », c’est ma peur de ne pas avoir peur qui s’implante, ma crainte obsessionnelle d’abandonner définitivement ma petite fille. Peurs ! Vous vous révélez à moi et vous vous amalgamez à mes confiances. Je sais ne pas avoir peur d’enseigner, ni peur des araignées, ni de chanter, ni de faire le clown en classe pour mieux imprégner les jeunes de ces cours que je leur donne et d’autres non-peurs existent encore … mais j’ai si PEUR d’aimer ma petite fille, si PEUR de m’engloutir avec elle dans notre propre piège d’enfance.
Mon chemin actuel n’est rien d’autre que la sortie de la spirale Bien, Mal, Dualité. Sortir de cette spirale s’est entrer dans l’inconnu où les repères ne sont plus. En ce nouveau lieu, il n’y a plus de haut ou de bas, il y a autre chose. Je sais que je suis en train de quitter cette coquille dualité même si elle est encore là sous moi. Cependant, même si elle me tente encore, il est trop tard ! J’ai crevé l’enveloppe et elle ne peut plus être la protectrice de mon non-grandir. Je dois accepter l’inchangeable. Je dois bouger et dire adieu à mon je-peureux, je-coincé dans la reconnaissance de l’autre. Cette nouvelle vie me paraît dure parce que, tout simplement, rien n’y est défini, parce que sa route n’est tracée qu’en pointillés. Je m’effraie de ce pointillé de ma route qui vient. Entre les points tomberais-je dans quelque abîme ? Nouvelle route longe encore la vieille ornière creusée par les autres, je fais parfois un écart comme si je voulais y retomber tout en ressentant qu’elle n’est plus le refuge, que ce n’est plus possible de la suivre à l’aveugle comme avant, que je n’en ai plus envie. Je suis en ouverture, je braque mes yeux sur la nouvelle route ouverte. Mon GPS est Reconnaissance mais plus n’importe quelle reconnaissance des autres autour de moi. Aujourd’hui, il s’agit de la Reconnaissance de mon Âme, de la Reconnaissance que seule moi consciente saura rencontrer. Bien sûr, les vieilles habitudes sont encore ancrées en moi, je tripote encore de temps à autre le vieux jouet de ma reconnaissance par les autres dans lequel se reflète mes souvenirs d’attachements qui faisaient vibrer ma corde émotionnelle, mais je le sens bien, il va bientôt devenir objet de musée.
Je sens partir l’insécurité. La Foi arrive. La Confiance, l’Amour de la Vie ont droit de s’exprimer. Tout ceci est cristal que je suis étonnée d’avoir à portée de mes mains, que je fuis de crainte de le casser, vers lequel je reviens par soif de lui. Je suis en train d’apprivoiser la beauté comme je le ferai d’une bête inconnue d’où mes peurs matérialisées en boulimie et fumerie de cigarettes, elles s’accrochent à moi et, en même temps, tout glisse vers le passé…
Je suis une monade aux milles facettes. Je ne sais les accueillir toutes ensemble. J’aime certaines d’entre elles mais elles sont souvent occultées par d’autres. Je ne sais polir les agressives, ni faire briller les plus douces. Je ne sais pas encore amener mes facettes à devenir reflets les unes des autres jusqu’à me créer monade d’Amour. Bousculade en moi des mots et maux d’enfance ! Le gars mieux que la fille, la liberté pour lui, les droits pour lui, et moi ? Me taire ! Faire silence ! Tu n’es qu’une fille, alors sagesse, travail dans la maison, (sauf si çà arrange qu’on travaille dehors), patience, obéissance, discipline, tout juste intelligence, travaux d’aiguille, peut être peinture, poésie mais pas musique ! Envie d’être un homme, envie de renier la femme en moi, d’adopter des allures de mec pour supplanter l’autre et … dans la stricte intimité … rêver d’être Soi. Aujourd’hui, j’ai envie de gifler cette facette de ma monade qui veut être homme, j’ai envie de faire briller ma facette « femme ». Je vois les traces qui ternissent celle-là, je vois en moi la facette de ma « femme libre toujours non libérée ».
Ma boulimie se déclenche dans l’exaspération quand je n’en peux plus de ne pas être ce que je voudrais être en quelques plans que ce soit. Je voudrais être mince pour plaire, pour me plaire eu égard au miroir de mon passé enfance. Je voudrais être forte, n’obéir qu’à moi-même et non être sous la pression de l’autre. Je voudrais être libre de la trilogie père, mère, frère. Je voudrais être aimée et reconnue par tous, universellement belle, bonne, brillante, sage, et tout et tout. Je voudrais en un mot être le génie faite femme pour compenser l’orgueil réprimé pendant mon enfance. Alors, loin de toute humilité j’éclate de l’envie d’être fière de moi, d’être vue par tous, ostensiblement vue par tous, comme vient de le faire Amélie Moresmo qui ose montrer à tous qu’elle est mec même si femme, pour enfin avoir droit au pouvoir accordé au seul mâle, pour conquérir cette force accordée au seul mâle.
Quoi que je fasse
qui que ce soit qui tienne le volant sur barque,
le rail suit sa route,
barque épouse le chemin qu’il lui donne.
A quoi me sert le volant ?
Où est ma part de libre arbitre ?
Qui m’a parachutée sur cette superstructure ?
Par quel miracle suis-je embarquée dans cette barque ?
Qui a choisi mon compagnon de route ?
27 janvier 2000, une dame en noir se place en première ligne, là, face à moi sur la feuille blanche, puis sous l’impulsion de pinceau, elle laisse entrer en scène une petite fille nue(peinture n°3 de la galerie de mavag) . Les mains et les pieds de la fillette sont atrophiés, pourtant elle pénètre dans une sacrée zone de turbulences que pinceau l’invite à traverser …
Je viens de rencontrer la peinture spontanée. Je me laisse guider dans son apprentissage par Marie Perret. C’est le premier jour de rencontre avec le bonheur de taire mental, premier jour de reliance avec Messager-Peinture … Ce jour-là, » mavag » commence à sortir de sa nuit, » mavag » crée la première peinture de sa longue série de peintures messagères …
CHAPITRE 2 : PREPARER LA QUETE
Vais-je suivre cette petite fille aux mains et pieds atrophiés ? (peinture n°3 de la galerie de mavag) . Sur ce chemin nouveau que j’emprunte en la suivant, je reconstruis les extrémités de mon corps. Il n’y a plus de connu, il n’y a que hasard et découverte du nouveau. Le chemin est un chemin d’aventure. La vérité de petite fille n’a plus rien à voir avec l’obéissance, le déni de son féminin ou celui de sa réalité. J’entre dans la quête de ma vérité personnelle. J’entre dans le monde où règne une très grande insécurité. Je n’ai plus droit de copier ces modèles au féminin que je rencontrai, qui me semblaient si forts, si porteurs de libération, telle que fut modèle, ces dernières années, petite dame en noir, telle que fut modèle, de toujours, ma mère biologique. Personne, à présent, ne pourra me garantir quoi que ce soit. Pourtant, en empruntant ce chemin, mes chances deviennent immenses pour que ma petite fille intérieure se crée, devienne créatrice, ancre ses pieds en Gaïa qui l’accueille avec tant d’ Amour, apprenne à s’aimer, apprenne à savoir aimer et parvienne à courir vers la Lumière.
Quelque chose de neuf s’offre à moi, quelque chose d’inconnu. Ce quelque chose exige mon ouverture, ma vulnérabilité, l’innocence de l’enfant que je fus avant que je ne construise mes blocages. Je dois retrouver ma petite fille pour continuer le circuit sur paquebot jusqu’à quitter « U », jusqu’à atteindre l’océan au-delà de paquebot, jusqu’à laisser libre paquebot d’aller dans le cimetière des paquebots où il finira sa route puisque sa tâche est achevée …
Petite fille a pris en mains le volant de la barque,
je le lui ai cédé.
Barque épouse sagement le chemin de rail.
Petite fille tient le volant et je reconquiers ma part de libre arbitre.
Est-ce sûr ?
Suis-je vraiment devenue maîtresse de ma route ?
Dés la seconde séance de peinture spontanée, ce 3 février 2000, pinceau fait naître soleil (peinture n°21 de la galerie de mavag) sur la planète terre de ma feuille. Le soleil, qui se pose en premier me donne sourire, brille d’un superbe éclat orange. Ce soleil allume le printemps une bonne partie de la séance jusqu’à ce que pinceau me montre que le véritable soleil que je cherche, loin d’être posé sur terre se niche tout Là-haut dans le Ciel. Cette distance m’effraie. Cet éloignement me rend colère. Je réceptionne si mal cette idée de Ce Soleil si lointain que je ne parviens pas à L’intègrer dans mon tableau.
Je vais durant une, deux, trois, quatre, cinq années continuer à réagencer le bas de mon puzzle, ma réalité terrestre, matérielle. Tout se passe comme si je reconstruisais mon « jeu de patience » dans lequel j’ai placé, en conscience, cette année 2000, la pièce « moi ». Je vais continuer à tourner autour de la restauration de ce « je » de patience, si j’ose le nommer ainsi en langue des oiseaux, sans concrètement, sans consciemment, pouvoir poser la ou les pièces « UNIVERS », en enveloppe protectrice au-dessus de lui. Je reste bloquée sur la zone sub-ligne d’horizon, je reste bloquée à ras de terre. Ma vue et ma conscience se limitent aux seules visions terrestres, concrètes, touchables, palpables. Entrer dans une vision universelle, une vision éthérique, pouvoir oser voir la terre faisant partie d’un TOUT ENERGIE reste impossible. « Être partie de ton Tout comme Tu es en moi » restent des mots qui tourbillonnent autour de moi sans parvenir à se poser en moi. Je vois, je devine des morceaux du puzzle mais je ne parviens pas à les assembler… Je suis et Tu es. Je suis et Tu es extérieur à moi. Nous sommes encore séparés jusqu’au jour où je T’entendrai, jusqu’au jour où je saurais T’intégrer.
Revoir le féminin en moi
Bien positionnée dans barque,
Voici que monte, le long de mon bras, une vibration.
Au bout de ma ligne, j’ai ferré une prise …
je remonte le fil …
… j’entre dans la reconstruction de mon corps au féminin
Ces années 2000, ma transformation se manifeste au travers de rêves et de visions que j’écoute, que j’enregistre sur mon journal, sur lesquels je médite et par lesquels je m’édite …
« Quand l’Ankou est apparu, il est venu « me mourir ». Cette vision flashe passée, sur l’écran de mes rêves les images se sont succédées : Je suis femme assise, en pleurs, au bord d’un gisant -immense sculpture au féminin- je suis si chagrine que je perds l’équilibre et me rattrape juste au moment où j’eusse pu choir dans la bouche ouverte de son tombeau … L’image qui suit me présente en forme momie allongée dans un sarcophage à coeur d’une pyramide … la ronde des mortes continue et prend fin quand devenue gisante sur un lit de pierre, je sais mon corps lui-même devenu semi-pierre. C’est alors l’arrivée du Feu. La vieille femme en moi a brûlé, juste là, dans mon bas-ventre, je l’ai ressenti. Devenue femme solaire achevée, sans mouvement, allongée sur son latéral gauche, elle m’a éveillé par un éclatant « Libérez! », au titre très visible de l’article du journal posé sur le sol, à côté d’elle.. »
L’Ankou personnification de la mort en basse Bretagne, l’Ankou vieil homme vouté à la faucille en ballade est à coeur de ma vie. Sa mort en faucille-point d’interrogation me demande de faire mourir la femme, toutes les femmes en moi qui gisent et brûlent dans ces visions … Ce passé non dépassé m’effraye. Quelques temps de méditation, quelques temps de respiration s’écoulent et un autre rêve me montre des voies.
« D’abord deux voies, l’une à gauche est l’escalier duquel je descends pour rencontrer au pied des marches un vieux monsieur gentil, le pur contre modèle de l’homme qui m’effraie. Ce vieux monsieur n’est ni gueulard, ni mou, ni barbu, ni incapable de tenir son autorité. L’autre voie, à droite, s’accole à un mur qui assombrit le lieu. C’est un autre escalier duquel descend une grosse femme, lourde, pesante, elle vient à moi si lentement que je saurais la suivre avec facilité. En fin de rêve, d’ici, d’en bas où je suis positionnée, je vois tout en haut du mur, un hublot lumineux habité d’une croix qui le recrée en ses quatre quarts de cercle … c’est la troisième voie. Elle existe mais elle n’est pas tracée. Aucun escalier, le chemin à prendre ressemblerait plutôt à un toboggan. »
Je sais au réveil que j’ai déjà suivi les deux voies avec escalier, le rêve me propose une voie médiane avec toboggan. Je le sens, elle est le seul moyen de déployer un beau lâcher prise afin de rejoindre le point de jonction des trois voies.
Tandis que je navigue dans ma vie d’un escalier à l’autre, la conscience endormie ou timidement éveillée ces jours autour du rêve, j’observe ma pensée et suis surprise de la vision qu’elle m’offre en un éclair fin 2001. Ce corps qui est mien, d’un seul coup d’épée, de la poitrine au hara, peut être tranché de telle sorte qu’il se scinde en deux parties pour, en le laissant choir, supprimer tout le devant de mon corps. Cette opération réussie me rendrait androgyne, ange asexué et me raménerait à l’époque où ni père ni mère ne me voyait femme et m’acceptait comme enfant. Cette opération effacerait tous les éléments attractifs de la femelle en moi, m’asexuerait en me protégeant moi-petite fille de tout mâle.
La conscience de cet écartèlement de mon corps est si intense cette après-midi d’automne, que je ressens physiquement la séparation de mon corps en ces deux parties verticales. C’est un flash lumière de cet état ! Immédiatement, merveilleuse vision, en simultané dans le corps et dans ma tête, les deux parts séparées de mon corps se ressoudent. Trop fort ! Tout s’est déroulé alors que je pilotais ma voiture. Je suis obligée d’arrêter mon véhicule. Je sens profondément la soudure de ces deux parts de moi, j’ai besoin de m’assurer de leur bonne adhésion, j’appuie mes mains sur le devant de ce corps, tout le long, de haut en bas, de la gorge au bas-ventre. C’est la matérialité étonnante, la reconnaissance surprise de moi femme. Cette conscience d’avoir le droit d’être femme me donne envie de crier, de chanter, de rire, d’Être. Voilà après ces années de séparation, de l’adolescence à la pré-ménopause, j’entre dans l’acceptation de mon corps, de mes attributs de femme, de ma matérialité féminine si longtemps refusée. Je suis femme, je m’aime femme par la douceur de mes seins, par la rondeur de mon ventre, par les douleurs de mes menstrues.
Le chemin de cette union avec mon état d’être transforme tout. Je ne vis plus en un corps-décor mais bien dans l’habitacle de mon âme. C’est l’home, le logis dans lequel mon Âme a choisi de vivre qu’aujourd’hui j’aime et embellis pour que moi-Moi nous sentions chez nous en ce corps de femme, en ce corps féminin, en ce corps Annie. Voilà je me reconnais Annie, j’accepte Annie, je suis Annie. De ce jour-là, je mets en marche la construction de ma pièce privée. Une pièce dans laquelle je Me rencontrerai, dans laquelle j’irais peindre, dans laquelle, en conscience, je me relierai à Moi. Convaincre l’autre, l’époux, d’adhérer à mon désir d’une telle pièce ne fut pas facile. La difficulté est palpable, de même nature que ma difficulté à me séparer du vieux masculin en moi. Ma moitié au masculin visible, l’époux, ne voit pas le sens de mes agissements. Ma moitié au masculin en moi-même est elle aussi largement myope, elle a tellement perdu l’habitude de M’écouter, elle a tellement pris l’habitude d’obéir à l’autre, chef, père ou compagnon de route …
Le toboggan est là mais souvent je prend les anciens escaliers, j’ai si peu l’habitude du lâcher-prise. Ma seule certitude est que cette route correspond à la troisième voie de mon rêve mais je n’en connais pas le sens précisément, je ne sais où elle peut me mener, alors le doute m’effleure, me pénètre, le stress m’habite … Mon parcours est cahotique puisque je vis dans le paradoxe de la recherche d’une force suffisante en moi pour achever mon lâcher prise, là où l’abandon serait l’unique voie.
Pourtant la route continue et je suis loin d’avoir fini le voyage. Rencontrer l’amour de moi, trouver, adopter la yoga attitude dans les exercices réalisés au matin, par la conscience de mes gestes dans les moments de tumulte et surtout par l’attention, la quête de ma conscience la plus constante, du ressenti d’être dans mon corps.
… je libère la place pour mon esprit au féminin
Toujours bien positionnée dans barque,
le long de mon bras, la vibration grandit.
Au bout de ma ligne, je ferre la prise …
elle est énorme …
C’est par un rêve de baleine que démarre la transformation de mon esprit à partir de ce mois de mars 2002. « Papa, maître de cérémonie de la fête offre un grand repas dans lequel sont proposés des steaks de baleine. J’admire ces morceaux de viande. Ils sont très épais et paraissent délicieux avec leur couleur extérieure gris souris très douce et cette chair un peu rosée à l’intérieur. Le chef-cuisinier propose de goûter de l’oreille. Et je vois la baleine en vie, exposée dans un parallélépipède en verre transparent. Elle respire à l’aide de tuyaux puisqu’il n’y a pas d’eau dans son abri. Le cuisinier a découpé les si beaux steaks sur sa hanche droite qui reste non visible lorsqu’on se positionne face au parallélépipède. Maintenant il attaque une découpe du côté de l’oreille en haut, toujours à droite. A la vue de ce tableau, je suis malade. Je ne peux ni ne veux regarder plus longtemps ce spectacle … »
Mon cuisinier-mental a tout mis en oeuvre pour me faire croire que baleine n’est que bonne à consommer dans certains repas de fête, pour honorer les honorants … L’intellect n’est à reconnaître en moi que pour le prestige qu’il apporte aux autres et je souffre de cette bête sortie de son élément naturel, à qui on donne de l’air par des tuyaux pour lui permettre de survivre, à laquelle on coupe une hanche, une oreille … J’étouffe… Comment me tirer de là ? Je vois, Ô Baleine-Moi, combien je me fais souffrir. Si je ne peux sauver les autres, je dois chercher à Me sauver, je peux arrêter d’arracher des morceaux de Moi, je peux cesser de Me mutiler pour plaire à l’autre, à papa et à la société. Ne pas retomber dans le vieux schéma de la reconnaissance de l’autre. Etre seulement en axe avec Soi et S’aimer.
L’attente, la rencontre, l’apaisement, tout cela ne dure qu’un temps. Ô Femmes de mon ascendance je vous remets ce moi-peau ou plus justement je me démets de votre moi-peau, de cette chappe de plomb qui nous a empêchées d’être parce que , dans votre éducation civile et religieuse, une femme n’a pas à être. Quelle soufrance vous vous êtes infligé et quelle souffrance je me suis infligée pour conquérir la reconnaissance de l’autre. Chaque refus de l’autre devenait refus de moi si violent que je m’éclatais en mille éclats de colère, de désespérance, d’impuissance. Je comprends soudain qui est baleine. Baleine tu es moi en ces instants de déchirements, quand j’ai donné un morceau de ma hanche, quand j’ai appris à sortir de mon élément eau, pour vivoter dans une atmosphère de pseudo reconnaissance de l’autre parce que je me soumettais à son vouloir. Dans sa symbolique mon mal de hanche, appui premier, fondamental de ma jambe droite, est mal à la mère, est mal au siège de ma puissance profonde. Si je lâche ma hanche, ce sont mes appuis intérieurs de fond, mes croyances les plus enfouies sur le rapport à la vie, qui lâchent en moi. Côté oreille capteuse de sons, réceptrice de messages sonores, en relation avec le principe de l’eau et de nos origines, oreille mesure de la capacité d’intégration de ce qui vient de l’extérieur, baleine me montre qu’en cette part de mon corps je dois arrêter de me déchiqueter.
Un vie d’auto-destruction était possible lorsque sur le manège de paquebot je tournais et virais sans conscience, lorsque je me laissais piéger par le tourbillon de ma vie. Mais là où je suis positionnée aujourd’hui sur paquebot, dans ce virage du rail, juste avant la descente vers l’Océan, c’est d’une rupture avec mon relationnel avec Vous Là-Haut qui m’est montré du doigt … Que vais- je faire ? Je décide de m’ouvrir à Vous et choisis de suivre baleine dans son élément. Sa disparition est une histoire mémorable que « mavag » a déjà relaté en Flux sous le titre « Va ne te retournes pas ». Je me plais ici à rappelé simplement ici qu’en ce jour de Pâques 2002 , Baleine a disparu dans les flots … Baleine en ce dernier geste a libéré l’espace pour mon Esprit .
Ensuite les jours se sont enchaînés, les maillons de ma chaîne reconnus ont trainé, douloureux, entre mes doigts. J’aurais pu les laisser choir, mais j’ai eu besoin de les tourner dans ma main, de reconnaître mes lourdeurs du passé dont ils étaient le symbole, de leur donner des noms : relation aux autres, quête de reconnaissance, dénigrement de soi-même, écrasement, auto-destruction. Autour de moi les séparations se matérialisent. La dame en noir m’abandonne, part à la retraite, me libère de mon vieux jeu. Ecartèlement. Toutes nos relations aux autres dans le chemin de la sympathie, anthipatie, sont porteuses d’écartèlement. Je recontacte l’abandon, je recontacte la nécessité de m’en remettre à moi-même. Mes repères changent. Ce ne sont plus des béquilles extérieures à moi sur lesquelles je vais m’appuyer, mais des parties de moi. Mais j’ai peur … Alors quand à bout de tristesse, mental acceptait de rompre avec le déferlement de mes regrets, j’ai appris à appeler baleineau au secours, pour rompre avec ma tristesse, pour danser avec lui sur l’océan, marier l’eau et le feu …
Le grand chêne centenaire à la lisière de la forêt
Le vieux schéma : me limiter plutôt que de faire de l’ombre à l’autre bascule. Je replace corps et intellect-esprit à sa juste place. C’est grâce à ce corps qui est à mon service quand je le désire, qui tient debout : solide et fort, qui est rapide, sait saisir fermement, que je peux agir. Il sert mon intellect autant qu’il est servi par lui. C’est le meilleur canal possible qui peut contribuer à la réalisation de ma vie. J’ai pris conscience que si je ne crée pas comme cela parle en moi, parce que je veux protéger l’autre, je ne donne pas ce que j’ai reçu, j’empêche l’expansion d’autres êtres qui auraient pu recevoir. Je ne vis pas à ma juste place. Je prends conscience que je suis mon propre intermédiaire pour me relier, pour lâcher prise … mes donneurs de soins, sont des canaux particuliers qui ne fonctionneront sur moi que si je suis receptive … Voici que je me prends en charge. Mes chers thérapeutes « Merci » d’avoir ouvert la porte, de m’avoir montré un chemin, mais de ce jour, c’est moi qui marche, c’est moi qui prend la graine que vous me donnez pour la mettre en terre et lui donner le droit de devenir ce qu’elle est …
L’ère de moi sauveur au-delà et en dépit de moi-même est finie ! Le grand chêne centenaire, le premier à l’orée de la forêt, juste au bord de la colline verdoyante, offre son feuillage touffu, superbe, son tronc large, rond, sans crevasse, grisé, pur. Il est profondément enraciné. Il offre sa force ancrée, son ombrage dense et gai. Je suis Joie, mes branches, bras tendus en latéral font le tour de la terre, je vais d’alpha à omega, d’un bout à l’autre des mots, des pensées, en toute créativité. Je suis ressourcée.
Mon changement génère celui des autres … J’ai rendu à chaque femme, à chaque homme, part de moi, son histoire et je me suis quittée pour devenir une Annie libérée… Michel – Ange disait « que la statue est déjà dans le marbre , et qu’il suffit d’enlever ce qu’il y autour pour la révéler. » Restent encore quelques bouts de marbre, mais ma sculpture au féminin est réellement bien avancée ce jour de mon 56° anniversaire …
CHAPITRE 3 : DES MURS MENTAUX AU MUR PHYSIQUE
A retracer le chemin sur lequel je m’aventure ces années 2003, 2004, 2005, je visualise enfin les murs-délire montés autour de moi par mental protecteur. Leur épaisseur et leur hauteur sont telles que les défaire ne peut être possible qu’en les éclatant par quelque coup de bombe. Je sais que mes actes convergent pour la vie de mon âme point pour l’autre mais ego s’est laissé écraser par le poids de l’éducation parentale. Je suis prisonnière de mental. Je ne sais toujours pas m’en défaire surtout devant mes créateurs biologiques. Ces années-là, mes chers parents toujours en vie, je vous visite hebdomadairement et j’ai peur de vous blesser. Mes visites chez vous sont faites parce que je refuse de ne plus vous voir ou, plus justement dit, que vous ne puissiez plus me voir. Je n’ai nulle envie de culpabiliser de vous abandonner. Mais alors quelle est la valeur réelle de mon don ? Je continue vers les autres et vers vous mon abus de don commencé si tôt dans mon enfance.
Trois, en barque, embarqués …
Installée dans le dernier virage de rail,
barque, avant qu’elle ne se glisse dans l’océan,
accueille ma nouvelle femme reconnue,
mon vieux masculin encore surpris de ce changement,
et jeune yang qui se colle tout fiérot à eux deux.
Les tôles de superstructures bruissent.
Sont-ce des sons nouveaux qui remontent jusqu’à moi ?
Est-ce simplement Féminin reconnu qui est mieux à leur écoute ?
Ces bruissements de superstructure se vivent en moi au présent. Ils me chantent mon mal-être dans le don. Savoir éviter l’abus de don. Me permettre d’oser redemander son dû à qui profite de mes abus de don. Savoir donner sans me sacrifier, sans taire ma créativité et savoir recevoir, savoir reconnaître l’autre, savoir reconnaître d’où vient ma force créative.
Les évènements m’offrent de quitter le vieux chantier du donner-recevoir puisque au Lycée petite dame en noir est partie à la retraite. Je n’ai plus de mentor pour organiser ma pensée, diriger ma route. Je suis seule maître à bord. Cette liberté ouvre la porte à l’aventure pour la femme nouvelle en moi, pour le nouveau yang. J’ose me lancer dans la création d’un nouveau travail d’équipe en BTS. J’ose prendre ma place, ma juste place dans le travail. En quittant petite dame en noir et nos interférences abusives dans la vie des autres, j’inaugure l’apprentissage d’une sagesse. Je prends mon temps, …, un peu. J’arrête de posséder la création, …, un petit moment. J’accepte de laisser des tâches inachevées, …,très peu et en sélectionnant celles qui me paraissent vraiment secondaires. A la maison, je prends, vraiment, le temps de prendre un bain, le temps, un peu mieux, d’aimer l’autre ; au lycée, je prends pour quelques semaines en cette rentrée nouvelle, le temps de chercher la respiration pour le bien être de l’équipe pédagogique.
Ce travail que je vis avec l’extérieur est de même nature que celui qui se vit en moi. Je veille sur mon vieux yang encore attaché à mes basques, sur ses complexes, ses mal-être. Je surveille mon jeune yang tout guilleret, inexpérimenté, empli d’incertitudes. L’un me quitte, l’autre prend sa place. Le vieux peut s’incruster, le jeune peut me bousculer. Entre les deux commence à exister « yin », mon féminin récemment reconnu. Je sens que son inexpérience m’amène à fausser la donne. Elle est si prompte à s’offrir, tellement en démesure affective !!! Comme le petit enfant qui dans son évolution parvient à lâcher la main de l’adulte qui le rassurait jusqu’alors, le départ de ma complice petite dame en noir à la fois dévorante et aidante, me fragilise et me fortifie. J’ai besoin d’un Ange qui veille sur moi. Je prie le Ciel qu’il ne me perde de vue. Dans ce lycée, lieu de travail dont le rôle pour mon Être semble avoir toujours été celui d’un laboratoire d’expériences, je lance donc le parrainage des étudiant(e)s de la nouvelle promo par d’anciens devenus professionnels et l’associe à la continuation du tutorat par tous les membres de l’équipe pédagogique.
Il y a des moments où ma créativité m’amène à la réalisation de l’ouvre pour le seul bonheur ou service de celui à qui elle est destinée. Cela est beau à cour de moi. Globalement quand je suis dans cet élan créatif, je me sens vivre en reliance avec mon Âme, je suis aidée par Elle. Dans l’acte juste, je m’étonne de la liberté, de la justesse des mots et des actes, du ressenti que ce n’est pas moi qui parle mais que cela parle en moi et aussi de mon attention à ego, à son orgueil, de ma veille sur son humilité, sur son authenticité, de ma reconnaissance de lui, de l’amour de moi telle que je suis. Dans cet état de grâce, je suis une mère pour moi … Cela ne dure !
Car viennent les moments où mental déforme la toute neuve créativité venue de mon Ouverture. Mental les décrée et viennent les moments lourds, mental s’y emballe et je déforme tout. Ego, largement habitué par vieux yang, tend à nouveau vers un orgueil en démesure, vers une idée fort regrettable, de mérite personnel. La folie d’ego m’envahit, il se prend pour l’unique acteur de la Vie, oublie les Aides d’Au-delà et me laisse dans l’inconfort de son manque d’humilité, de mon manque d’humilité. Lors de ces déraillements je suis prête à tout stopper. Je voudrais fuir.
Barque oscille.
Sur le rail où elle glisse très lentement, mes deux yangs se chamaillent,
je les laisse aller, j’oublie nouvelle yin,
je ne sais plus regarder au-delà de mental,
je ne vois plus l’océan, je ne sais plus pêcher .
Alors, soudain, quand je crois que tout est réalisé, les évènements cassent le rythme. Je passe des journées difficiles où le chagrin dans mon dos pèse, alourdit mon chakra cour. Mon dos arraché crie l’abandon qui me hante. Si je prenais des distances avec les évènements de ma vie tout s’allègerait, mais je m’enlise en eux, je les reçois comme des gifles qui me seraient destinées. Je vis dans le nuage de ma peine. Je ne peux en sortir que par les pleurs, par les cris que je délivre dans la solitude, au volant de ma voiture, dans une ballade au bois, afin d’accepter ce qui est, ce qui me déchire. Les peurs reprennent le pas sur l’enthousiasme et déforment légèreté en lourdeur. Au lycée, l’abandon de la petite dame en noir devient cause de mon obligation nouvelle de créer ; dans ma vie privée, par l’annonce de l’arrêt de ses ateliers de peinture Marie Perret m’éloigne d’un ressourcement, d’une joie de la création peinture en groupe.
Où est l’ouverture de mon cher Féminin ? Dans nos promesses à nous-mêmes il y a notre part d’inconscient qui vient nous trahir. L’heure de lâcher l’illusion de la perfection sonne une nouvelle fois ! Je suis sur terre parce que Dieu nous a invitées mon âme et moi à venir réaliser une expérience de Vie. Il ne m’a pas mis de revolver sur la tempe pour que je vienne. En ce cas pourquoi me rebeller ? Parce que la fête n’est pas celle que j’attendais ? Est-ce la vérité ?
« Dieu est banquet ». Sais-je, en conscience, chaque jour, chaque nuit via mon âme, participer à ses repas ? Vous dites Dieu m’a invitée sur terre, OK ! Mais l’évidence est là, mon mal à la jambe gauche, chronique depuis un trimestre, me tiraille, me criaille l’imperfection de l’ancrage en cette terre de mon féminin nouvellement reconnu. Pour que, encore et encore, soit vraie cette incarnation, une solution s’offre à la créatrice que je suis : abandonner l’appropriation de mes actes et de leur résultat. En fait, idéalement, ma solution serait d’accepter la mort en tant que néant, de ne plus penser à mes actes, achevés ou non, puisque de toute façon ils seront absorbés dans le néant, ils sombreront dans l’oubli…Ô Ego ! Ô Mental ! Pourquoi ne l’entendez-vous pas ainsi ? Vous n’êtes que deux rebelles ! Je le sens mais ne fais rien pour arrêter ce courant. Vous vous êtes approprié la création du parrainnage et du tutorat, pire, dès la fin du premier trimestre, abruptement, vous m’avez fait abandonner la communication constructive avec les membres de l’équipe pédagogique. La riche création pédagogique de la rentrée scolaire a mu sous votre idée égoïste, s’est altérée sous la paresse des collègues, ou plus justement sous leur non-désir de s’investir dans une tâche que vous leur imposiez. Tout s’est dévalorisé sous le poids de votre dictature. Une nouvelle fois, par vous deux, le chemin de la fuite s’ouvre devant moi. Je ne peux plus vous suivre dans votre quête de la reconnaissance. Je me lasse tant d’être mal reconnue. Les uns me voient forte et aussi impérative que je l’ai toujours été alors que je me ressens changée, d’autres me voient tellement différente de celle à laquelle j’aspire à être qu’ils me désarment. A travers le regard des autres je me sens osciller entre femme bulldozer et douceur féminine. Il est temps que je vous quitte chers mental et ego. Je vais chercher refuge vers l’Au-delà.
Hélas, vers ce lieu aussi la communication passe mal et le lien paraît bien difficile à créer. Je m’étire si faussement vers cette autre dimension que je délire. Quel est mon but ? Sais-je seulement le définir ? Comment vais-je l’atteindre ? Paradoxalement, à certains moments je me ressens toute proche de lui, mais sitôt, comme une balle de Jokari, je suis rejetée en arrière, dans un effort déchirant je me relance mais jamais je ne parviens plus avant, jamais je ne vais plus loin … Ah si l’élastique craquait ! Ah si je pouvais mourir ! Comment mourir ? Qui mourir ? Tout le chantier de vie conçu, organisé, réalisé laborieusement jusqu’à ce jour par ego et mental, s’approche enfin de leur but pour moi : «je serais la plus spirituelle, douce, bonne, amour, je serai telle la Vierge Marie « . Quand ont-ils manifesté ce rêve de moi en être lumineux ? Pourquoi l’ont-ils créé ? Pour compenser quelles injustices, quels vides ? Je suis consciente que ce rêve est désir inaccessible, qu’il est mon fantasme … Pourtant, je ne veux pas mourir maintenant, j’ai trop peur de perdre tout cet acquit. Il me faut cependant arrêter votre jeu, mon ange me souffle qu’il devient nocif. Je voudrais ne plus vous aider et devenir témoin passif de vos projets mais les jours s’enchaînent et leitmotiv revient « je n’y arriverai pas, j’ai envie de mourir ». Cela est tellement à la surface de mes pensées, tellement visible que, soudain .
Ego et mental en folie
Barque oscille puissamment.
Va-t- elle déjanter ?
Va-t-elle quitter son axe et choir ?
Va-t-elle casser sous le poids de mes murs-délire ?
Les cannes à pêche ont un fil si court qu’elles n’accèdent plus à la mer.
Où vais-je trouver du poisson ?
En ma nouvelle ouverture yin, tout défile. Je reconnais mental et ego. Je les vois juger les autres autour de moi, ils les sentent étrangers parce qu’ils ne marchent plus sur leur chemin, puisque contrairement à mental et ego, ces autres n’ont pas fait le stage de 1993, n’ont pas rencontré Aigle. Je le ressens, mental et ego se croient supérieur aux autres, les toisent, les regardent comme pauvre peuple !!! Leur démesure en cette année 2003 me saute vraiment aux yeux.
OK, chère superstructure j’entends tes bruissements.
Mon père ne me reconnaissait pas, ne me félicitait jamais ouvertement, me voulait toujours plus forte, plus méritante, plus grande … Ma mère suivait mon père dans le même chemin … Alors mental et ego se sont révoltés face à ce qu’ils croyaient être non-reconnaissance. Ego et mental les ont défié. Mes parents allaient voir qui je saurais être. Mental et ego ont osé aller loin dans la négation de l’autre qui un jour, peut-être un unique jour, a osé tourner la tête en lieu de répondre à ma demande. En fonds sonore, à chaque heurt qui vient, résonne l’une ou l’autre de ces affirmations : »Je suis supérieure à vous par ma quête « , « Je serai supérieure à tous quand je serai arrivée », « Je serais un être inégalable, je serais d’une sagesse et d’une justesse qui m’autoriseront à dire : » à mes pieds peuple de rien ! » ».
Sont-ce ces assertions de l’ordre du possible ? Je tambourine en ma tête pour m’en convaincre, mais le doute est si puissant, la désespérance si grande. Longtemps non dites et surtout non conscientes, trop religieusement honteuses pour se révéler au grand jour en moi, ces affirmations ont gâché combien de mes rapports aux autres ? A présent, ma fausse humilité, mon orgueil démesuré ont atteint le point de honte et génèrent mon cri permanent -que je saisis mal puisque n’en conscientisant point la source- : « je n’y arriverai pas ». Je comprends les assassins qui ont l’orgueil de leur folie et veulent en faire la publicité. Leur fantasme les dépasse il leur est nécessaire de l’étaler au public pour le visualiser enfin. En l’instant, je me demande si je saurai seule vider ma poche de folie, si je pourrais sans témoin faire le grand ménage que j’entreprends pour m’aider à Être. La honte de la non-reconnaissance de moi, mes peurs, mes manques, ont bâti ma folie. Jamais las de se battre, ego en ce moment-même se justifie encore. Il me murmure :« J’ai construit ce fantasme-défi pour sauver mère de la tyrannie de l’homme, la sauver de sa souffrance, de son incapacité à dépasser l’attitude de rabaissement de la femme par l’homme quel qu’il fut, son père ou son mari. Aujourd’hui tu lui montres qu’elle a les outils pour transcender cette douleur, comme tu le fais toi-même, mais t’entend-elle ? ».
Cher orgueilleux mental-ego, de grâce, cesse ton jeu ! Que naisse Conscience ! Il est indéniablement l’heure de me descendre du piédestal. Car toute cette écriture que je viens de poser sur ma folie n’est rien d’autre que pure descente du piédestal où vous m’avez hissée chers ego et mental. A terre, enfin j’arrive face à moi, je suis à hauteur d’homme, j’ôte mon masque d’orgueil, je deviens qui je suis : une femme ordinaire. J’ai atteint mon point d’abandon de vous ego et mental. Je peux me tourner vers le Ciel :
« Seigneur j’accepte d’abandonner le rêve de pouvoir,
de pouvoir pour écraser celui qui m’a opprimée,
de pouvoir pour transformer celui qui a opprimé maman.
Seigneur j’accepte d’être sans vengeance.
Seigneur combien mon pardon est difficile aujourd’hui,
l’être qui a fait entrer ego dans mon rêve-folie est vivant,
cet être reste toujours égal à ce qu’il a toujours été.
Comment puis-je lui pardonner ?
Je connais Ta réponse Seigneur,
Il me suffit de le vouloir.
Oui, je le peux !
Oui ! Seigneur je pardonne !
Oui ! Seigneur ma petite fille pardonne ! »
.
Je suis restée apaisée quelques jours, puis doucement le doute est revenu. Dedans, au fond de mon coeur, je le sens, le pardon n’a pas été donné. Je m’en désespère. J’attendais, inconsciemment, une réponse à mes invocations vers Toi, Seigneur. J’espérais un résultat sensible mais rien n’a bougé. L’autre ne change pas, l’autre ne changera pas, qu’il soit père dominateur ou qu’elle soit mère bouc émissaire. Seigneur, je ne parviens pas au pardon. Seigneur, je ne sais pas abandonner le rôle de sauveur quand les acteurs de mon théâtre de vie sont toujours avec les mêmes répliques sur la scène. Seigneur, si je fuis ce théâtre, est-ce de la lâcheté ? Le piédestal pour aller plus haut que l’autre et le manque de confiance en moi n’est-ce pas le même volet en recto, verso ? Comment puis-je dépasser tout cela ? Comment puis-je parvenir à ne plus vivre cela en moi, à rester vigilante, à savoir mettre toujours l’autre face à son incohérence. Vertige ! J’ai l’impression que tout a été vu, dit, écrit, qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil, que tout redevient comme d’habitude. Je pensais avoir abandonné l’idée du suicide mais j’ai encore envie de fuir les montagnes qui sont devant moi, de fuir la gente masculine de fuir les hommes : époux, père et même fils et plus que tout, j’ai soif de fuir celle qui a toujours été la montagne de ma vie, j’ai soif de fuir maman. Au secours ! Mon âme, au secours ! Seigneur Pitié!
Sans le dire jamais, j’ai depuis 2000, été chercher une autre mère en la peintre. Et si tout s’éclaire de ma folie, c’est parce qu’en ce printemps 2003, est annoncé l’arrêt des ateliers hebdommadaire de peinture. Cette décision sonne comme un nouvel abandon de moi. J’ai mal ! Messager-Peinture pourtant me rejoint en mon atelier à la maison, m’offre un message fort en peignant sous ma main « Celui qui est maître de ses pensées est plus grand que celui qui est maître du monde » (mental fou n°14) . Sans les mots pour le dire, par les seules forces de ce visage, de ces couleurs posés sur la feuille, cette peinture me parle de l’inutilité d’une quête de mère extérieure, de la nécessité de devenir enfin une petite fille capable de lâcher la main de l’autre et de la non moins évidente nécessité de ne plus influer sur l’autre pour m’assurer moi-même. Je dois prendre mes distances avec moi, être observateur, ne plus juger, m’aimer, m’accepter, être patience et communication. Je dois entrer dans la volonté de l’écoute, du non agir, dans cette volonté où le temps n’est plus précipité, où tout est.
Et la Lumière se place dans tant de mes zones d’ombre ! Dans ma vie au quotidien les autres me révèlent des facettes de moi qui m’interpellent ou m’agressent. Mes abus de défaitisme, de pessimisme jouxtent mes abus de dépassement de moi, mon utopie. Toutes sont vérités de moi. Par certains de ces aspects de ma vie je m’éloigne de la souffrance familiale et m’exerce à construire une nouvelle façon de vivre. Par d’autres aspects je ne peux me détacher de ce passé, de la peur de la souffrance, de mon mal être face à l’impermanence des choses. Ma barque titube dangereusement.
Où puis-je trouver un refuge
Barque hoquète,
j’aperçois derrière moi mes vieilles barques qui tournent encore sur manège,
ne sont-elles pas plus paisibles à vivre ?
Revenir en arrière, dans l’état reposant de mon inconscience, est-ce impossible ?
Dans cette zone de non-foi, comment puis-je retrouver le goût de la pêche ?
Que fais-je, que faisons-nous dans cette barque ???
Au Lycée, les évènements ne convergent pas vers ma tranquillité. Pour changer les conditions de travail, les syndicats d’enseignants lancent une grève et dans cet élan de revendications les collègues de l’équipe des BTS remettent en cause le tutorat que, ces temps-ci justement, je leur impose plus que je ne le négocie avec eux. Je ne peux pas plus me lover au coeur de mon couple. La casse de ma voiture dans un accident duquel je suis totalement responsable, me réveille sans séquelles corporelles, mais ne m’apporte pas la paix, ni l’ouverture vers l’autre. Je remets le couple en cause. L’époux est devenu le mur. Avant je disais qu’il était mon garde fou. Serais-je en train d’accepter ma folie ? Vais-je abandonner ce mur ? Mon choix se pose -t-il en ces termes ? Je retrouve les pièges du père dans ceux de l’époux, les non-réponses immédiates aux questions, les nécessaires et infantilisants « on va y réfléchir » ou « je vais y réfléchir ». L’huître se referme et la perle « nouvelle yin » est baillonnée. Rompre avec la masculinité, les apparences du pouvoir du mâle, les apparences puissances du mâle par la force, la violence, l’écrasement par la main autoritaire imposée sur la nuque, la non-écoute, le refus du sexe féminin, la négation de l’union équilibrée Homme-Femme. Pour aider mental dans sa noyade, voici que s’ajoute à ma zone de déséquilibres, la lourde perturbation des rythmes de vie dans la maison liée à un décollement de rétine subi par l’époux .
Je ne parviens pas à entrer dans la danse pour être qui je suis. Je continue à regarder mes qualités comme des outils de domination de l’autre, de possibilité d’être meilleure que l’autre, je reste dans cette domination et dans cette humiliation dont j’ai tant souffert, dont je souffre encore. J’ai ô cher mental, utilisé l’intellect, la spiritualité comme armes de supériorité parce que je voyais ceux ou celles qui me paraissaient avoir de belles qualités de ce type, supérieurs à moi, bien mieux que moi et je les enviais. Ce vécu mentalisé à outrance me fait osciller depuis l’enfance entre je te rends ce que tu m’as fait et je suis mieux que toi. Si côté enseignante j’ai toujours vu les élèves en possiblité de progrès, j’ai trop souvent figé les adultes dans la photo d’un moment de négativité. Si j’efface le transparent qui les voilent, apparaîtra le vide. Mental et ego se targuent à voix haute, d’être OK avec la vie qui est, mais en vérité ils restent sourds aux messages « erreur » répétés en flashes réguliers par mon corps. Ces messages sont gentils, pas trop lourds, type allergies, sciatique à la jambe gauche, quelques kilos de surpoids de mon corps. Mental et ego n’y prêtent pas attention et je m’accorde à eux et préfère rêver encore. J’aurais dû me réveiller pourtant dès ce mois de juillet 2003, si j’avais su décrypter les signes lancés par ma Vie en cette visite marquante à l’amie Sabine physiquement très touchée par son cancer, ou encore mieux en ce message personnel direct que l’inspiration de Messager-Peinture m’a invitée à créer sous forme de dessin noir, blanc et argent : Crabe-Peinture 051 .
Je pense trop. Je juge trop à pleurer de désespoir de ne pas être celle que je veux tant atteindre. Je ne m’accepte pas assez. Aimer qui je suis quoi que je fasse. Quitter l’ambition que j’ai de moi, celle de dépasser maman, d’être aussi forte que papa le fut pour elle. Mais alors que suis-je, que me reste-t-il ? Rien ? Qu’est ce que rien ? Le transparent … Le trans -parents … celui qui est au-delà des parents … Mon coeur s’éclate, mon coeur est douleur.
Un stage peinture inopiné se présente en mai 2003. Moi qui crois chercher Dieu sérieusement et amoureusement, qui l’invoque très souvent, voici qu’au moment où, dans ce stage, Son Fils se présente à moi sous pinceau, j’ai peur de Lui. Quand je sens Christ arriver sous pinceau, la panique m’envahit. Ma foi est trop fragile et ne me donne pas l’audace de Le poser sur papier. Au fur et à mesure que je peins, je devine le tracé de Son Visage, je m’effraye. Cette peur m’amène à Le rendre ombre. Lui qui sous pinceau voulait sortir de mon ombre, je le refuse. La méritante ancrée en moi, ne Le méritait pas … Je L’ai fui pour mieux regretter ma fuite, pour vouloir qu’Il revienne, pour être peine de L’avoir caché dans les brumes de ma peur.
Mon coeur s’est égaré dans la non-confiance y compris en Dieu. Si je regarde mon chemin de vie avec Dieu, Il m’a donné et tant repris des êtres amis, que je L’accuse de m’avoir égarée. Je m’en désespère jusqu’à la nausée. Quand prendrai-je conscience que je me suis moi-même abandonnée, que j’ai préféré faire plaisir aux autres plus qu’à moi-même ? Je ne sais voir que l’apparence, que le miroir que me donnent les autres. Pourtant, il est véritable miroir aux alouettes, régulièrement, je m’y fais piégée mais je persisteà ne point écouter la voix de la Sagesse. Ne plus faire confiance aux autres équivaut encore, à coeur de moi, à ne plus me faire confiance, à ne plus me croire moi-même.
Il est clair que par mon acte, par ma volonté déterminée je crée ma vie. Ce matin mon rêve en atteste : des mouches envahissent la chambre et je dis à voix haute et assurée ma décision d’aller chercher le flytox pour les éliminer. Avant que je ne franchisse le seuil de la pièce, les mouches s’engoufrent dans un trou du mur que je ne savais même pas existant et quittent la chambre. Je sais que cela est vérité. Je veux bien le croire. Pourtant, je ne parviens pas à l’entendre, je ne parviens pas à savoir qui décide de ma vie. Sa lourdeur actuelle est si peu facile à vivre. Depuis un an, la peintre ne m’apporte plus sa richesse, par contre son époux Daniel Perret aux stages duquel je participe me donne des outils au travers de son propre art : la musique. Par les mouvements énergétiques de Bob Moore qu’il transmet, comme le fit Marie en ateliers de peinture, je re-ouvre mon hara, mes racines, je sais ressentir mon coeur lourd, mon coeur noir, et peu à peu, je le laisse craquer, se déchirer, s’arracher, même si la séparation est douloureuse. Le 22 février 2004, je l’écris dans mon journal, je suis redevenue petite fille et je me crois libre … je décide de travailler pour mon compte plus que pour celui de maman, je me libère de mes parents, j’ai le compagnon qui me convient le mieux même si quand le doute revient encore en moi j’abuse des miroirs aux alouettes …
La bascule
La mer, les vagues …
Laisser passer les pensées comme on laisse passer les vagues.
La vague et la mer sont eau …
Attraper la vague pour ne voir que l’étale de la mer,
faire monter, gonfler, grandir la vague au-delà de la mer.
Tout s’achèvera dans l’étale de la mer …
Et ma barque se laisse porter par superstructure …
Si les murs autour d’elle se défont, libre sera enfin ma vue …
Lycée, mars 2004, l’inspecteur pédagogique, en réunion publique, sur un refus de ma part de prendre en charge l’informatique pour les deux dernières années d’enseignement qui me restent avant la retraite, dans l’espoir infantilisant de me stimuler, me traite de paresseuse. La méritante s’est retirée d’en moi à la sortie d’un stage avec Daniel Perret. L’insulte ne paie plus. Je refuse de me battre contre sa non-reconnaissance. Je démissionne de mon enseignement en BTS. Je clos un cycle jupitérien dans cette formation.
Avec ce « stop » je me retire de toutes les responsabilités générées par l’enseignement de ces matières dans lesquelles je donnais abusivement de mon temps et de mon énergie. En 1990, j’avais dit « oui pour ce poste en BTS » au Rectorat, mon « père administratif », qui m’avait demandé d’entrer dans ce travail par l’intermédiaire de petite dame en noir, véritable symbole de ma « mère souffrance ». A qui avais-je dit « oui » ce jour-là ? J’ai l’impression d’une bascule, d’un tournoiement, d’un renversement, d’un passage de l’autre côté de la terre. Mon dos s’est ouvert comme l’épine dorsale du dragon. Je suis sûre d’une révolution en moi. Je vois avec ma libération de cette formation, la manière dont j’ai été mangée par les étudiants. Mon trop-maternage a conduit à leur infantilisme. Mon trop maternage a été généré par mon propre infantilisme face à une Administration de laquelle j’ai cherché la reconnaissance. Comme pour l’Administration seul le pourcentage de réussite compte et peu importe qu’il naisse d’un abus de bachotage, d’un abus d’investissement d’une professeur-maternante, je n’ai pas mesurer mes efforts pour lui plaire. La colère s’ouvre un chemin en moi. C’est une colère contre moi que j’ai abandonnée, contre moi qui s’est faite allègrement bouffée en énergie par les autres pour … être reconnue par eux !!! Il est temps de quitter mon rôle de sauveur de tout un chacun. Ne plus m’égarer parmi les hommes. Essayer de m’ouvrir vers là-haut.
Dans cette ouverture, je médite sur « où trouver un refuge ? » Soudain, du ciel, de Là-Haut, dans la Paix au-delà de mental, je trouve un refuge. Géant Vert apparait. Le coeur grand ouvert, en confiance totale, petite fille en moi le reconnait et monte d’un jet en ses bra. Je vis en ce refuge un bel et court instant mais … depuis cet instant de Sécurité, d’Amour profond … je ne parviens plus à me ressentir UN avec Lui. Mon relationnel avec l’époux, les choses de la vie courante m’empêchent de continuer à vivre l’osmose de l’instant de cette rencontre. Mon Dieu que j’ai du mal à saisir Moi-Esprit.
La vie m’a réembarqué dans la galère. Je rame follement. Septembre 2004, la nouvelle rentrée est folie de travail. En dix années sans pratique en profondeur de l’économie et du droit, mes connaissances se sont effritées. Le travail de mise à jour est lourd. De concert, je refonds mon relationnel anti-modèle parental dans le couple. La masse travail scolaire me déborde et me ramène souvent à mon vieux jeu de rôle, à mes impatiences. Je suis consciente de la douleur de l’époux quand il m’accuse de ses maux, quand, verbalement il me tape, alors que le problème qui le trouble n’est pas le mien, mais je n’ai plus envie de me battre, d’expliquer, de sauver. Lasse de parler, je rêve d’autisme, de ce point de mental où personne n’entrera en moi. J’assume mes responsabilités et pour le reste je me réduis, je ne parle plus, je ne répond plus. Mon nouveau mécanisme de défense devant l’attaque de l’autre est celui de la tortue entrant sa tête en carapace, du hérisson se mettant en boule sous ses piquants. Je rentre en moi, je me ferme à tous et à TOUT. Je repositionne mon boisseau sur la lampe.
Petite fille perdue, petite fille réactionnelle, ne vois-tu pas qu’à ce jeu tu perturbes ta vie ? Depuis l’enfance la rebelle en moi n’a pu se vivre au grand jour. Cette année 2005 qui démarre, je décide de travailler sur moi lors de séances de « psychothérapie-spirituelle » avec Marie Perret que je revois, de travail Reiki avec Arlette qui me suit depuis 2 ans. Mes murs protecteurs ressortent. Ils ne m’ont jamais paru si hauts, mais ils m’ont jamais paru aussi utiles pour mon blindage, pour que soit mon silence, pour que derrière eux j’étouffe mes cris, pour que je bloque mes pleurs dans ma gorge, pour que je les y enfonce. Ce blindage psychologique me paraît même insuffisant, alors je le double d’une enveloppe protectrice physique, ma graisse, mon surpoids. Quand je mange, je me stupéfie de ma vitesse d’engloutissement. Je me déteste à ne pouvoir me regarder dans la glace, à ne pouvoir m’aimer physiquement. A la maison, les peintures entreprises restent inachevées. Je dois même les abandonner en cours de création sous peine de les effacer totalement à grands coups de pinceaux ou d’éponge, appliqués de bas en haut. Ainsi en est-il de La Licorne n°140, de La Cathédrale Engloutie n°103 .
Tous mes axes semblent en place. J’ai intégré beaucoup de force en moi. Mais je ne suis pas complètement convaincue que le Ciel, que le Père m’aiment pour moi. Je me tiraille avec mes parents terrestres. Le boulot m’avale alors j’abandonne l’idée d’aller les visiter. Ma vie ici est devenue prioritaire. Je ne cesse de penser, avec culpabilité, qu’ils ont bâti leur vie, et qu’aujourd’hui ces choix de vie créent leur isolement . Je fonctionne plus dans la raison que dans la réelle sensibilité.
Suis-je en train de refuser la fusion de mon Âme et de mon corps pour cause d’imperfection ? Un rêve est venu répondre et graver en moi sa lourde prédiction : « une grue traçante tourne dans le ciel gris acier et découpe quelque chose que je ne sais voir « . Messager-peinture conforte mon ressenti danger de ce rêve avec Arlequin-kaputten n°50. Je suis l’indéterminée. Je fais le grand écart pour quitter mon vieil habit dual, mon vieil habit de quête horizontale, de non-être Moi. Tout m’alerte. Je dois quitter ma confusion. Je dois vivre mes désirs, mes projets, mes possibles pour moi seulement pour moi avec une force, une conviction, une joie, une espérance, une puissance, au-delà de l’air un peu benêt un peu perdu d’arlequin. L’heure de sa disparition sonne. Arlequin disappear ! Arlequin go out !
Pourtant, malgré ces alarmes, ma vie continue chaotique entre mes hommes et moi et j’en veux à Dieu qui me renvoie à nouveau sur un chemin de solitude créative. Mon âme que cela est dur ! Help me pour nous deux à conquérir ce monde, à être dans ce monde, ce monde connu d’en-haut. Les années 1988 et 2005 concernent le même combat mais avec ma conscience un peu mieux éclairée. Mais je suis trop fatiguée pour m’extasier sur un nouveau défi que Vie voudrait que je relève, j’ai plus envie de lui dire « ras la casquette ». Quelle norme dois-je encore bouger ? Celle de la solitude ? Celle de ce Féminin qui est ? Je ne suis qu’une vague de l’océan. J’avance du cour de la masse d’eau, je volumise, j’enfle, la joie, l’expansion tout est extra et toc, clash, le rocher. Que fait-il là ? Dans ma joie je ne l’avais même pas aperçu. Affaiblissement, écume, descente, plus de vie en surface . et puis je redeviens vague et je retrouve la joie et je me reconstruis. Flux. Reflux. Je vise sans cesse l’aboutissement de ma vie en lieu de ne prêter mon attention qu’au voyage, de profiter du paysage en cours, lui seul compte.
La confusion n’est pas finie. Qui m’a dit : « Géant Vert est ton Père de substitution » ? Cette assertion me rend malheureuse. Aurais-je construit dans l’Ailleurs un Géant Vert pour compenser mes manques en mon père terrestre. Ces temps derniers je l’ai entendu, dans la même rencontre, lancer : « c’est normal que l’église se soit effondrée puisque c’est les femmes qui font le catéchisme alors qu’avant c’était les curés », et « il doit me respecter puisque je suis son père ». Ô Géant Vert ! Ô ma valeur refuge idéalisée ! J’observe mes parents. J’essaie de ne pas prendre leurs propos pour moi, ni pour maman. J’écoute. Je vois . mais que c’est douloureux ! Accepter ce qui est. Répondre quand on me pose une question sinon laisser. Oui laisser. C’est la vie qui va et ton expérience grandit. Paix ! Observation ! Amour ! J’ai vécu tant d’années dans l’attente de reconnaissance de ce père biologique, et dans le métier de ce père administratif, que je m’étonne dans le cadre de travail si dense actuel de voir la méritante en moi reconnaître sa propre lourdeur, ses forcing, ses « je dois ». Tous les pleurs que je répands, que mon corps lance, sont mes « je dois » que j’abandonne enfin en le sachant.
Je lis. Je m’imprègne de vérités qui me parlent. L’hiver aurait pu me permettre d’abandonner tout ce qui appartient au passé même si j’ai été très impressionné par lui, le printemps m’offre de retrouver avec joie la conviction d’être mon seul maître à bord. Moi seule fais les pas pour avancer. L’autre n’est qu’une partie de moi qui vient me révéler quelque chose. Admirer l’autre s’est le rendre objet, c’est posséder l’autre, si je suis admirée l’autre me possède. Combien de fois me suis-je reniée pour que l’autre soit ? Se renier ni pour le bien de l’autre ni pour le bien de soi ! Quitter la culpabilité ! Quitter la non-confiance !Tout est possible, à moi de le décréer, de le recréer ! C’est mon choix de ne plus me renier ! Je vais bientôt finir par être, non ? Je reconnais les plantes que j’ai à cultiver, elles sont Patience et Confiance. L’Eau de Vie est un concentré comme le sont les Huiles Essentielles et pour la laisser vibrer en moi les deux plantes, les deux qualités, Patience et Confiance, sont primordiales. Elles me confèrent la possibilité d’entrer dans la Fête, d’être Joie, d’être Plaisir, donc de savourer, de goûter, de sentir, de sourire, de rire, de chanter, de danser, d’aimer, de m’aimer, de me savourer, de me goûter, de me sentir, de me ressentir, de rire, de chanter, de jouer, de danser, d’Être.
Et je vis autrement. Au printemps 2005, saison de renaissance, où le passage de la connaissance de moi à l’Amour de Moi se propose, où je peux m’autoriser à être une femme, à m’accepter incarnée en femme, voici que mon Être solaire prisonnier de mon métabolisme, est mal, ne trouve plus son rythme, n’est plus récepteur, n’est plus ouverture. Trop travail ! Trop de vouloir donner ! Trop de non acceptation ! Jusqu’à ce que cela s’éclate . Un examen gynécologique banal … Une dureté dans le sein … Une mammite ? Et la mammite devient suspecte !!! Et Carcinome entre dans ma vie ! Et Carcinome s’approprie mon corps ! Il est la bombe capable de faire choir les murs de mental .
.. 10 juillet 2015
Adieu Paquebot
En cette mi-année, je peux , en confiance, conclure mon livre sur « l’Ancrage au Pays de l’Homme » et dire :
Qui es-tu Paquebot ?
Quelle part physique de moi te matérialise dans notre 3D ? Mon chakra racine ? Mon mental ? Leur association !
Après ce périple que nous avons accompli tous les deux pour que soit mon ancrage en ce pays de l’Homme offert par Gaïa à mon Âme, ô cher Paquebot, tu vas pouvoir partir. Je suis installée dans ma barque, hors de ta structure, je vogue sur l’Océan et là, je fais le bilan de notre aventure …
Mental a cultivé sa prodigieuse capacité à l’isolement, à l’édification d’un monde à lui, dans ton lieu-refuge où personne, il l’a cru très longtemps, ne chercherait à l’abandonner s’il acceptait …. le formatage … la règle de la vie communautaire propre à ce Paquebot guerroyant contre le monde hostile … c’est à dire à ses yeux quasiment contre tout le monde.
Ainsi fut-il !!!
Très tôt, donc, mental a fait la bascule pour tout oublier de l’Eden, des fées, des gnomes, des sylphes, des salamandres et des anges porteurs de solution et pour entrer tête la première dans la lutte émotionnelle. De l’âge de deux ans et demi et jusqu’à sa cinquante-septième année, l’école fut pour lui le lieu idéal où il a pu mener la vie dont il rêvait afin de s’enliser dans la 3D dissociée. Pour vivre au plus profond de cette vie-là, il s’est facilement laissé formater par l’Education Nationale dès le plus jeune âge. Très vite, il a appris à quêter la perfection, est entré dans les abus du « trop bien faire », dans les déséquilibres émotionnels, les colères, les impatiences, les insatisfactions, dans toutes les non-écoute de la profondeur de l’Être, il s’est enfoncé dans la dualité où règne l’amour conditionnel, la guerre qui favorise la reconnaissance de l’autre et la conquête de l’amour si fragile qu’il peut nous accorder.
Il y a des portes qui s’ouvrent sur les vibrations chaleur, qui laissent venir à soi les vibrations d’Amour, il y a des portes qui s’ouvrent sur le froid, qui attirent la maladie pour permettre au corps de témoigner de ses trop grands déséquilibres émotionnels et spirituels.
J’ai vécu un orage émotionnel si puissant dès l’entrée en mes remarquables deux ans et demi que s’est ouvert le si étrange chemin qui fut le mien durant plus d’un demi-siècle. Les murs protecteurs érigés, consolidés, sans répit par mental, furent puissants, je dirais plus : furent si puissants que leur déconstruction a exigé du Ciel une puissance d’Amour immense, pour m’envelopper, pour soutenir ceux qui furent, qui sont encore mes Aides.
Dans un premier temps, leur guidance fut douceur. Mais cette trop grande tendresse reçue dans l’environnement de guerre dans lequel je m’étais installée, était peu audible à mon oreille émotionnelle. Je ne parvenais point à me défaire de mes peurs. Alors dans un second temps, la maladie me fut donnée comme puissance motrice de ma renaissance. Ce second accompagnement était Amour, même si dans le monde de la 3D dissociée dans lequel je vibrais cela ne me semblait point être de l’Amour. L’Au-delà a ainsi développé ma Puissance Emotionnelle, l’a rendue si grotesque que je n’ai pu que la voir frémir et la reconnaître incongrue, au point qu’un jour heureux est arrivé où je m’en suis défaite.
Ah chère Âme il m’a fallu des expériences lourdes pour pouvoir retrouver la 3D unifiée …
Dans mon Paquebot, en pleine période de semi-conscience, je fus pour le moins décontenancée en ce mois de mai 2005 de rencontrer Carcinome Lobulaire infiltrant. En 2010, la rémission complète était présentée …Ouf ! Fini avec cette épreuve … Que nenni ! Comme ma transformation en dépit de cet outil de qualité a trainé, Carcinome Lobulaire infiltrant est remonté sur ma scène en 2012. Que dire alors de ma surprise en apprenant son retour sous forme de métastases osseuses et sur le foie. Si je reste encore une fois décontenancée à l’annonce de ce retour, je ne suis pourtant pas totalement surprise, au contraire je suis convaincue que le hasard vient me servir une nouvelle fois. Alors je me laisse porter par mon ressenti. J’éprouve la nécessité de m’ouvrir totalement à carcinome et aux thérapies qui vont le combattre. Cette fois, son message subtil m’est devenu audible. « Ouvres-toi spirituellement, grandement et merveilleusement ! » me claironne-t-il.
On ne quitte Paquebot, structure lourde qui vient de si profond en nous, qui a traversé de si nombreuses guerres, qui nous a porté vers tant de fronts depuis de si nombreuses générations, que lorsqu’il navigue dans l’océan tranquille d’un monde de Paix, d’un monde où les conflits sont éteints, d’un monde où l’Amour est le Maître.
En 2015, en m’extirpant des soins officiels de Carcinome, soins de maintenance d’une rémission complète, je suis devenue une anarchique. Paquebot refuse ma présence. Je n’ai plus droit de demeurer à bord. Je suis libre. Paquebot ne garde pas les êtres libres.
Comme en 2002, je fus dégueulée par baleine pour quitter son ventre, Paquebot aujourd’hui laisse glisser ma barque dans l’océan, sans colère, naturellement, simplement parce que cela est le moment.
Sur l’océan, dans ma barque en peau de phoque, doucement, je pagaie …
Je quitte la route que Paquebot de ma lignée m’avait montré, je laisse avec lui les traditions inculquées par hommes et femmes des générations qui m’ont précédée. Mon vieux gardien de vieux chemins, de vieux principes, de cette obéissance sans limite à l’autre au détriment du Soi, de cet amour conditionnel si frustrant, de cette dévalorisation si habituelle du soi, de cette valorisation de la souffrance au nom de Christ sur la croix, au nom de la religion, au nom aussi de la maladie-star, la maladie preuve de notre capacité à porter notre croix puisqu’elle va bellement à l’encontre de notre Joie, de notre Paix, de notre Amour de Soi. Je te quitte … Je m’éloigne doucement de toi. Un peu timidement, je prends mes distances avec les flancs de Paquebot.
Que va-t-il devenir sans moi ?
Dans l’immense océan sans doute il mourra.
Mais comment opèrera-t-il ?
Je ne parviens pas à l’imaginer.
En son temps, lorsque j’ai quitté baleine, je l’ai suivie jusqu’à cœur de l’océan Pacifique, jusqu’au cimetière des baleines.
Y-a-t-il un cimetière des Paquebots ?
Si cela est, est-il amas de tôles totalement déstabilisant, irrémédiablement pollueur des eaux océanes ?
Combien de temps Terre et Océan devront-ils attendre avant que ses déchets se fondent ?
Indubitablement, l’heure est, de la fin de vie de Paquebot, et c’est la raison pour laquelle viennent les réponses à mes questions …
Je viens de m’éloigner de Paquebot et je le regarde pleine de compassion quand … une tornade de Lumière blanche descend du ciel et atteint son gaillard d’avant.
Va-t-elle briser paquebot en deux ?
Non !
La tornade, lentement, le pénètre. Elle danse. C’est une danse de mort, une danse sacrée, elle s’enfonce en lui, et, sous cet embrasement paquebot commence à fondre, ses tôles, toute son armature lentement se liquéfient, deviennent eau et glissent doucement et à jamais dans l’océan.
Paquebot fusionne avec l’océan. Le cimetière d’eau reçoit Paquebot. Paquebot ne coule pas. Paquebot se dilue. Paquebot est eau.
Moi-moi, assise dans ma barque en peau de phoque, moi-androgyne, moi-mon propre père, moi -ma propre mère, ce 6 mars 2015, j’assiste en ce rêve éveillé que je viens de rapporter, à la fin libératoire de Paquebot.
Après un moment d’émerveillement, un moment de recueillement, je reprends mes rames …
J’avance sur l’Océan de La Vie …